Premiers accueils
Ecrire rétrospectivement sur l’accueil, après deux ans écoulés, n’est pas aisé pour moi.
Au début, j’ai réfléchi sur les différents types d’accueil que j’avais connus en tant que professionnelle. J’en ai identifiés trois.
Mais, renseignements pris, le thème de cette réflexion était « en psychiatrie : le premier contact ». Il fallait donc que je modifie mon texte pour être complètement dans le sujet. Mais après tout pourquoi ? Le fait de réfléchir sur d’autres types d’accueil ne m’amènerait-il pas à mieux cerner le sujet. Alors je n’ai rien enlevé, mais j’ai plutôt essayé d’approfondir la deuxième partie.
J’ai donc connu trois accueils différents depuis que j’ai terminé les études.
Le premier à l’hôpital général,
Le second en intra-hospitalier à l’hôpital psychiatrique,
Le
dernier en secteur ouvert en psychiatrie.
Inutile, même superflu de dire qu’en hôpital général surtout de nuit, comme je l’ai connu, l’accueil est quasiment inexistant. J’ai travaillé deux ou trois nuits en doublette. Puis, je me suis retrouvée seule à prendre en charge des patients dans un service que non seulement je ne connaissais pas, mais dans lequel je ne restais qu’une nuit ou deux pour être ensuite, affectée ailleurs . Les collègues, et notamment les aides soignantes, ont fait ce qu’elles ont pu pour m’accompagner, mais la motivation manquait étant donné les conditions de travail : elles en avaient assez d’accueillir et d’informer des partenaires qui ne restaient pas.
A l’hôpital psychiatrique, l’accueil a été nettement plus marqué.
Tout d’abord, les horaires ont été choisis afin que je découvre plus facilement le service (horaires de journée). Je suis donc arrivée un matin vers huit heures trente. Etaient présents un cadre, une infirmière d’accueil, et deux autres infirmiers qui, entre deux demandes de patients se sont présentés.
Tout de suite les clés, symbolisant ma prise de fonction, me furent remises avec une forte mise en garde : « surtout ne les perd pas nous serions obligés de refaire toutes les serrures, ici il y a beaucoup de vols ». Et, je me suis tout de suite rendue compte de l’impact qu’elles avaient sur les patients. Les clés n’ouvrent pas que les portes…
Ensuite, lors de la réunion traditionnelle du début de l’après-midi, j’ai fait un bref résumé de mon parcours devant les collègues présents, mais sans plus. Le temps manquait, il fallait parler de tous les patients en insistant particulièrement sur ceux qui posaient des problèmes. Dommage que cette présentation ne se soit faite que dans un sens. Bien sûr avec le temps j’ai appris à « connaître » un peu tout le monde.
Dans la même journée, j’ai visité les lieux.
Les personnes présentes étaient souriantes (malades et soignants). Le cadre m’a demandé de prendre mon temps pour me familiariser. Je me suis aperçue, par la suite, que cette notion « de prendre son temps » revenait souvent en psychiatrie et tout particulièrement en secteur ouvert.
L’accueil fut aussi fait par les patients surtout les plus habitués au service.
L’un d’entre eux m’a rappelé le cadre « le goûter n’est pas encore servi ! » J’appris vite que les repas et le respect des horaires étaient primordiaux pour eux.
Une autre, m’a montrée que j’étais bien en psychiatrie « t’es pas belle toi, je t’aime pas ». aussitôt réajusté par un infirmier « ne t’en fais pas elle dit toujours ça au nouveau ». Petite touche d’agressivité et de violence verbale qui est fréquente dans les pavillons d’accueil.
Autant m’y habituer tout de suite !!!
Ce qui m’a également interpellée c’est l’inactivité des résidents qui étaient souvent allongés, un peu partout soit dans le pavillon, soit dehors sur un banc ou dans l’herbe. Je me demandais comment ils faisaient pour ne pas trouver le temps interminable. J’appris par la suite que si pour certains elle était nécessaire, pour d’autres elle était vraiment pesante.
Finalement, cette première journée a été positive pour moi dans l’ensemble. J’ai eu tout de suite la sensation que c’était dans ce cadre là que je souhaitais continuer ma vie professionnelle même si, dès ce jour là, est né une sensation qui allait perdurer assez longtemps, celle d’un flou, d’un manque. Etait-ce le cadre thérapeutique ?
Sur la structure de jour, je pense pouvoir dire que l’accueil a été très dilué. Pas de manifestation marquée si ce n’est « un bienvenu » d’une des infirmières quinze jours après mon entrée en fonction. Une visite rapide des locaux dont on fait très vite le tour, suivie d’une présentation rapide des personnes présentes. J’ai eu droit à un « comment te sens-tu ici » une ou deux fois. Puis, c’est à peu près tout ce dont je me rappelle.
Pourtant, je ne me suis pas sentie exclue, j’ai trouvé une place assez rapidement. Une réorganisation s’est faite quelques temps après mon arrivée pour connaître les desiderata de chacun. Malgré la petitesse des locaux et le personnel finalement assez nombreux par rapport à l’espace disponible, l’accueil s’est fait paisiblement.
En conclusion, je peux dire que cette introspection sur l’accueil m’a paru intéressante. Nous sommes en permanence, dans notre propre pratique professionnelle, sollicités pour recevoir des patients mais aussi des collègues, des étudiants, des personnes d’autres milieux professionnels comme notamment les acteurs sociaux.
De plus, il existe une similitude entre le premier regard d’un soignant pénétrant dans un établissement de soins et celui d’un patient.
Franchir nos portes pour la première fois n’est pas un acte anodin.
A nous soignants de réussir cette première prise en charge !!!
Dominique Bonnetain, CMP Le Petit Nice, Embrun (05), Formation spécialisante en psychiatrie à Montfavet (84)