12° congrès de l’association «
ANCRE - PSY »Secrets partagés !
Qu'y avait-il dans la tête des organisateurs pour proposer ce pléonasme en titre d'une table ronde.
Secret partagé. Un secret ce n'est pas ce que l'on ne dit pas, c'est ce que l'on ne dit pas à tout le monde.
En effet, vous ne savez pas si je porte ou non des chaussettes la nuit quand je dors. Si je dors tout seul, je suis le seul à le savoir. Ce n'est pas un secret, je porte ou je ne porte pas de chaussettes quand je dors, c'est un fait que je suis seul à savoir. Quand il m'est arrivé de ne de plus dormir seul, j'ai fais promettre à celle qui allait partager mon lit (entre autre) de ne pas révéler si je portais des chaussettes en dormant. C'est comme ça, je trouvais tout d'un coup qu'il s'agissait d'un détail tellement intime que quelqu'un d'autre le sache ne pouvait se faire qu'en échange de la discrétion absolue. Et voilà que nous partagions un secret. Ce n'était plus un simple fait, c'était un secret entre elle et moi que je lui demandais de ne pas révéler.
Donc le secret n'existerait qu'à partir du moment où il est partagé… sous le sceau du secret j'entends.
Pléonasme vous dis-je que "secret partagé".
Mais qu'est ce qui autorise ou non le détenteur d'un secret à le partager ? Quel nom prend le secret quand il est connu par un certain nombre ? Quelle part de celui qui avait un secret est alors livrée aux autres détenteurs ?
Nous en avons parlé aux différentes équipes avec qui nous travaillons. Que ce soit à l'hôpital de jour ou dans l'unité d'hospitalisation, à l'évocation de "secret partagé", chacun nous conseillait d'aller voir du côté de l'histoire de René. En effet, nous avons beau retourner les événements dans tous les sens, nous ne comprenons pas comment nous en sommes là lui et nous alors que tout nous faisait penser qu'il trouvait enfin sa place dans la prise en charge élaborée avec lui.
Des échanges avec les psychiatres, l'ergothérapeute, l'assistante sociale, l'éducatrice et les infirmiers, que ce soit à l'hôpital de jour, à l'appartement associatif dont nous nous occupons ou en intra hospitalier, revient l'idée que quelque chose se situe autour de ce moment où René a confié ce secret à l'ergothérapeute de l'hôpital de jour.
Alors, plutôt que de vous faire un topo sur les chaussettes que je porte ou pas la nuit, étant donné que notre présence ici n'a d'intérêt que du retour que nous en ferons à ces équipes avec qui nous partageons le secret de René, nous allons réfléchir à voix haute avec vous, espérant que des discussions qui s'en suivront nous saurons y trouver les pistes nécessaires pour savoir quoi faire de ce secret si tant est qu'il faille justement en faire quelque chose.
René habite dans un appartement associatif qu'il partage avec deux autres personnes. Deux fois par semaine il reçoit les infirmiers de l'unité intra hospitalière très proche en visite à domicile. Dans la journée il fréquente plus ou moins assidûment l'hôpital de jour. Il consulte son psychiatre au CMP. Avec l'assistante sociale et l'éducatrice de l'hôpital il organise l'évolution de sa prise en charge vers un appartement plus indépendant et peut être un travail en CAT. Vous le voyez, René bénéficie d'un solide étayage au carrefour de plusieurs structures de notre secteur. Mais c'est au prix de toutes ces "béquilles" comme il dit lui-même que nous avons pu construire avec lui un ailleurs à l'hôpital. Tout ceci ne s'est pas mis en place du jour au lendemain. C'est pourquoi nous vous proposons un bref retour sur l'histoire de René et sur son parcours institutionnel.