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VIOLENCE en psychiatrie
VIOLENCE de la psychiatrie
Ce qui fait VIOLENCE à l'hôpital Sirocco

- Première partie : introduction
- Deuxième partie : de l'étymologie à la violence universelle
- Troisième partie : Les définitions de la violence
- Quatrième partie : Violence et Folie
- Cinquième partie : analyse et conclusion


Analyse et Conclusion

I- Violences légitimes et violences illégitimes

Si des facteurs tels que le stress (59% des réponses) et la peur (36%) peuvent expliquer les conduites agressives du personnel envers les usagers, celles-ci ne peuvent "jamais" être justifiées pour une majorité des personnels (49,2%).
Le surmenage, le défaut de formation, le fait de "perdre les pédales" sont évoqués pour expliquer ces conduites? (questions n°13 et 15).
Les surveillants et les infirmiers sont plus nombreux à ne pas les justifier (respectivement près de 90% et 65,5%).

Pour ces catégories, le rôle et la fonction soignante devraient leur permettre de dépasser la réaction purement humaine : La qualification, la réflexion clinique, l'expérience et l'éthique sont pour eux garants d'une distance thérapeutique apte à les protéger de toute tentation agressive. La capacité à se contenir et à maîtriser sa propre agressivité est perçue comme une des principales qualités requises pour se prévaloir du titre de soignant. Cette imprégnation de la fonction sur l'identité est particulièrement remarquable chez les para-médicaux.

Les réponses des personnels ASH sont plus nuancées ("jamais", à 33,33% et "parfois", à 22,22%), avec une forte proportion d'agents qui déclarent "ne pas savoir" (44,44%).
De même, les personnels administratifs semblent plus en difficulté pour se prononcer sur cette question (33,33% de "je ne sais pas"). La justification d'une conduite d'agression d'un membre du personnel envers un patient est, pour cette catégorie, "parfois" possible à 44,44%.
Les assistantes sociales constituent, sur cette question n°13, une catégorie à part, puisqu'une majorité d'entre elles estiment que ces conduites peuvent être justifiées (66,66%). L'agressivité "naturelle" de l'humain ne semble pas, pour elles, être soluble dans la fonction.

Il est intéressant de souligner que les conflits d'équipe constituent, pour les assistantes sociales et les surveillants (respectivement 75 et 66,66%), une cause fréquente des conduites d'agression de professionnels envers les patients.

Nous remarquons à nouveau à quel point les problèmes de coordination et de coopération interprofessionnelles pèsent sur le climat de travail et sur la qualité des relations entretenues avec les usagers. Ceci dit, les professionnels justifient plus aisément les conduites d'agressions de patients envers le personnel que l'inverse (72% contre 49, 2%), même si un facteur commun peut les expliquer (questions n°12 ; 13 et 25).

Les conduites d'agressions de personnel envers les patients se traduisent essentiellement par des attitudes de mépris, d'humiliations et d'abus de pouvoir, les réponses au questionnaire ne font jamais état d'agressions physiques (n°22).

Les seules situations où l'emploi de la force physique, par les personnels, est évoqué, sont celles dites de "légitime défense" et celles où elle est le seul moyen d'appliquer une consigne médicale, telle que la mise en isolement ou l'administration d'un traitement injectable. La légitime défense est définie par la nécessité de se protéger soi-même de coups ou d'en protéger autrui.
Il nous faut souligner que nous avons obtenu moins de 30 % de commentaires à la question n°20, qui cherchait à savoir si l'usage de la violence était, certaines fois, légitime en milieu hospitalier. Nous n'avions volontairement pas précisé pour cette question, de la violence de qui il s'agissait. A l'exception de trois personnes, les commentaires ont porté sur l'usage de la violence par les personnels.

Ces commentaires, qui se sont spontanément orientés vers la violence physique, ne concernent que les réponses positives, alors qu'elles sont minoritaires (à peine 25%, toutes catégories confondues). Dans leur majorité, ni les infirmiers, ni les surveillants, ni les assistantes sociales ne pensent que l'usage de la violence est légitime. Les personnels ASH et administratifs déclarent aux 2/3 "ne pas savoir".

Pour les para-médicaux, la répartition des réponses à la question n°20 est sensiblement la même qu'à la question n°13 qui portait sur les possibilités de justifier d'une conduite d'agression d'un membre du personnel vers un patient. Le recours à la violence, du personnel envers les patients, est reconnu mais réservé à des situations précises où le danger est réel et imminent. Hormis ces cas de "légitime défense", elles témoignent d'un dérapage sévèrement réprouvé, comme nous l'indiquent les réponses à la question n°25.

La majorité des commentaires inspirés par la phrase "Ce n'est pas par hasard que cela lui est arrivé à lui (à elle)", très souvent entendue après un passage à l'acte violent d'un patient sur un membre du personnel, désigne l'agent agressé comme effectivement responsable du passage à l'acte. Même si cette phrase évoque pour beaucoup un "accent de vérité", la tenue de tels propos n'est pas cautionnée.

Ainsi la victime provoquerait, par son attitude, son agression ("comportements pervers", "manque de respect de la personne soignée", "absence de savoir-faire relationnel").
Il est également question d'agents notoirement agressifs ou violents qui continuent à exercer auprès des patients. La hiérarchie para-médicale et médicale sont ici mises en cause ; en ne traitant pas de ces "cas", elles cautionnent par passivité, des attitudes déplacées et dangereuses pour tous.

Sur les trente neuf personnes qui commentent la question, dix perçoivent cette phrase comme le signe d'un dysfonctionnement grave de l'équipe.
Pour ceux-là, elle procède de la volonté de désigner un coupable, évitant toute remise en cause des autres membres ou de la prise en charge. Elles soulignent la nuisibilité d'une pensée simplificatrice qui cautionne le recours à la violence, la rend acceptable, voire qui l'incite.

Le passage à l'acte ne peut, dès lors, être réintroduit dans le collectif soignant.

C'est pourtant à cette condition que les personnels estiment pouvoir continuer à exercer leur fonction auprès du patient, après qu'il se soit montré violent (question n°11). Ils insistent sur la nécessité de se dégager du vécu douloureux lié au sentiment d'atteinte personnelle. Ils aspirent à trouver un sens au passage à l'acte, en "mettant des mots", en "restituant le geste dans l'histoire et la pathologie du patient", par le bais de synthèses cliniques.
Très peu conditionnent la poursuite des soins à une sanction disciplinaire ("privation de sorties du patient", "transfert de l'agresseur", "mutation de l'agressé"…) mais tous insistent sur l'incontournable "reprise médicale".

Les personnels administratifs attendent qu'à l'avenir, le patient qui s'est déjà montré violent soit accompagné de plusieurs infirmiers, ce que nous pouvons mettre en relation avec la question n°27. Ils estiment en effet que la gestion des comportements violents ne constitue pas une des fonctions de leur métier alors que, de façon quasi-unanime, les autres catégories interrogées l'intègrent dans leurs attributions professionnelles (à l'exception des agents hospitaliers, qui "ne savent pas", à 62,5%).

Pour autant, l'aptitude à enrayer un processus d'escalade de la violence ne dépendrait que partiellement d'un acquis professionnel (80% des réponses sans variations importantes d'une catégorie à l'autre, question n°26).
Ils estiment d'ailleurs y être 'insuffisamment" préparés au cours de leur formation initiale (et "pas du tout" pour 80% des administratifs).

Les dispositifs institutionnels en matière de "gestion de violence et de l'agressivité" bénéficient globalement d'une meilleure évaluation, puisqu'ils sont jugés "assez efficaces" par 64 % des infirmiers, 100% des ASH et des personnels administratifs et par 67% des assistantes sociales (question n°3).
Les actions de formation présentent pour eux un double intérêt. Les apports théoriques qu'elles contiennent leur permettent "d'enrichir leur réflexion", de "distinguer les différents types de violence", "de prendre conscience de leur propre violence". Ces connaissances ont un impact positif sur leur sentiment de sécurité au travail, en les aidant à "maîtriser leur peur".
Un autre niveau est celui de "l'échange d'expériences". Ces temps de formation sont l'occasion "d'exprimer l'angoisse et la peur" ressenties face aux situations de violence. Le partage de ces sentiments est manifestement déculpabilisant et vient répondre à un besoin non satisfait dans l'équipe.

La catégorie des surveillants se montre plus critique : 50% d'entre eux les trouvent "peu efficaces". Les personnels administratifs les imaginent "assez efficaces" et regrettent que ces actions de formation soient réservées aux personnels soignants.

Les personnes qui les qualifient de "peu" ou de "pas" efficaces leur reprochent d'être trop "éloignées du quotidien" et de "manquer de suivi". Ne "portant pas sur le collectif et l'institutionnel", elles n'ont que "peu de retombées sur le terrain".
Même si elles apportent un certain "confort" personnel, elles auraient une faible incidence sur les pratiques professionnelles. Elles présentent même le désavantage de reproduire les cloisonnements déplorés au sein des équipes, notamment entre les corps infirmier et médical.

Ces actions, qui s'inscrivent pourtant dans les priorités institutionnelles, sont perçues comme strictement personnelles. Les para-médicaux regrettent que les sessions ne réunissent pas l'ensemble des professionnels intégrés à l'équipe de soins.
A l'extrême, ces formations renforcent le sentiment que la violence est l'affaire des seuls personnels infirmiers.

Par ailleurs, il nous est rappelé que le développement de ce type d'initiatives ne doit pas se substituer à des dotations en personnel.

En ce qui concerne les activités proposées au service des sports (yoga et self-défense), quelques agents regrettent qu'elles ne soient pas intégrées au temps de travail, considérant ainsi qu'elles constituent des outils professionnels à part entière.

En matière de prévention des conduites violentes, les personnels font davantage confiance à leur sens de la médiation, à leur connaissance du patient et à leur expérience, qu'aux connaissances théoriques. Nous avons retenu les items de la question n°24 qui ont été sélectionnés par plus de 50% des agents, dans chaque catégorie (question n°24).

Les passages à l'acte violents étant le plus souvent "prévisibles" (question n°21), la présence effective auprès du patient, l'écoute et l'échange constituent indiscutablement des outils de prévention efficaces pour les personnels paramédicaux et sociaux.
Les personnels administratifs, non formés à la relation thérapeutique, se fient plus volontiers à leur capacité à improviser et à la possibilité d'alerter des renforts.

Il est intéressant de noter que les assistantes sociales accordent un plus grand crédit au diagnostic infirmier et au protocole médical, que les infirmiers et surveillants relèguent en dernier choix, en matière de prévention.

Nous avons relevé plus haut un certain vécu d'abandonnisme chez les para-médicaux concernant le maintien d'un cadre de soins cohérent et la prévention des incidents violents. On retrouve ce sentiment dans l'après-coup de la violence (n°28).

Concernant le traitement de ces incidents par le médecin du patient, il est qualifié "d'insatisfaisant" pour la majorité des personnes interrogées (100% des assistantes sociales, 89% des administratifs, 86% des surveillants et 48 % des infirmiers).
Il en est de même en ce qui concerne l'attitude de l'équipe de direction. Les personnels ASH, administratifs et les assistantes sociales se déclarent également insatisfaits du médecin du travail en la matière.

Le choc provoqué par une confrontation directe à de la violence destructrice ne reçoit pas de traitement à la hauteur du préjudice subi.
La faiblesse de la reprise de l'incident violent au sein de l'équipe et le caractère administratif de la réponse institutionnelle imprègnent les victimes, ou leur entourage professionnel immédiat, d'un sentiment d'isolement et très souvent, de culpabilité.

II. "On dit d'un fleuve qu'il est violent parce qu'il emporte tout sur son passage, mais nul ne taxe de violence les rives qui l'enserrent" .

La deuxième partie de la question n°28 proposait aux personnes interrogées de s'exprimer sur ce qu'ils aimeraient voir changer. Les thèmes principaux concernent des besoins en terme de reconnaissance et de considération, d'engagement collectif, d'élaboration clinique et d'espace de parole.

En définitive, à travers cette enquête, ce qui nous apparaît comme la problématique principale à propos de la violence à l'hôpital, c'est ce qui la précède et ce qui lui fait suite.

Les professionnels font régulièrement usage de la force, quand il s'agit d'hospitaliser un individu malgré lui, de le contenir physiquement ou de lui administrer un traitement sédatif auquel il s'oppose. Contenir un état d'agitation, une angoisse paroxystique de morcellement, protéger un individu de sa propre violence ou en protéger autrui, sont des fonctions que les personnels soignants intègrent à leurs attributions. Pour autant, ce rôle est difficile à assumer, parce qu'il est acte de violence. Cette violence qui s'exerce sur les patients est à la fois physique et psychologique. En nature, rien ne la distingue d'une voie de fait, voire d'une séquestration.

C'est l'ambition thérapeutique qui va conditionner la légitimité de cette violence. Par ambition thérapeutique, nous entendons la mise en sens de la réponse soignante, réalisée à partir d'une évaluation clinique de la situation.
Le retour au calme ne peut seul justifier de l'indication. Qu'en est-il de l'intérêt du patient ? La neutralisation de ses symptômes, par le biais de la chimie ou de la contention physique, peut-elle être l'objectif de l'équipe para-médicale ?
L'ambition thérapeutique doit-elle s'identifier en tous points à la demande de la société qui réclame la mise à distance du malade mental, notamment de celui qui exprime sa souffrance de façon bruyante et désordonnée ?

Les témoignages nous interpellent sur l'absence, ou l'insuffisance du cadre et de la référence médicale. La cohésion des équipes est comme fissurée, elle ne fait plus rempart contre la violence. Les temps d'élaboration, de régulation et d'échanges se sont dissous, rendant de plus en plus flou le projet institutionnel.
L'hôpital semble déserté de l'intérieur, inhabité d'une pensée soignante qui opérerait comme un mythe dynamique. Aujourd'hui, c'est le manque de dialogue qui le caractérise.

Dans la mesure où les personnels exerçant en extra-hospitalier ne se plaignent pas du même "symptôme" institutionnel, on peut de se demander si le projet et l'idéologie soignante n'ont pas migré, avec l'activité, vers les structures alternatives.
Dans celles-ci, affranchies des hospitalisations et des soins sous contrainte, le travail d'élaboration clinique est plus perceptible. Les indications y sont davantage discutées et les décisions thérapeutiques assumées collectivement.

Les propos recueillis auprès des personnels de l'intra-hospitalier révèlent un véritable malaise et une insécurité dans l'accomplissement de leur fonction soignante. On repère, en particulier dans les réponses des infirmiers, un décalage entre un idéal thérapeutique, fondé sur l'écoute et l'alliance thérapeutique, et la réalité de leur pratique au sein de l'hôpital. Les objectifs annoncés et la réalité institutionnelle ne sont pas en cohérence, ils peuvent même, certaines fois, s'opposer totalement.

Les hospitaliers ont assisté, ces vingt dernières années, à la perte du modèle coercitif. Plus récemment, il semble que les approches institutionnelles aient été négligées, voire abandonnées. Les effets structurants et régulateurs qu'elles permettaient, sur le fonctionnement interne des services, n'opèrent plus.

Dans un hôpital qui se veut à dominante soignante, le maintien de l'ordre a pu apparaître superflu. Les actions relatives au maintien de l'ordre sont, dans les esprits, devenues archaïques et disqualifiantes, s'opposant à la thérapeutique médicale et aux soins infirmiers. L'approche de la maladie mentale se veut plus scientifique et de nouveaux outils professionnels sont apparus sur le marché professionnel. On peut se demander si protocoles, diagnostics et autres démarches de soins ne renforcent pas le cloisonnement dont souffre l'institution, en occultant l'aspect collectif de la production soignante.

L'absence de repères dont il est fait état, l'analyse des contenus nous l'a révélé, constitue une brèche dans laquelle personnels et patients risquent de s'abîmer.
La désorganisation ouvre la porte à toutes sortes de dysfonctionnements, allant de la "simple" incohérence de prise en charge aux "dérapages" agressifs du personnel et aux manifestations violentes des usagers.

Le sens des soins hospitaliers, qui échappe aux personnels, échappe également aux patients à qui ils s'adressent.
Si le projet apparaît flou aux yeux de ceux qui le mettent en œuvre, il peut apparaître totalement imperceptible aux yeux de ceux qui sont supposés en bénéficier. Dans ce cadre mal défini, les patients peuvent se sentir soumis à l'arbitraire du pouvoir soignant. Les conduites d'opposition, voire de résistance active peuvent s'entendre comme une tentative d'affirmation de soi, comme un acte de liberté.

CONCLUSION

Si nous avons en premier lieu constaté que les problèmes de gestion de la violence envahissaient les esprits et les pratiques à l'hôpital Sirocco, nous avons ensuite cherché à déterminer le sens que les personnels donnaient à cette préoccupation croissante.

La problématique qui a servi de point de départ à notre travail peut se formuler ainsi : "L'hôpital psychiatrique Sirocco est aujourd'hui en difficulté dans l'exercice de sa fonction de régulation des comportements violents".
Cette difficulté ne s'observe pas exclusivement dans le champ psychiatrique. Elle est partagée par de nombreuses autres institutions publiques prestataires de services. De l'éducation nationale à la police, les institutions contemporaines semblent submergées par les phénomènes de violence.

Nous n'avons pas été en mesure d'apprécier si le public accueilli aujourd'hui à l'hôpital est plus violent qu'il ne l'était il y a quelques années. Ce diagnostic reposerait sur une étude comparative des profils psychopathologiques et de leur degré de dangerosité. Nous n'avons pas eu connaissance de tels travaux et n'avons donc pu mettre en rapport la sensibilité actuelle au phénomène avec son augmentation effective.

En revanche, les accidents du travail liés à "une interaction violente avec un patient" sont en augmentation à l'hôpital Sirocco, comme dans d'autres établissements. C'est donc à cette interaction que nous nous sommes intéressés.
Si l'émergence de la violence est le produit de mécanismes internes et d'événements externes, l'hôpital psychiatrique est assurément un milieu à risque. La violence de la désorganisation psychique et celle des traitements constituent des ingrédients potentiellement explosifs. Le fait que l'institution soit aujourd'hui débordée par la violence questionne sur sa capacité à se poser comme un tiers médiateur.

C'est pourquoi nous avons formulé l'hypothèse qu'une partie du problème résulterait d'une certaine dérégulation du fonctionnement et des valeurs de l'institution. Cette hypothèse s'inscrit dans un registre "socio-organisationnel", que les modèles de représentation exposés en première partie peuvent éclairer.

La recherche que nous avons menée a rapidement fait apparaître que la violence, dans le contexte de l'institution psychiatrique, concernait violence des patients, contre-agressivité soignante et violence institutionnelle. L'approche historique proposée en deuxième partie nous a montré la ténacité de ces liens.

Le questionnaire nous a permis de vérifier notre hypothèse de départ. Les personnels interrogés perçoivent une désagrégation du cadre institutionnel qui explique en partie les difficultés à contenir la violence.

Il nous invite également à nous interroger sur le poids des morbidités. La précarité sociale des usagers de l'hôpital Sirocco est telle qu'elle masque parfois le tableau clinique. La place de certains patients à l'hôpital est aujourd'hui remise en cause. On sait empiriquement que le rejet et l'exclusion bourgeonnent avec la violence.
Si les structures pathologiques sont inchangées, les expressions symptomatologiques se modifient, mettant ainsi à mal les "savoir-faire" anciens. La fureur clastique du malade psychotique est par exemple mieux tolérée que les manifestations comportementales des personnes alcooliques et toxicomanes.

Les équipes ont le sentiment d'être conduites à traiter d'une souffrance à laquelle elles ne veulent ou ne savent pas répondre.

La question est de savoir si la discipline psychiatrique doit aujourd'hui élaborer une nouvelle clinique qui lui permette d'appréhender ce qu'on nomme "la souffrance psycho-sociale". A moins qu'il n'appartienne à la société dans son ensemble, de réfléchir à d'autres réponses et à d'autres modalités de prise en charge des exclusions

Nelly Derabours




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