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RENCONTRE AVEC L'ACCREDITATEUR

octobre 2006

 

 

 

 

 L’accréditation est un système de contrôle de l’Etat sur les cliniques de soins.. Le problème ; c’est que ce système ne part pas du travail de la structure pour l’améliorer mais de tout un travail établi pour conformer, homogénéiser les cliniques générales comme psychiatriques en France.

Ce qui me parait le plus aberrant, c’est qu’on veuille normaliser les structures psychiatriques. Le plus intéressant c’est les différences de prises en charge thérapeutique proposées par les cliniques, permettant à chacun de trouver les soins les plus appropriés à sa personnalité et à ses besoins.

On veut mettre l’humain dans des cases et avec une étiquette en sus..

Or, comme dans la nature, la diversité permet le possible, l’homogénéité … la mort (de l’humain). Durant, un à deux ans, une partie du personnel planche en groupes sur une thématique répondant à des critères déterminés par eux. Ensuite  les « accréditateurs » viennent pendant une semaine contrôler ce travail et nous rencontrer. Et, il faut savoir que le coût de cette visite est à la charge des cliniques.

Lors de leur dernier passage, les « accréditateurs » étaient au nombre de 3 : une directrice d’établissement de soins, une cadre infirmière et un psychiatre. C’est avec ce dernier que la rencontre s’est faite et ce texte reflète mon après-midi passé avec lui.

Tout d’abord, si je nomme « l’accréditateur » et non l’accréditeur, c’est que depuis le début je fais ce néologisme, tout d’abord de façon  inconsciente et dorénavant toute a fait consciente. Je vous laisse le soin de faire l’interprétation que vous voulez.

 

  Je suis infirmière dans une structure psychiatrique depuis bientôt quatre ans .Lorsqu’on  m a dit que j allais faire visiter l’institution à « l’accréditateur »,je n’ai pas eu d’appréhension particulière. J’allais faire mon travail. Il faut vous dire que ce Monsieur faisait « le circuit du patient ».C’est à dire voir tous les professionnels prenant en charge le patient à son entrée. On me téléphone pour que je vienne à l’entretien d’entrée qui se fait avec le patient, le psychiatre, la psychologue et une infirmière.

 

 Et là, c est rencontre du 3e type ou plutôt rencontre avec « l accréditateur ».

Non seulement, il fait le parcours du patient mais il fait le patient. Il se raconte une histoire, une famille, un parcours psychiatrique .Il joue à ne pas être bien, à être angoissé. Cela me déconcerte. Je dois lui faire visiter l’institution, lui expliquer le fonctionnement de celle ci, les ateliers …

  Des étiquettes le qualifiant se bousculent dans ma tête : psychiatre, accréditeur, patient. Mes casquettes à moi, lors de cette visite, ont été : infirmière, élève infirmière, guide.

Si ceci  n’est pas schizophrénique ?

 

 Dans le couloir pour rompre le silence, je lui demande de quelle région il vient, comme je l’aurai fait avec n’importe quel patient. Il me répond de la région Toulousaine. Qui parle ? Lui ou le pseudo patient ?

 Durant cette heure j’ai surfé sur la vague du vrai ou du faux. Comme les jeunes enfants j’ai eu envie de dire « pouce, c’est de la triche. Je ne veux plus jouer.» Particulièrement lors de  anecdote suivante. Une (vraie) patiente le prend à parti en tant que accréditeur: « est-ce normal que les hommes et les femmes soient ensemble dans la même institution ? » « Moi, la nuit, on vient me visiter… »Je lui laisse le soins de répondre. Voyant sa gêne, j’interviens et cadre la patiente. Une minute après, il joue le patient angoissé de ce qu’elle vient de dire .Ce jeu de rôle va trop loin…

N est il pas là pour évaluer l’institution ? Et rien que elle ?

Et si quand même c’était son rôle, est-ce une façon pour évaluer un professionnel ?

 

 A l’école d’infirmière, lors des examens, on m’observait. On me posait des questions : « qu’est ce que vous faites dans telle situation ? »

Jamais une monitrice n’a joué à faire la patiente.

Qu est ce que cela aurait voulu dire ?

 

 Comme une petite fille devant l’autorité, un élève devant l’examinateur, J’ai voulu tout expliquer de notre fonctionnement et j’ai bien sur dit des absurdités.

« Ne vous inquiétez pas,  on vous réveillera le matin. »

« Ne vous angoissez pas, on vous préviendra pour la réunion. »

Réponse de « l’accréditateur » : « cela veut dire que je suis inquiet ou angoissé…vous savez que c’est projectif et, avec les psychotiques…etc. » Tiens !là il fait le psychiatre. HAAA ! Mais c’est un monstre à trois têtes que j’ai devant moi !!!

 

L’apothéose a été lors de la visite de la chambre. Je ne l’avais pas vue avant ; d’habitude cela ne se passe jamais ainsi. La lumière ne marchait pas. La porte du placard est tombée sur les pieds de l’ « accréditateurs ». La climatisation ne s’est pas mise en marche et le boîtier lui est resté dans la main laissant apparaître les fils. Non, je n’ai rien fait. Ce sont les murs qui ont parlé…

Le lendemain, au psychiatre, responsable de la clinique, qui le questionnait sur le déroulement de la visite,l’ « accréditateur » a répondu que je m’en étais magnifiquement bien sortie.

Oui, mais à quel prix ?

Blanche, pas très bien, j’ai du assurer le reste de la journée, animer mon atelier qui avait été retardé à cause de la visite, m’occuper des vrais patients dont un qui, ce jour là, m’attendait particulièrement..

Cette journée de travail a été très longue cette fois là.

Je n ai pu exprimer mon ressenti car lors de la réunion de restitution du travail des« accréditateurs », il était interdit qu’on puisse  s’exprimer.

C’EST LA HAUTE AUTORITE DE SOINS (HAS) QUI  EN A VOULU AINSI.

Dix it. les « accréditateurs »

Ca ne s’invente pas !

 

                                                                                 Lc

 

 

 


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