COMMENT SAVOIR QUOI FAIRE ?
Il ne faut pas croire que je sois allergique aux « classeurs de protocoles » ; je trouve cela bien utile, parfois, d’avoir à notre disposition cet outil de travail ; ces sortes de « check-list » toutes prêtes qui permettent de vérifier si l’on n’a rien oublié quand une situation inhabituelle, demandant une action particulière, se présente à nous. Parce qu’on n’a pas (et heureusement) un décès, une évasion ou la découverte d’une arme à feu tous les jours dans le service, il est rassurant de suivre les trames d’un canevas déjà réfléchi, pré-établi et écrit quand cela se produit ; L’émotion pouvant parfois nous faire perdre nos moyens.
Autrefois (Eh oui ! décidément il faut bien que
je reconnaisse que je ne suis plus de la première jeunesse) le bon sens et la
transmission des connaissances par les plus « anciens » suffisaient
pour savoir comment procéder afin
« de ne rien oublier » et de
« faire ce qu’il fallait ». C’était peut-être moins compliqué
aussi. A présent je fais partie de ces
ancien(ne)s et suis bien contente que les jeunes aient à leur disposition des
documents administratifs officiels pour suppléer à mes manques.
J’ai participé en 1999, je crois, aux premières réunions consacrées à l’ébauche
des protocoles. J’avais choisi de m’inscrire dans le groupe traitant de « la
sortie des patients hospitalisés » car, à cette époque, je travaillais
comme infirmière sur l’extrahospitalier et je ne me sentais pas vraiment
concernée par les actions menées « durant l’hospitalisation »,
trop éloignée que j’étais des pratiques quotidiennes. Ce que nous pondions
laborieusement au fil des réunions était validé après-coup par une commission d’expertise et,
finalement, le premier classeur de protocoles est sorti plusieurs mois plus tard…
Ensuite, d’autres personnes ont pris le relais des pionniers dans les groupes
de travail. A présent nous disposons d’une demi-douzaine de gros classeurs à
deux anneaux et de différentes couleurs. Certains sont affublés sur leur
tranche visible d’appellations absconses constituées d’initiales.
Au début nous nous efforcions de lire in extenso
les nouvelles feuilles au rythme de leur sortie, mais
bien vite nous fumes submergés par le flot des informations… tellement de
documents à lire par moments et en provenance de partout à la fois !
Quand il arrive qu’une situation particulière
requiert la vérification spécifique des actions, on se souvient bien
« d’avoir lu ça quelque part », mais où ? Alors on
entreprend des recherches… Dans notre
unité on n’a cependant pas pitié des « personnes de petite taille »
dont je fais partie… Et je dois, soit me hisser sur la pointe des pieds et
craindre de recevoir le classeur sur la tête ; soit grimper sur une chaise, et risquer l’accident de travail, pour attraper cet instrument
sensé nous faciliter la vie... C’est pesant ! Voyons voir : Classeur bleu ?
Classeur vert ? Tiens où es le second classeur vert ?… Zut ! Il
vient d’être rapporté à Madame X… ,
responsable des mises à jour, pour être complété… j’espère que l’info que
je cherche n’était pas dans celui-ci… Il faut lire souvent plusieurs tables des
matières avant de dénicher la référence du document recherché. Une fois le
renseignement trouvé il faut ranger tout ce bazar. Je tente une nouvelle fois
de poser les classeurs sur une étagère plus basse à l’intérieur de l’armoire au
dessus de laquelle ils étaient posés… au moins ceux les plus fréquemment
utilisés puisque, en tassant un peu, ils tiennent là. Je sais que demain ils
auront de nouveau grimpé d’un étage, mais bon… je m’obstine…
Récemment nous avons eu à émarger un document nous incitant à lire quelques feuillets. Piqûre de rappel. De la même façon que précédemment il a fallu qu’à tour de rôle, chacun et chacune, nous refassions cette même manœuvre : descendre les classeurs, trouver la page (parfois la référence n’était pas exacte), lire, ranger puis signer… Très amusant de constater, d’ailleurs, que certains collègues ont émargé des colonnes vides… ils ont pris de l’avance sans doute…
Ah ! vivement l’informatisation des données……
il suffira de taper le « mot-clef » dans un moteur de recherche et
hop ! l’information apparaîtra aussitôt… Le bonheur, quoi !
Ah ! Comme cela sera plus aisé également pour saisir les
informations dans les dossiers des patients ! … Il paraît que ça va venir
un jour… en attendant on nous invite à apprendre le maniement des DPU (Dossiers
des Patients Uniques. Sont-ce les dossiers ou les patients qui sont
uniques ? c’est vrai que DUP ça ne faisait pas très bien)… C’est compliqué. Il paraît que l’utilisation de ces pochettes
cartonnées rouges contenant une multitude de feuilles est l’étape préliminaire
et incontournable pour s’initier à l’informatisation des dossiers. Un peu tiré
par les cheveux cette explication… En attendant cela va obliger tout le monde à
un double apprentissage. Le discours que l’on nous tient évoque pour moi
l’image suivante : « c’est l’histoire de Paul qui veut apprendre le Russe afin d’émigrer en Russie,
et à qui on impose d’apprendre d’abord l’Allemand sous prétexte que son avion
va survoler l’Allemagne »…
En attendant je continue de réclamer une étagère
toute simple, posée au mur par les
agents des ateliers, afin d’y ranger les
classeurs et faciliter nos recherches… ça ne paraît pas très compliqué, à priori. Hélas !
cela ne sera pas faisable, semble-t-il. Il ne faut pas faire de trous dans les
murs, plus précieux que nos têtes… Mais bonne nouvelle : si les budgets
sont acceptés nous aurons peut-être un nouveau meuble à Noël ! (de quelle
année ?)
Sylfo