Défendre le Secteur…
"L'avenir de la psychiatrie ne devrait pas être moins de Secteur, mais davantage de Secteur".
Cette phrase de A. Lopez Directeur de DRASS et l'invitation de la rédaction de l'Information Psychiatrique à répondre ( Information Psychiatrique No3- Mars 1999-p.285-288) , suite à la publication de son article , nous ont poussé à réagir.
Certes il n'y a pas que le secteur qui soit "menacé de dislocation, d'absorption par le secteur sanitaire" (A. Lopez) c'est la pratique psychiatrique dans son ensemble qui est menacée par la réduction des moyens institutionnels, la réduction démographique de la spécialité (30 % en 15 ans), le refus des évolutions statutaires et les mesures envisagées vis à vis de la pratique privée…
Les prises de positions de corps professionnel commencent à se manifester, mais nous constatons que nous sommes tous anesthésiés, "sidérés" par cet incompréhension des pouvoirs publics.
Le temps nous manque aussi pour suivre de près l'évolution de la profession et de la discipline. Dans nos services le quotidien est déjà assez lourd pour nous occuper largement.
Je voudrai ici expliquer mon attachement à cette pratique de psychiatrie publique que l'on décrit comme menacée.
Je suis "pour le secteur" mais je crois aussi qu'il faut avancer plus avant.
La politique de sectorisation comme élément fondateur de la continuité des soins dans la pratique de secteur est repérée souvent par nos interlocuteurs étrangers comme force du système français. Il existe bien un " modèle " français autour du modèle sectoriel envié par la plupart de nos collègues étrangers.
La politique de sectorisation qui doit rester l'élément central de notre organisation des soins en Santé Mentale ne doit pas rester pour autant " figée et sacralisée " comme l'exprimait certains experts étrangers lors des 1ères journées de Réhabilitation Psycho-sociale en France (Angers 3-4 Décembre 1998). Elle doit s'enrichir d'un partenariat incluant les usagers, les familles, les acteurs sociaux, les décideurs et les professionnels en Santé Mentale.
La pratique des équipes de soins est insuffisamment connue, insuffisamment partagée avec les interlocuteurs de la communauté de vie. Près de 40 ans après la circulaire du Secteur il est anormal que la psychiatrie de secteur soit représentée encore trop souvent pour le public par l'image de l'hôpital. Il faut que nos analysions et développions davantage les ressources communautaires développés dans le cadre de la sectorisation où à côté. Comme le rappelle encore récemment une communication de l'UNAFAM concernant les SROSS ( à l'attention des directeur d'Agence Régionale de la Santé) , le nombre de patients le plus important se trouve dans la cité.
Le nombre de malades présentant des troubles psychopathologiques non seulement ne diminue pas mais progresse. La nature de nos interventions tend aussi à se diversifier très largement au delà des cadres sanitaires vis à vis de populations désinsérées ,marginalisées ou auprès d’institutions médico-sociales.
Les structures intersectorielles qui se mettent en place, répondant aux besoins de populations particulières, peuvent aussi apparaître complémentaires de l'activité sectorielle pour des prises en charges spécifiques. De la même manière la nature intrinsèquement intersectorielle voire interdépartementale de l'intervention psychiatrique à l'hôpital général nécessite une articulation avec les dispositifs psychiatriques de secteurs que les intervenants psychiatriques à l'hôpital général connaissent bien .Pour paraphraser A. Lopez, la psychiatrie publique peut trouver sa "colonne vertébrale dans son attachement profond à des principes" (p. 287) que nous retiendrons dans la pratique de secteur :
C'est vrai comme l'affirme Lopez que la "fluidité" indispensable dans nos dispositifs sectoriels, ces "espaces à géométrie" variable qu'il évoque (p. 288) doivent pouvoir s'accompagner d'un "armature de relations" bien définie entre les équipes soignantes et les autres intervenants de la cité , de manière à assurer la continuité du projet de soin pour les malades ainsi pris en charges.
Vaste chantier pour le 3ème millénaire dont les équipes doivent se saisir afin de construire une psychiatrie communautaire et citoyenne , qui puisse accueillir et soigner tous les patients .
Dr. P. BANTMAN
Psychiatre des hôpitaux
C.H. ESQUIROL
Saint-Maurice 94413
à lire la réaction de Jean-Luc VURPAS Praticien Hospitalier à Uzès.