RENCONTRE AVEC L'ACCREDITATEUR
L’accréditation est un système de contrôle de l’Etat sur les cliniques
de soins.. Le problème ; c’est que ce système ne part pas du travail de la
structure pour l’améliorer mais de tout un travail établi pour conformer, homogénéiser
les cliniques générales comme psychiatriques en France.
Ce qui me parait le plus aberrant, c’est qu’on
veuille normaliser les structures psychiatriques. Le plus intéressant c’est les
différences de prises en charge thérapeutique proposées par les cliniques, permettant
à chacun de trouver les soins les plus appropriés à sa personnalité et à ses
besoins.
On veut mettre l’humain dans des cases et avec une
étiquette en sus..
Or, comme dans la nature, la diversité permet le
possible, l’homogénéité … la mort (de l’humain). Durant, un à deux ans, une
partie du personnel planche en groupes sur une thématique répondant à des
critères déterminés par eux. Ensuite
les « accréditateurs » viennent pendant une semaine
contrôler ce travail et nous rencontrer. Et, il faut savoir que le coût de
cette visite est à la charge des cliniques.
Lors de leur dernier passage, les
« accréditateurs » étaient au nombre de 3 : une directrice
d’établissement de soins, une cadre infirmière et un psychiatre. C’est avec ce
dernier que la rencontre s’est faite et ce texte reflète mon après-midi passé
avec lui.
Tout
d’abord, si je nomme « l’accréditateur » et non l’accréditeur, c’est
que depuis le début je fais ce néologisme, tout d’abord de façon inconsciente et dorénavant toute a fait
consciente. Je vous laisse le soin de faire l’interprétation que vous voulez.
Je suis infirmière dans une structure
psychiatrique depuis bientôt quatre ans .Lorsqu’on m a dit que j allais faire visiter
l’institution à « l’accréditateur »,je n’ai pas eu d’appréhension
particulière. J’allais faire mon travail. Il faut vous dire que ce Monsieur
faisait « le circuit du patient ».C’est à dire voir tous les
professionnels prenant en charge le patient à son entrée. On me téléphone pour
que je vienne à l’entretien d’entrée qui se fait avec le patient, le
psychiatre, la psychologue et une infirmière.
Et là, c est rencontre du 3e type
ou plutôt rencontre avec « l accréditateur ».
Non
seulement, il fait le parcours du patient mais il fait le patient. Il se
raconte une histoire, une famille, un parcours psychiatrique .Il joue à ne pas
être bien, à être angoissé. Cela me déconcerte. Je dois lui faire visiter
l’institution, lui expliquer le fonctionnement de celle ci, les ateliers …
Des étiquettes le qualifiant se bousculent
dans ma tête : psychiatre, accréditeur, patient. Mes casquettes à moi,
lors de cette visite, ont été : infirmière, élève infirmière, guide.
Si
ceci n’est pas schizophrénique ?
Dans le couloir pour rompre le silence, je lui
demande de quelle région il vient, comme je l’aurai fait avec n’importe quel
patient. Il me répond de la région Toulousaine. Qui parle ? Lui ou le
pseudo patient ?
Durant cette heure j’ai surfé sur la vague du
vrai ou du faux. Comme les jeunes enfants j’ai eu envie de dire « pouce,
c’est de la triche. Je ne veux plus jouer.» Particulièrement lors de anecdote suivante. Une (vraie) patiente le
prend à parti en tant que accréditeur: « est-ce normal que les hommes
et les femmes soient ensemble dans la même institution ? »
« Moi, la nuit, on vient me visiter… »Je lui laisse le soins de répondre.
Voyant sa gêne, j’interviens et cadre la patiente. Une minute après, il joue le
patient angoissé de ce qu’elle vient de dire .Ce jeu de rôle va trop loin…
N
est il pas là pour évaluer l’institution ? Et rien que elle ?
Et
si quand même c’était son rôle, est-ce une façon pour évaluer un
professionnel ?
A l’école d’infirmière, lors des examens, on
m’observait. On me posait des questions : « qu’est ce que vous
faites dans telle situation ? »
Jamais
une monitrice n’a joué à faire la patiente.
Qu
est ce que cela aurait voulu dire ?
Comme une petite fille devant l’autorité, un
élève devant l’examinateur, J’ai voulu tout expliquer de notre fonctionnement
et j’ai bien sur dit des absurdités.
« Ne
vous inquiétez pas, on vous réveillera
le matin. »
« Ne
vous angoissez pas, on vous préviendra pour la réunion. »
Réponse
de « l’accréditateur » : « cela veut dire que je suis
inquiet ou angoissé…vous savez que c’est projectif et, avec les psychotiques…etc. »
Tiens !là il fait le psychiatre. HAAA ! Mais c’est un monstre à trois
têtes que j’ai devant moi !!!
L’apothéose
a été lors de la visite de la chambre. Je ne l’avais pas vue avant ;
d’habitude cela ne se passe jamais ainsi. La lumière ne marchait pas. La porte
du placard est tombée sur les pieds de l’ « accréditateurs ». La
climatisation ne s’est pas mise en marche et le boîtier lui est resté dans la
main laissant apparaître les fils. Non, je n’ai rien fait. Ce sont les murs qui
ont parlé…
Le
lendemain, au psychiatre, responsable de la clinique, qui le questionnait sur
le déroulement de la visite,l’ « accréditateur » a répondu que
je m’en étais magnifiquement bien sortie.
Oui,
mais à quel prix ?
Blanche,
pas très bien, j’ai du assurer le reste de la journée, animer mon atelier qui avait
été retardé à cause de la visite, m’occuper des vrais patients dont un qui, ce
jour là, m’attendait particulièrement..
Cette
journée de travail a été très longue cette fois là.
Je
n ai pu exprimer mon ressenti car lors de la réunion de restitution du travail
des« accréditateurs », il était interdit qu’on puisse s’exprimer.
C’EST
LA HAUTE AUTORITE DE SOINS (HAS) QUI EN
A VOULU AINSI.
Dix
it. les « accréditateurs »
Ca
ne s’invente pas !
Lc