Troisiè Duré Historique Dans la Fé
Dans le cadre de la campagne Russie, lancée depuis octobre 2002, voici une action visant à faire respecter les droits des enfants mentalement handicapés dans la Fédération de Russie. Cette action sera aussi menée par les relais-enfants et parallèlement, dans une version plus élaborée, elle constitue un volet de la campagne Russie et est à ce titre menée par les groupes Russie.
Il existe 155 internats (orphelinats d’État) dans la Fédération de Russie, qui accueillent environ 29  On compte aussi 19  de moins de quatre ans qui vivent dans des maisons d’enfants. Un nombre important de ces enfants souffrent de divers handicaps dont la trisomie 21, l'autisme, l'épilepsie et de paralysie d’origine cérébrale.
Il est recommandé aux parents d’enfants nés avec un handicap mental de confier leur enfant à l’État, à sa naissance. S’ils donnent leur accord, ils signent un document par lequel ils renoncent à tous leurs droits juridiques en tant que parents. Cette procédure est en particulier appliquée dans les cas de naissances d’enfants atteints de trisomie 21. Lorsque l’enfant est plus âgé, cette même procédure peut être proposée dans des cas d’infirmités motrices cérébrales ou d’autisme présumé.
À l’âge de quatre ans, les enfants souffrant de handicap mental sont à nouveau examinés. C’est à ce moment qu’ils sont pour la plupart déclarés «  inaptes à toute éducation  ». Nombre d’entre eux resteront dans des institutions d’État toute leur vie, car cette décision n’est pas soumise à révision.
Les enfants souffrant de handicap mental qui vivent dans les internats sont souvent hébergés dans des conditions cruelles ou dégradantes. Nombre d’entre eux gardent le lit en permanence et la plupart ont peu d’occasions de jouer. Aucun effort n’est fait pour encourager leur développement, car ils sont considérés comme «irrécupérables».
Les parents ne disposent d’aucune source d’information indépendante, susceptible d'interpréter différemment l’avis médical qui leur est donné. Il n’existe en outre quasiment aucun service d’aide aux parents qui souhaiteraient élever chez eux un enfant atteint d’un handicap mental. Le placement dans une institution d'État apparaît donc, dans la majorité des cas, comme la seule solution possible.
Amnesty International considère qu’un tel traitement montre un total manque de respect pour les droits des enfants souffrant de handicap mental.
Les foyers pour enfants et les internats
Les institutions où sont placés les enfants handicapés mentaux classés «inaptes à toute éducation» sont connus sous le noms de DDI, d’après les initiales russes de Detskie doma i internaty (foyers et internats pour enfants.) Les foyers pour enfants sont gérés par le ministère de la Santé. Ils accueillent les très jeunes enfants, de la naissance à l’âge de quatre ans. Les internats sont administrés par le Ministère du Travail et du Développement Social pour les enfants âgés de cinq à dix-sept ans. Il y a en moyenne deux internats dans chacune des 89 régions de la Fédération, et sept dans la région de Moscou, très peuplée. A l’âge de dix-huit ans, les personnes atteintes d’un handicap mental sont placées dans des maisons de santé neuro-psychiatriques sous la tutelle du ministère du Travail et du développement social. Amnesty International ignore la raison pour laquelle à partir de cinq ans les enfants passent de la tutelle du ministère de la Santé à celle du ministère du Travail et du Développement social. Aucun rôle n’est prévu pour le ministère de l'Éducation.
Reclus à vie...
Les conditions de vie dans les DDI sont contrôlées par le parquet, dont le rôle est de s’assurer que la loi est respectée dans les institutions. Des fonctionnaires du Centre d'État pour l’inspection sanitaire et épidémiologique contrôlent également les normes d’hygiène dans les DDI. Cependant, rien n’est prévu pour étudier de manière régulière et détaillée le cas de chaque enfant, dans le but d’une éventuelle libération, ni d’évaluer les soins, le traitement et l’éducation que reçoivent les enfants. À l'Internat Z, une seule psychologue s’occupe de 205 enfants. Elle a déclaré que les enfants faisaient l’objet d’un examen à l’âge de dix-huit ans avant que la commission ne décide de les placer.
Les directives ministérielles relatives au placement en DDI des enfants atteints de handicap mental déterminent aussi les conditions d’accueil. Dans les foyers pour enfants, deux membres du personnel infirmier s’occupent, à tour de rôle, de 100 enfants. Ils sont de garde vingt-quatre heures chacun ; une personne supplémentaire s’occupe de 50 enfants alités. Dans les internats pour enfants âgés de cinq à dix-huit ans, le personnel est encore moins nombreux, avec un médecin pour 250 enfants. Le personnel soignant de l'Internat Z a déclaré à Amnesty International être payé 1000 roubles par mois, soit environ 30 euros. La directive de 1979, section IV, précise qu’aucun effort ne doit être fait pour éduquer ou former des enfants «irrécupérables». Le fait que leur état soit considéré comme «espoir  » conditionne la façon dont ils traités et l’absence de traitement spécifique.
...et privés de droits
Comme les enfants atteints de handicap mental sont considérés comme des cas sans espoir dans la Fédération de Russie, ils sont automatiquement privés de leurs droits fondamentaux. Contrairement à d’autres personnes placées dans des institutions, ces enfants sont enfermés uniquement en raison de leur handicap, et non parce qu’ils constituent une menace pour eux-mêmes ou pour les autres, ou parce que leurs parents ne sont pas capables de les élever. Ils sont condamnés à une vie dénuée de sens, et contrairement aux prisonniers, ils n’ont aucune possibilité d’obtenir la révision de leur placement.
Amnesty International exprime des doutes concernant la légalité de la procédure utilisée pour placer ces enfants en institution, car elle viole de nombreuses normes internationales. L’organisation est notamment préoccupée par le fait que la décision de placer ces enfants en institution soit prise sans aucune référence à une loi votée par le parlement, et sans que les intérêts de l’enfant soient défendus par une personne compétente. Les enfants qui se trouvent dans cette situation n’ont aucun moyen légal de la faire changer.
Le Comité des droits de l’enfant des Nations unies a également exprimé des recommandations à la Fédération de Russie, après avoir étudié en 1993 et 1999 ses deux rapports périodiques sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant. En 1993, «  il a reconnu que certaines attitudes du passé entravaient la mise en vigueur de la Convention relative aux droits de l'enfant ; il s'agissait, entre autres, de l'institutionnalisation de la protection de l'enfance, des handicapés et des responsabilités familiales». Le Comité a insisté auprès de la Fédération pour que soit mis en place un comité d'Etat chargé de coordonner et de contrôler l'application de la Convention.
En 1999, le Comité s’est dit vivement préoccupé par le nombre extrêmement élevé d’enfants placés dans des institutions et par leurs conditions de vie. Il a recommandé que les autorités adoptent une procédure adéquate qui permette d’assurer l’examen périodique de tous les types de placement. Il a demandé en outre aux autorités russes de procéder à une réforme du système de placement, notamment «en renforçant le rôle et les pouvoirs des mécanismes d’inspection indépendants, qui auraient le droit d’effectuer des visites sans préavis». Le Comité a exprimé également ses préoccupations concernant «la situation critique des enfants handicapés mentaux et de tous ceux qui vivent en institution, en particulier le système en vigueur pour établir les diagnostics et déterminer les pratiques et les conditions de vie imposées aux enfants handicapés en institution». La Fédération de Russie devait soumettre son troisième rapport périodique au Comité en 2002. Dans la version préliminaire de ce rapport, dont Amnesty International a pu prendre connaissance, la Fédération de Russie déclare avoir créé un Comité de coordination intersectoriel pour les droits de l’enfant, et affirme avoir amélioré le contrôle des institutions grâce à la nomination de commissaires aux droits de l’enfant (médiateurs) dans 15 régions de la Fédération, y compris la République tchétchène. Amnesty International n’a pu consulter aucun des rapports publiés par ces médiateurs. Le projet de rapport du gouvernement n’aborde pas la question de la révision systématique des décisions de placement, comme le Comité le recommandait.
Roman Demenshtein, Centre de pé
dagogie thérapeutique de Moscou.Pré
occupations d’Amnesty InternationalL’organisation estime qu’au strict minimum, la Fédération de Russie doit adopter une loi visant à défendre les intérêts des enfants handicapés mentaux, en définissant une procédure et des critères pour placer un enfant en institution et pour en retirer la garde à ses parents. Les intérêts de l’enfant devraient être représentés par un expert indépendant chargé de comprendre le point de vue de l’enfant et si possible de le formuler et d’intervenir dans son intérêt. Un tribunal indépendant et impartial devrait procéder à une révision approfondie de toutes les décisions de placement.
Un tel texte de loi doit garantir que la décision de placement sera régulièrement soumise à une révision systématique. Dans le cas où la poursuite de la vie en institution apparaîtrait comme étant dans l’intérêt de l’enfant, la loi devrait définir les conditions nécessaires au bien-être de l’enfant. Ce texte de loi devrait être rédigé en collaboration avec des experts qualifiés, des parents d’enfants handicapés mentaux, et des ONG travaillant dans le domaine du handicap mental.