Retour à l'accueil

Retour à enfance




LA PRISE EN CHARGE DES TOUT-PETITS

Dr Serge HEFEZ
Psychiatre. ESPAS

L'enfant est une personne en croissance physique, mais aussi psychique. Dès sa naissance, il doit en permanence s'adapter à un entourage dont il est dépendant, et qui doit répondre à tous ses besoins, à commencer par ses besoins affectifs.

Cette dépendance rend l'enfant particulièrement vulnérable : la moindre perturbation dans son environnement, va être susceptible de provoquer des manifestations de souffrance psychique parfois spectaculaires, manifestations qui peuvent disparaître aussi vite si l'on supprime la cause de la perturbation.

Mais l'enfant possède aussi d'emblée une personnalité, des capacités intellectuelles, des forces de résistance qui font de lui un individu singulier, différent des autres enfants.
Ce sont ces deux aspects que les psys qui s'occupent des tout-petits vont devoir prendre en compte En effet, dès les premiers jours de sa vie, le nouveau né peut manifester des signes de souffrance psychique : ne pas dormir, ne pas manger, refuser tout contact affectif, s'exprimer par des manifestations somatiques comme des vomissements ou des régurgitations.

Plus l'enfant va grandir, plus les symptômes peuvent se différencier et s'organiser : phobies, anorexie, bégaiement, pipi au lit, manifestations obsessionnelles jusqu'à des comportements tout à fait étranges et anormaux.

Le diagnostic de ces troubles est fondamental : les mêmes symptômes peuvent être simplement liés à une inquiétude provoquée par exemple par un conflit ou un deuil chez ses parents, ou être dus à une véritable maladie de l'enfant comme l'autisme ou la psychose infantile.
Les nourrissons sont le plus souvent pris en charge dans le cadre d'une thérapie mère-enfant ou père-mère-enfant.
Dès l'âge de deux ans, les tout petits peuvent bénéficier de méthodes pédagogiques adaptées (comme la méthode Freinet), de thérapies corporelles et rééducatives, de thérapies comportementales ou de psychothérapies psychanalytiques.

Au cours des psychothérapies de l'enfant, des supports d'expression comme le dessin ou la pâte à modeler sont fréquemment utilisés. L'enfant va alors pouvoir jouer avec le thérapeute les conflits qu'il a intériorisés: il s'agit d'un transfert, comme dans les psychothérapies d'adultes.
Quelle que soit l'origine de la pathologie de l'enfant, il est parfois indispensable de faire participer les parents à sa prise en charge.

Prenons l'exemple de Damien, âgé de trois ans. Ses parents sont en conflit ; son père s'éloigne de plus en plus du domicile familial ; Damien développe certains symptômes :
· Il fait des cauchemars et des insomnies qui font que sa mère doit dormir avec lui pour le calmer
· ainsi qu'une phobie scolaire qui obligent son père à l'accompagner tous les jours et à rester un peu avec lui à l'école pour le rassurer ; mais il perd patience et commence à frapper son enfant.
L'inquiétude pour Damien détourne ses parents de leur conflit conjugal, mais chacun ressent que l'autre est responsable des symptômes de l'enfant. Si rien ne bouge, la phobie de Damien peut s'installer et devenir une véritable maladie.

Si les parents demandent une prise en charge pour leur enfant ; il pourra leur être proposé 3 choses :
· une guidance parentale avec un psychologue qui va leur permettre de clarifier leur situation, et de trouver des conseils et un soutien,
· ou bien une psychothérapie de couple parallèlement à la prise en charge de leur enfant,
· ou encore une thérapie familiale à laquelle tout le monde va participer en même temps.

Le suivi d'un jeune enfant peut se dérouler dans un cadre public ou privé.
· Dans le privé, exercent de nombreux psychiatres d'enfants et des psychologues cliniciens spécialisés. Adressez vous toujours à quelqu'un qui vous est recommandé par un professionnel ou une personne de confiance
· Dans le public, des consultations spécialisées existent au sein des hôpitaux généraux, ces Centres Médico-psychologiques (CMP) et des Centres Médico-psycho-pédagogiques (CMPP) dans lesquels exercent des équipes pluri-disciplinaires.
· Pour les troubles psychiques plus importants, il sera parfois nécessaire de placer l'enfant dans un hôpital de jour au sein duquel toute une palette de soins et de rééducation va lui être proposée. L'hospitalisation à temps plein est plus rare à cet âge

Si la guérison des tout petits peut être rapide, parfois même spectaculaire, leur prise en charge pychologique se heurte à de nombreuses difficultés ; d'abord, le plus souvent, ce n'est pas l'enfant qui est demandeur, mais c'est son entourage adulte, familial ou scolaire, qui manifeste le désir de soins. Ensuite, ce champ d'intervention réclame du thérapeute des qualités spécifiques difficiles à acquérir, comme une capacité innée à rester en complicité avec l'univers singulier de l'enfance.
Le psy représente avant tout un adulte, ni pédagogue, ni arbitre, qui apporte à l'enfant des paroles vraies et une confiance en son devenir ; il lui permet de quitter la place d'objet du désir de ses parents ou de son entourage, pour devenir sujet, sujet de sa propre parole.



Document écrit tiré de l'émission de télévision PSYCHE