Carnet de mission
Naplouse, Palestine

février - août 2004

Pyschiatrie hors des murs

La consultation mobile de psychiatrie vers les villages passe donc par la formation des équipes des dispensaires. Cette idée de faire sortir la psychiatrie des murs de la consultation débordée de Naplouse se retrouve dans l'idée d'une équipe de psychiatrie de liaison.
Il y a deux hôpitaux généraux à Naplouse. Le premier reçoit les cas médicaux, a une unité spécialisée dans le traitement de la thalassémie (maladie sanguine héréditaire très répandue en Palestine). Cet hôpital aurait bien besoin d'une seconde jeunesse tant dans la salubrité des locaux que dans l'équipement. Le second est l'hôpital chirurgical, plus récent et plus avenant, il dispose également d'un service de néonatalogie pour grand prématurés et d'un service de grands brûlés (le seul de la West Bank).
Dans ce dernier hôpital, trois psychiatres interviennent. Ils ont quatre lits de psychiatrie. Chouette penseront certains, là-bas au moins, on ne sépare pas soins généraux et psychiatrie. Le petit hic c'est que ces quatre lits ne sont occupés que le jeudi … pour des séances d'électrochocs, remède miracle comme chacun sait à toute sortes de maladie psychiatriques.
Pendant ce temps, une femme grièvement brûlée fait une tentative de suicide à sa sortie car personne n 'a saisit son total désespoir, des enfants refusent de s'alimenter parce que leurs parents ne peuvent les accompagner à l'hôpital à cause des check-points, etc…
L'idée est donc de proposer qu'une équipe, un psychologue et une ou deux infirmières soient disponibles pour rencontrer les patients durant leur hospitalisation, aider les infirmière et les médecins à comprendre leurs difficultés psychiques, faire intervenir un psychiatre lorsque cela est nécessaire, et s'assurer qu'un suivi est mit en place à la sortie si besoin.
Ce projet prend un peu de retard car quelques enjeux de pouvoir (comme ailleurs) viennent se mêler au jeu. Mais pendant ce temps la mise en place de la consultation mobile avance, et la même équipe sera prête pour finalement faire auprès des hôpitaux généraux la même chose que dans les villages.
Après Six séances de formation et d'études de cas, les équipes des dispensaires ont demandé de l'aide pour rencontrer les premiers patients identifiés. Là, comme je m'y attendais un peu, ils s'agit de rencontrer les patients bien connus, ayant depuis vingt ans rencontré médecins en tout genre, religieux, psychologues et testé toutes sortes de potions et médications. Qu'importe, il s'agit avant tout de comprendre ce qu'est la rencontre de l'autre, ce qu'écouter veut dire.

Retour au moyen âge
C'est un peu en marge de ce travail, que je suis sollicité par une autre ONG qui voudrait une aide pour une femme qu'ils ont rencontrée lors d'une évaluation sociaux économique des villages situés dans des enclaves du mur de protection, c'est à dire totalement isolés et encerclés par des colonies près de Qalqylia.
Faute d'avoir pu trouver un psychologue ou un psychiatre qui accepte ou qui puisse se déplacer pour faire une évaluation, je me suis rendu dans ce village très pauvre pour y découvrir le moyen âge la psychiatrie.
A côté d'une maison de deux pièces abritant une femme et ses huit enfants, une baraque de tôle et de planche abritant trois ou quatre chèvres. En faisant le tour de la baraque, une poste de planche fermée par un bidon, à l'intérieur, dans un espace de deux mètres sur un mètre soixante servant de débarras aux outils, une femme de vingt quatre ans.

Lorsque l'ONG qui nous l'avait signalée l'avait rencontrée, elle vivait dans la même insalubrité dans une pièce noire de la maison, mais depuis un fils s'est marié et il a fallu la déménager. Le chef du village m'explique qu'ils ont voulu construire un abri en parpaing, mais aussitôt des hommes de la colonie voisine sont descendu leur interdire de construire quoi que ce soit sous peine de le détruire. (en haut à gauche de l'image, on aperçoit des construction de la colonie à quelques centaines de mètres, il y a la même sur la droite, et derrière, la barrière électronique protégeant des intrus les terres annexées de la Palestine qui viennent arrondir les frontières de l'état d'Israël. C'est ce que l'on appelle une enclave. (voir carte Naplouse-Salfit)
Samar est donc le résultat de multiples facteurs. Un contexte de colonisation et de haine de l'autre qui empêche toute évolution, toute initiative, une méconnaissance des maladies psy et de ses possibilités de prise en charge, un état de siège de nombreux villages qui empêche de se déplacer visiter un spécialiste, une honte pour la famille d'avoir quelqu'un dans cet état là reposant sur des croyances populaires.
Que faire devant un tel tableau. Malgré ce que m'en a dit la famille et les gens du village présent, Samar est très réceptive à mes sollicitations. Elle me sert la main sans problème, s'assoit à côté de moi pendant que je discute avec sa belle mère, accepte de me donner l'un des bouts de plastique qu'elle sert contre elle, remets le bouchon sur son bidon d'eau quand je lui demande, m'accompagne visiter son taudis.

Que va devenir Samar ? Pour le moment je dois visiter des centres à Bethlehem qui accueillent des adultes, peut être une place se libérera-t-elle un jour pour Samar. Dans ce cas ce sera un placement définitif car sa famille aura toutes les peines du monde à obtenir les autorisations pour se rendre via les territoires palestiniens en contournant toutes les zones séparées par la barrière ou le mur pour lui rendre visite.

Des projets israëlo-palestiniens. Vous connaissez un peu le contexte, vous savez toutes les polémiques que déclenchent les moindres prises de position sur ce conflit sans fin. De loin on imagine deux peuples se haïssant, incapables de se parler autrement que par les armes.
Et pourtant, sur le terrain il en est souvent autrement. Lors de mon dernier break (chaque expatrié s'arrête une semaine tous les trois mois de mission, histoire de recharger les batteries) j'ai passé trois jours dans un village en Israël. Ce village s'appelle Nevé Shalom - Wahat as-Salam, ce qui signifie en Hébreux et en Arabe " Oasis de Paix " un village établi conjointement par des Juifs et des Arabes palestiniens, tous citoyens d'Israël. Les membres du village sont occupés dans le travail éducatif pour la paix, l'égalité et la compréhension entre les deux peuples
Je mentionne ce village pour vous parler d'un autre projet. Des échanges voire une collaboration entre médecins et psychologues israéliens et palestiniens dont nous reparlerons, Médecins du Monde étant le " lien " qui devrait permettre les premières rencontres. Il y a toujours un peu d'espoir quelque part.
Et comme tout cela prend du temps, ma mission se prolonge d'un mois…. Jusque fin septembre. Des projets israëlo-palestiniens.
Vous connaissez un peu le contexte, vous savez toutes les polémiques que déclenchent les moindres prises de position sur ce conflit sans fin. De loin on imagine deux peuples se haïssant, incapables de se parler autrement que par les armes.
Et pourtant, sur le terrain il en est souvent autrement. Lors de mon dernier break (chaque expatrié s'arrête une semaine tous les trois mois de mission, histoire de recharger les batteries) j'ai passé trois jours dans un village en Israël. Ce village s'appelle Nevé Shalom - Wahat as-Salam,(voir le site) ce qui signifie en Hébreux et en Arabe " Oasis de Paix " un village établi conjointement par des Juifs et des Arabes palestiniens, tous citoyens d'Israël.


maison du silence - Nevé Shalom ~ Wahat as-Salam

Les membres du village sont occupés dans le travail éducatif pour la paix, l'égalité et la compréhension entre les deux peuples

Je mentionne ce village pour vous parler d'un autre projet. Des échanges voire une collaboration entre médecins et psychologues israéliens et palestiniens dont nous reparlerons, Médecins du Monde étant le " lien " qui devrait permettre les premières rencontres. Il y a toujours un peu d'espoir quelque part.
Et comme tout cela prend du temps, ma mission se prolonge d'un mois…. Jusque fin septembre.

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