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L’icône à la veste rose pâle

 

 

Il était une fois une jeune fille de vingt ans qui débutait ses études d’infirmière. Cette jeune fille c’était moi.

J’avais un tout petit peu d’expérience dans le milieu hospitalier car j’avais en poche un B.E.P. sanitaire et social. Oh ! Cette expérience était très limitée : soins de nursing effectués en gérontologie et en médecine.

Ainsi donc à tout juste vingt ans j’allais par une matinée froide et humide d’octobre 1993 découvrir la psychiatrie à la Clinique Belle-Rive à Villeneuve les Avignon.

J’éprouvais un mélange d’angoisse et d’excitation. La veille, j’avais à peine dormi tant cet inconnu m’effrayait. Je poussais la porte d’entrée de l’établissement et découvrait au fur et à mesure de la journée le lieu dans lequel j’allais passer huit heures par jour pendant trois semaines. C’était un endroit spacieux, cossu, bien éclairé, les fenêtres des pièces principales (réfectoires, chambres) donnaient en majorité sur un grand parc dont les jardins étaient à la française. Le personnel soignant m’avait bien accueilli, j’avais une infirmière D.E. pour référente. Le souvenir marquant que j’ai d’elle est sa veste de travail : elle était rose pâle. Ma référente était jeune, blonde, grande, une voix douce et à la voir avec cette veste elle me faisait penser à une icône. D’ailleurs ma première veste en tant qu’IDE a été rose pâle et j’ai été triste lorsque j’ai dû m’en séparer à cause de l’usure.

Mais revenons à ma première journée en psychiatrie.

Je ne me souviens pas avoir été impressionnée par un patient en particulier mais par l’ensemble de la population accueillie à la clinique. Plus précisément c’est l’histoire de la maladie qui m’a le plus fait impression. Ces parcours avant, pendant et après l’hospitalisation sont douloureux, ils sont teintés d’abandon, d’incestes, d’alcool, de drogue, de parents malades eux aussi. Ils sont jalonnés de rechutes.

Ces patients sont étiquetés et l’étiquette est souvent collée à vie. Ces parcours de vie sont tristes, empreints de violence mais ils peuvent être gais, joyeux.

Tous ces vécus nous renvoient à notre vécu personnel, ils nous rappellent que nul n’est à l’abri de la maladie psychiatrique, que toutes les classes sociales sont touchées.

Avec le recul, je peux dire que cette première journée a été déterminante dans mon orientation professionnelle. Ces parcours que je qualifierais d’exceptionnels avaient fait écho en moi car moi aussi ma famille était touchée par la maladie psychiatrique. Je voulais comprendre les mécanismes qui poussent une personne à faire telle ou telle chose. Inconsciemment je m’étais érigée en sauveur mais encore novice dans le domaine, cependant cette position n’allait pas me quitter jusqu’à ce jour.

 

 

Sandrine Bellucci, IDE, C.H. Montfavet. Spécialisation à la psychiatrie.





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