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PRISE EN CHARGE DE L'AUTISME

Dr Serge HEFEZ
Psychiatre. ESPAS

Les enfants autistes inquiètent et fascinent tant leur regard noyé dans un horizon invisible, leur impossibilité à communiquer restent énigmatiques.
Ce qui caractérise ces enfants se résume avant tout par le manque profond de quête affective, le besoin de maintenir l'environnement inchangé, la fascination pour certaines caractéristiques des objets comme leurs reflets et leurs mouvements, et l'absence complète ou le retard dans l'apparition d'un langage très particulier et hermétique. Mais ces enfants ont souvent un aspect vif et certains possèdent des talents exceptionnels dans des domaines particuliers comme le calcul ou le dessin.
Les travaux les plus récents montrent que la personne autiste ne sait pas filtrer de façon pertinente les informations qui lui parviennent : il est submergé, noyé dans un véritable raz de marée de sensations qu'il ne peut organiser et différencier.
Aujourd'hui, personne ne songe plus à accuser les parents, d'être à l'origine du problème par une incapacité à aimer leur enfant, pas plus qu'on ne met en doute l'impact de facteurs neuro-biologiques,
Car il faut savoir que, jusqu'à récemment, l'autisme excitait les passions et l'on voyait se développer de douloureuses polémiques entre ceux qui affirmaient que le mal est dans le corps et ceux qui le situaient dans l'esprit, entre les tenants de traitements psychologiques ou de traitements comportementaux.

Mais le diagnostic d'autisme s'accompagne de deux vérités hélas implacables : premièrement, nous ne connaissons pas la cause de l'autisme; deuxièmement, nous ne savons pas le guérir.
En revanche, on sait que l'on peut, en communiquant très tôt et de façon pertinente avec l'enfant, éviter de le surhandicaper, sauver l'intelligence pour tenter de combler l'abîme social.

L'autisme est un défaut dans le développement de tout ce qui touche à la perception et à la communication, donc à la résonance sociale. Ce manque va conduire à un handicap sérieux car il touche à la sociabilité et à la capacité à mener à bien une vie harmonieuse avec l'entourage.
Il ne s'agit plus, comme cela se faisait autrefois, d'évoquer une opposition entre soigner et éduquer, car éduquer signifie aussi favoriser le développement psychique par la transmission de connaissances.
Si l'on ne peut parler de psychothérapie de l'autiste, il existe maintenant des modes de prise en charge dans lesquels les besoins psychiques et éducatifs de l'enfant sont pris en compte.
Un point capital est de créer une alliance avec les parents afin que tous participent ensemble au mieux-être de l'enfant.

Nous allons donner quelques éléments caractéristiques d'un projet d'accompagnement qui tienne compte des possibilités de la personne autiste et des intérêts et motivations qu'il manifeste déjà.
· aider à filtrer ce qui est pertinent ; l'autiste est submergé par le flots de sensations venant du monde extérieur : il faut réduire les stimuli en amont pour aider à focaliser l'attention sur une activité présente.
· Simplifier le langage, et dire autrement ; il faut présenter les informations une à une et concrétiser les consignes par un objet, un pictogramme, une photo ou une étiquette.
· Structurer l'environnement ; séparer l'espace à la maison comme à l'école en lieux significatifs : des lieux de concentration le plus simplement aménagés pour éviter la dispersion, à l'abri d'une fenêtre ou d'une source sonore. Des lieux de travail à deux : deux chaises autour d'une table, avec par exemple la même couleur de nappe pour reprendre la même activité. Des lieux de détente : un canapé, des coussins, un lieu de musique, une salle de bain selon les possibilités de l'espace.
· Et ne pas hésiter à fêter par des mimiques de satisfaction, des câlins, des félicitations toute activité terminée !

Face à ce drame familial, la seule chance pour les parents de tenir est de se mobiliser, de participer activement à la prise en charge de leur enfant, de se faire aider par des professionnels qui n'agiteront pas le spectre de l'accusation et de la culpabilisation.
· Les enfants autistes sont dirigées vers deux types de structures :
· D'une part, celles créées pour l'éducation spéciale des handicapés mentaux ; ce sont les Externats ou Internats Médico-pédagogiques (EMP, IMP) ou professionnels (EMPro), et les Centres d'aide par le travail (CAT) ; le plus souvent, la spécificité de l'autisme y est reconnue et l'éducation est réalisée par des spécialistes
· D'autre part les structures psychiatriques mises en place pour les enfants malades mentaux : Centres médico-psychologiques, Hôpitaux de jour ; certaines équipes de psychologues, psychiatres et psychanalystes ont développé des outils spécifiques pour prendre en charge ces enfants ; il faut bien se renseigner sur le type de traitement qui est proposé
· Des projets pilotes spécifiques à l'autisme commencent à exister un peu partout en France : classes intégrées dans les établissements scolaires, PRO AID-autisme, projet Hélios.
De nombreuses associations de parents apportent de précieux renseignements : UNAPEI, APAJH, APPEDIA…

Depuis une vingtaine d'années, les travaux réalisés dans le monde entier confirment que la personnalité des parents ou le mode d'éducation ne sont pas à l'origine de l'autisme de leur enfant. Le voile se lève lentement, en particulier depuis l'apparition des neuro-sciences et des techniques d'investigation plus sophistiquées.
Reste à faire en sorte d'affiner des modes de soin global prenant en compte à la fois l'adaptation concrète des personnes autistes à leur environnement et leurs besoins psychiques. Et surtout qu'une parole puisse circuler pour aider les équipes qui prennent en charge ces enfants, et pour déculpabiliser les parents, leur donner les moyens de surmonter cette épreuve, car il n'y a pas de manière normale de vivre une situation aussi profondément anormale.




Document écrit tiré de l'émission de télévision PSYCHE