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"LA RÉHABILITATION DE LA FAMILLE DANS LE SOIN EN PSYCHIATRIE"

 

Il est de plus en plus fréquent actuellement pour les organisateurs de colloques en Santé Mentale d'inclure la question des familles et des usagers, à côté des points de vue des points des professionnels en Psychiatrie .

Cependant ce débat n'a pas encore trouvé en France suffisamment d'écho , et l'absence d'un public nombreux lors du forum SYNAPSE nous à fait ressentir que nous sommes encore des précurseurs , et qu'il n'en sera plus de même dans l'avenir .

A l'occasion de ces journées , nous aimerions une nouvelle fois évoquer la place de la famille dans le cadre du soin , et ce avec des représentants de familles et des thérapeutes engagées dans une pratique avec des familles. Celle-ci est souvent le milieu d'accueil et de vie du patient , souvent par faute d'autre structure d'accueil. C'est sur elle que repose souvent le maximum de contraintes et de difficultés liées à la cohabitation avec un enfant ou un adulte qui présente des troubles psychiatriques. La famille est souvent un lieu de soutien et de réhabilitation pour les malades.

1/ Réalité d'un contexte de soins

Avec ou sans l'accord de l'intéressé, la famille se présente dans la majorité des cas comme demandeuse d'une intervention thérapeutique, même si dans les faits, cela est plus complexe.

2/ Réalité d'un contexte agissant .

Très souvent la famille reste milieu de vie, lieu d'émergence des symptômes, lieu d'accueil et de rejet. Toute crise familiale contient en germe sa solution. Après l'urgence d'une intervention salvatrice dictée par une situation dramatique, il est nécessaire de travailler sur les images et les comportements exprimés in situ dans la cellule familiale afin d'en modifier la dynamique et d'en restaurer l'autonomie.

3/ Réalité d'une histoire

Celle du patient, mais également invisible la sous-jacence de notre propre histoire familiale et tout ce qu'elle amène à projeter sur la situation familiale des gens que nous traitons. On dirait parfois une sorte de pièce de théâtre à trois acteurs: le malade, protagoniste de la pièce, le médecin et la famille, chacun ayant tendance à renvoyer la responsabilité de la souffrance et de l'impuissance à guérir sur les deux autres.

L'évolution du soin dans le cadre de la Psychiatrie de secteur, avec ses effets sur la durée de l'hospitalisation, et la mise en place d'interventions au sein de la communauté de vie du patient entraînent dans un grand nombre de cas, la rencontre avec la famille du patient.

Il existe encore souvent cependant des positions de méfiance, d'indifférence, voire de rejet ou d'intrusion dans la collaboration. qui s'instaure avec la famille, même si dans l'ensemble des rapprochements importants se font avec des associations de familles de patients, et si de nombreuses équipes établissent une relation de collaboration avec les familles.

Nous aimerions aborder ainsi les conditions possibles d'une alliance thérapeutique avec la famille, que la pratique du secteur nous a permise de découvrir .

Dans cette démarche nous devons considérer la famille comme un partenaire à part entière dans le processus thérapeutique, sans renoncer pour autant à notre engagement auprès du patient. Il s'agit de se mettre à l'écoute de la famille, de ses limites, de ses valeurs et de ses enjeux. En contrepartie nous pourrons exiger d'elle qu'elle pose des règles, qu'elle les respecte.

Dans ce contexte, tout projet de réhabilitation devrait prioriser la participation de la famille au même titre que le patient, même quand les liens avec le malade sont minces .

La Réhabilitation Psychosociale quelque en soit la nature ne peut pas être un processus individuel .

La collaboration mise en place ne doit pas seulement se faire quand les thérapeutes se sentent impuissants devant l'incapacité du patient. Des expériences ont démontré que les attentes du malade, des thérapeutes et de la famille, positives et négatives avaient une influence déterminante sur l'évolution à long terme de la Schizophrénie.

Comprendre cette influence et pouvoir la travailler avec le patient et sa famille représente un aspect primordial du traitement. On doit aussi tenir compte de la vie du patient dans sa famille. Les multiples écueils doivent être abordés afin d'éviter l'hospitalisation ou les rechutes.

On doit aussi aborder la question de la séparation à la fois tant souhaitée mais également très redoutée.

Je rappellerai ici les recommandations de la conférence de consensus sur la Schizophrénie pour "offrir au patient et à sa famille une information la plus complète et la plus objective possible afin de développer autour du patient un véritable partenariat thérapeutique". Cependant ces positions contrastent souvent dans la pratique avec des réalités diverses rendant compte de nombreuses difficulté dans l'établissement d'une collaboration avec la famille de la part des équipes de soin .

Le but est de soutenir les parents, il ne s'agit pas de Thérapie Familiale ou comportementale, mais une approche en terme d'écoute et de soutien comme le réalise de nombreuses équipes.

A la prise en charge du patient dans la communauté doit s'associer le soutien vis à vis de sa famille, et une attention vis à vis de ses besoins et de ses souffrances et une coopération à ses problèmes quotidiens afin de l'aider vis à vis des crises qui peuvent survenir . Les familles doivent être informées des projets des patients afin de ne pas se sentir exclue de la prise en charge. Il nous semble que si les parents ne les soutiennent pas, il existe peu de chance qu'un projet d'autonomisation réussisse. La séparation si elle intervient doit se produire sans rupture.

Dans notre expérience, et celle de plusieurs équipes, ce travail, que nous avons entrepris avec plusieurs dizaines de familles de patients psychotiques ou non, a des effets sur l'hospitalisation psychiatrique, qui sont deux à trois fois moins fréquentes, sur l'acceptation de la prise en charge thérapeutique et médicamenteuse, sur la désintégration familiale. Ce travail, dans d'autres pays, fait l'objet souvent de programmes de soin.

Il en va de même des rechutes qui sont moins sévères entraînant des hospitalisations moins longues. La collaboration engagée avec ces familles dans le cadre d'entretiens réguliers peut s'intégrer également largement au sein d'un dispositif sectoriel assumant la prise en charge du patient .

Ainsi faire communiquer "ces deux mondes ", celui des familles et celui des soignants doit aussi faire partie d'une nécessité sur le plan de la réhabilitation Psycho-sociale. L'intégration de la réhabilitation psychosociale et de l'approche des familles se posera au cours des prochaines années comme un grand défi aux cliniciens et aux chercheurs .

Débat SYNAPSE
VENDREDI 11 DÉCEMBRE 1998

Dr. Patrick Bantman


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