C’est grave !

 

 

 

                                                                                                           Mercredi 3 décembre 2008

 

 

 

 

Le président de la république Nicolas Sarkozy et la ministre de la santé Roselyne Bachelot en visite à l’Hôpital psychiatrique Erasme dans le 92 ont participé à 3 tables rondes où sont intervenu des soignants, des médecins et les associations de famille et d’usagers.

 

Les participants aux tables rondes ont été sélectionnés par le ministère, les conseillers du président de la république et la Direction. Une répétition a eu lieu la veille pour choisir les intervenants et les questions, 10 mn pour chaque table ronde Autant dire que le personnel a eu très peu d’espace de parole pour échanger autour du travail, du quotidien et de la spécificité du soin en psychiatrie. Pour parler, entre autre chose, du manque chronique d’effectifs formés ce n’était pas le jour !

 

Ce qu’il vous faut savoir : à la demande des services de sécurité

du Président de la république à l’hôpital Erasme hier :

 

- Les patients sont restés enfermés dans les unités de soin entre 9h et 13h.

- Les stores des services de soin donnant sur l’entrée de l’établissement sont restés baissés toute la matinée.

 

Le Syndicat Sud Santé-Sociaux dénonce ces pratiques sécuritaires qui vont à l’encontre du droit des patients et de la loi de 2002.

 

L’ensemble du personnel et le Syndicat SUD sont atterrés,  du discours du président de la république et des orientations données au soin en psychiatrie. Le début du discours sur l’amour de notre métier fait « tâche » au tout sécuritaire qui a suivi…

 

·        Annonce masqué d’une réforme des hospitalisations sous contrainte (HO) : seul le préfet ou la justice sera décisionnaire des sorties d’essai ou définitive. C’est grave. Très grave. Cela ne correspond absolument pas aux souhaits des associations de famille et d’usagers et aux attentes des professionnels concernant la réforme de la loi de 90.

 

·        Annonce une loi permettant des soins ambulatoires sans consentement (ce qui existe d’ailleurs déjà par les sorties d’essai HO ou HDT). C’est une dérive pour une accélération des sorties, une réduction de la durée moyenne de séjour, et une gestion du soin en extrahospitalier sans moyens donner à ses structures.

 

·        Les informations administratives sur les hospitalisations d’office devront être partagées par tous les départements. Reprise de l’idée de fichier national contenu dans la loi de prévention de la délinquance qui avait été retiré suite à la mobilisation de tous les acteurs du secteur.

 

 

 

·        30 millions d’euros pour un plan de sécurisation des hôpitaux psychiatrique. On rehausse les murs et multiplie les caméras de surveillance. Ambiance hôpital-prison.

            Où est le soin ?

 

·        Les patients, potentiellement fugueurs, « seront équipés » de bracelets qui déclencheront une alerte s’ils sortent d’un périmètre autorisé.

 

Cet appareillage est INACCEPTABLE.  Il sera à l’évidence très persécutant pour les patients, mettra en danger les patients et les soignants, en « niant » et « annulant »la relation de soin.

 

·        Pour une unité fermée par établissement avec système de vidéo surveillance. Les caméras c’est pour remplacer les soignants ? Une préfiguration de l’hôpital-prison ?

 

·        Plan de financement pour l’aménagement de 200 chambres d’isolement supplémentaires. On manque de lits certes (surtout d’ailleurs de structures d’alternatives à l’hospitalisation et de moyen humain dans ces structures) mais la chambre d’isolement est un espace ponctuel de soin. Pas question d’en faire des lieux d’hospitalisation

 

·        40 millions pour la création de 160 lits d’UMD (unité pour malades difficiles).

 

Ce plan sécuritaire, stigmatisant la maladie mentale va à l’encontre du soin et « ré-enferme » les malades mentaux. Depuis 40 ans les équipes de psychiatrie travaillent sur un suivi et une prise en charge extrahospitalière dans des CMP (centre médico-psychologique), en privilégiant le secteur géographique et des structures d’alternative à l’hospitalisation pour une réinsertion sociale des patients. Va-t-on vers une remise en cause de ces outils qui ont pourtant fait leurs preuves et font du secteur un modèle pour de nombreux pays européen ?

 

Nous rappelons enfin que ce dont la psychiatrie a d’abord besoin pour apporter une continuité et une qualité des soins c’est d’un personnel en nombre suffisant, qualifié, et formé à contenir et soigner l’angoisse psychotique, seul vrai rempart aux débordements possibles induit par la souffrance psychique des patients et au délitement du lien social.

 

Angélo POLI, président du syndicat des psychiatres d’exercice public, affirmait hier avec justesse : « Nous avons passé des années à essayer d’abattre les murs autour de l’hôpital, et aujourd’hui on veut les remonter… »

 

 

 

Fait le 02 décembre 2008