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Lire "Besoin d'hommes" de Dominique Friard

En écho à Besoin d'hommes

Du 94 (Val de Marne) au 31 (Haute Garonne), 600 km et pas l'espace d'une feuille de papier à cigarette entre deux vécus professionnels. Le quotidien condensé de Dominique du CHS Marquis de Sade est à l'anecdote prés celui d'un ISP du CHS CHARMANT. Et pour rencontrer fréquemment des dizaines d'ISP d'horizons différents je sais que ce quotidien devient la norme.

Que reste t'il de la pratique soignante quand l'infirmier n'est plus que le membre(!) d'un pool XY. Une des dernières inventions de nos têtes d'œufs depuis le protocole Aubry. Créer dans les hostos psy des pools de mâles pour assurer renforts, transferts etc.. ça a fait un sacré tollé dans les instances. Déjà qu'il y a les emplois jeunes à la sécurité "polyvalente".

Aux dernières nouvelles ce projet serait abandonné (en sommeil) au profit d'une unité de soins intensifs temporaires. Alors même que les UMD régionales n'ont pas encore vues le jour, nous nous apprêtons déjà à créer un deuxième niveau de contention institutionnelle! (Il faut dire que nos médecins sont tellement mécontents de s'être fait souffler l'UMD régionale que la CME a fini par céder à l'option sécuritaire.)
Et comment leur en vouloir, c'est pour notre bien! A ce que l'on dit.

Je n'en veut à personne, sauf à moi peut être. Sauf à moi si je m'ose à certaines questions. Combien de situations de crise aurait pu être traitées en amont?

combien d'autres sont liées à l'épuisement d'une unité de soins?

combien sont, pudiquement exprimé, iatrogènes?

Combien en resterai t'il vraiment de ces situations de soins extrêmes qui pourraient présenter un danger outrepassant les moyens d'un secteur correctement doté si tous les secteurs étaient correctement dotés?. Sûrement pas de quoi remplir 16 lits locaux après saturation d'une UMD fraîchement ouverte.

Pourtant si rien ne change, l'unité de soins intensif temporaire verra le jour, elle sera aussi vite saturée que le sont actuellement les chambres d'isolement de Charmant, les chambres d'isolements le seront à leur tour et.. jusqu'à quand tout cela va t'il continuer.

J'ai vécu la désaliènisation tardive de cet hôpital, devrais je être aussi témoin du retour du carcéral.

Pour combien d'entres nous, sans distinction entre XX et XY cette fois ci, le quotidien est l'illustration du décrochage progressif de la fonction soignante vers une pratique qui pourrait très vite devenir moralement détestable. Une situation est moralement détestable quand on connaît des façons d'y remédier, qu'on estime ces moyens raisonnables, que cette situation est génératrice de souffrance multiples, et que l'on est soi même à de multiples titres acteur du phénomène.

Quand on sait que chacun est persuadé que la situation empire rapidement, qu'elle nécessite bien sur "de faire quelque chose", et que chacun de son côté attend, attend, s'exprime là où il peut et attend. Attend le moment où ce sera le moment de bouger, parce que le pourquoi et le comment auront enfin été réglés. Bon j'exagère, il y en a, et j'en suis, qui s'évertuent à essayer de remplir les pourquoi pour faire des comment, mais cela fonctionne de façon très dispersée.

Et pendant ce temps la dégringolade du secteur de psychiatrie publique suit son cours et on bricole et on attend, on tient, mais jusqu'à quand. Jusqu'à quand…la prochaine révolte!

Jean Vignes


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