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Providence

Il est, paraît-il, une horizon lointaine, où le soleil se lève sans péril.

J’avais pris dans ma paume,de la phrase et du mot, de la même façon, qu’enfant, je laissais filé entre mes doigts du sable, ne retenant que les grains plus épais, menus morceaux de coquillages.

Il est paraît-il une autre façon de retenir la vie.

Ma destinée est somme toute, arbitraire.

Ornée comme un sapin de Noël, j’adoptais en premier lieu, l’aisance discursive, et je pétrissais le mot à ma convenance.J’affichais des qualificatifs comme des chapeaux sensés en dire long sur la tête qui les porte.

Lundi, haut de forme de l’égarée, Mardi, béret de l’exilée, Mercredi, tête nue, Jeudi chapeau de paille,Vendredi ne dit plus rien de moi, Samedi bonnet de nuit, Dimanche coiffure nostalgique.

Ma destinée tient aux mots.

Il est paraît-il, une horizon, où le soleil se lève sans péril.

Il est de tradition de construire des châteaux de sable que la mer emportera, et je regarde dans les rouleaux de la mer, tant vertigineux qu’audacieux mon haut de forme emporté par la vague.

La tête nue de Mercredi continue à discourir.Regret de la perte, perte du regret, il est paraît-il, une autre façon de retenir la vie, même tête nue.

Les heures lourdes à regarder le chapeau emporté, la colère emportée, l’espoir emporté, des heures closes empêtrées dans l’âpreté des déconvenues, prise dans la croisée amère de mes qualificatifs.

Si la vie rend inconsolable, il est probable que je me consolasse de cette façon d’un évidement, d’une désincarnation plus austère que les larmes.

Ma destinée est somme toute, arbitraire.

Les sapins de Noël, châteaux de sable, faits et défaits, dans le flux et le reflux, certains entendent la mer au creux des coquillages !

L’important, me dis-je, un beau et bon matin, c’est de se construire une histoire, mythe peut-être, odyssée pour les plus impétueux, qu’importe, il s’y passera quelque chose !

La vie passe, ma destinée est arbitraire.

Ma destinée tient aux mots.

Cailloux du petit poucet.

Les mots babillent comme Babylone, c’est peut-être une histoire racontée, toute histoire est arbitraire.

Et quand le soleil qui porte l’incandescence dans son S-haut de forme, maquille l’océan de vie et de reflets, qu’importe si la lumière est un déguisement de providence, je regarde ce moment, j’oublie l’obscurité qui précède titillant mon haut de forme, j’oublie la torpeur qui couchera et le soleil et ses caresses, je regarde simplement cette histoire.

Ma destinée tient aux mots.

Je blottis cette phrase dans ma paume, elle écrit mon histoire sur les lignes de ma main.

Elena


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