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Interlude

J’aime aller à l’hôpital

J'aime aller à l'hôpital quand je ne travaille pas.

C'est comme se promener dans son quartier, au milieu de concitoyens familiers, pas d'ordre à donner ni a recevoir, pas de tâches impérieuses, disponible. Saluer quelqu'un, échanger quelques phrases, observer une scène.

C'est comme regarder une pièce de théâtre en se baladant sur la scène avec possibilité d'interagir.

C'est comme de travailler la fin de semaine, cool!

On prend le temps pour les toilettes, et s'il y en a qui roupillent encore ils seront levés plus tard, le service du petit déjeuner s'étire. Chacun est accueilli par quelques mots quelques phrases, les conversations vont plus loin qu'en semaine active. Au hasard d'une situation, une conversation devient entretien et le travail s'élabore.

même la visite médicale du samedi matin est particulière, plus intime. On s'explique plus. Puis arrive le midi, le médecin s'en va et patients et soignants savent que jusqu'au lundi matin aucun intervenant ne viendra plus interrompre leur relation. C'est à ces moments que la sonnerie du téléphone est la plus funeste.

Mais quand je ne travaille pas même la sonnerie du téléphone devient incapable de me perturber. Quand je ne travaille pas, c'est à dire que je suis en temps syndical, sur une journée qui va durer du matin jusqu'à tard le soir et que je vais faire une pause au pavillon, dire bonjour, boire la café.. Parfois comme aujourd'hui, je vais m'allonger sur un relax de la salle de repos. Il fait exceptionnellement chaud pour une journée de mi décembre et j'ai ouvert les fenêtres qui donnent sur le parc. Paupières closes je me laisse glisser dans la rumeur du bâtiment qui me parvient parla porte entrebaîllée. Je suis à distance le rituel du goûter, ça c'est rachel qui dévale l'escalier de peur de rater son bol de café et l'occasion de taper une clope, la quinte caractéristique de M Durrouy me parvient du fumoir. En entrant tout à l'heure nous nous sommes croisé alors qu'il s'y rendait, son salut parasité par ses hallucinations m'a fourni l'ouverture que je cherchais depuis un moment pour entamer une prise de contact. Les efforts qu'il a fait au cours de l'échange qui a suivi a permis de conclure sur la poursuite de l'entretien vendredi prochain.

Delphine, ma collègue aide soignant sursaute en me découvrant dans la pénombre et me tire de ma rêverie, l'arôme qui se dégage de la cafetière qu'elle pose sur la table réouvre mon agenda mental à la page du jour. Encore deux réunions à se taper, mais d'abord on va s'en rouler une et vider le pot de caoua avec le reste des collègues qui s'amène.

Louis n'est pas avec elles, il est resté avec les renforts pour servir le goûter à la chambre d'isolement. C'est M. Levert de retour d'UMD, qui après quelques séjours ponctuels en isolement vient de réintégrer à 90% la chambre spéciale.

Et le temps est passé.