Ah ! Elle commence bien l'année !
Je me demande si je ne ferais pas mieux de renoncer à la lecture des journaux et à l'écoute de la radio. L'année est à peine commencée que deux vilenies me mettent la rate au court-bouillon.
J'ouvre " Soins Pédiatrie-Puériculture " et j'y lis que des infirmiers feraient partie du Collège de l'accréditation, au titre de " membres nommés en raison de leur compétence et de leur expérience dans la domaine de la pharmacie ou des soins paramédicaux en établissements de santé ". Ravi, et prêt à faire amende honorable vis-à-vis de l'ANAES, à m'excuser publiquement d'avoir considéré cette honorable agence comme un repère de technocrates incompétents, je saute sur la liste des membres.
Les titulaires sont Christian Coduro, Infirmier Général à la Clinique Saint-Sauveur de Mulhouse (68) et Béatrice Walter, cadre-infirmier supérieur au CH de La Roche-Sur-Foron (74).
Leurs suppléantes respectives sont Martine Séné-Bourgeois, cadre supérieur infirmier à l'AP-HP (75), et Monique Dupuy, cadre-infirmier aux Hospices Civils de Lyon (69).
Là j'hallucine. Je ne connais ni les unes, ni les autres. Je n'ai aucune raison de remettre en cause leurs compétences. Sauf que. Un cadre-infirmier supérieur n'est pas un soignant, et un infirmier général encore moins. Il n'y a donc pas d'infirmier représenté à l'ANAES.
A moins de considérer qu'un contremaître ou un ingénieur puisse représenter les ouvriers.
C'est à des détails de ce type que l'on se rend compte que l'accréditation est mal partie. Elle nie le pouvoir et affecte de croire que les compétences des uns et des autres sont les mêmes. Si l'un manage, l'autre soigne. Plus on manage moins on soigne, et moins on est à même d'appréhender la réalité de ce qu'est un soin et de ses contraintes. Le soin a sa logique qui n'est pas celle du management. Ces deux logiques sont par essence contradictoires. Quoi, un infirmier général qui n'a pas pris en charge un patient depuis au moins cinq ans énoncerait des normes quant à ce qui est mon quotidien.
Cela serait risible si cela ne contribuait à entretenir le mal français : l'absence de transversalité. Cette façon de fonctionner rate régulièrement, coûte des fortunes au contribuable. C'est égal on continue et on continuera quand même.
Au Canada, toutes les personnes concernées par le soin sont représentées, patients comme infirmiers, cliniciens comme gestionnaires. Mais ça c'est une autre histoire.
Autre histoire également, celle de cet ancien combattant qui compare sa ministre et collègue de parti à une infirmière.
Une telle comparaison est insultante pour les infirmières. Lorsque le danger menace, elles sont au chevet du patient et pas aux Antilles ou ailleurs. Elles mettent leurs gants, commencent les soins et font face à l'urgence. On attendrait la même célérité de la part de la verte ministricule et de l'ancien combattant qui la soutient comme la corde soutient le pendu. Le rôle de l'infirmière est de soigner, c'est-à-dire d'être aux côtés de celui qui souffre, de l'accompagner, de l'écouter, de répondre à ses questions, de lui expliquer ce qui se passe. Ce n'est pas de dire à celui qui a un cancer que ce n'est qu'une grippe de rien du tout. Je ne sais dans cette histoire qui est le plus méprisé : les Bretons, les infirmières, ou les patients.
En 2000, tout le monde est infirmière : les ministricules, les cadres infirmiers supérieurs ou non, les infirmiers généraux, demain peut-être les plombiers, les journalistes, les bourreaux, les policiers, tout le monde est infirmière ... sauf les infirmières.
Qu'attendent donc les associations infirmières pour réagir officiellement ?
A bientôt,
Dominique Friard.
janvier 2000