Vagins
et autres méandres
Les monologues du vagin passent au théâtre de ma
petite ville, vite, des places, depuis le temps que j’en entends parler, de
cette pièce, pas une minute à perdre, je cours, je vole, je racole les copines,
venez, venez, on va tout apprendre sur nos vagins, tout ce qu’on sait et le
reste, nos cheminées sont à l’honneur, elles sont brûlantes en cette fin
d’hiver qui n’en finit pas, parlez-nous de nos vagins, mettez-les en valeur,
vite, avant qu’il ne soit trop tard et qu’ils soient comme nos ovaires et nos
utérus, tout rabougris et desséchés par la ménopause, vieilles choses plus à
l’argus, à la casse, plus d’enfants, terminé, on n’est plus productives de ce
côté-là, mais nos vagins, ça oui, encore élastiques, encore accueillants, encore
stimulants, encore en état de marche pour nos virils amants qui nous
remplissent de leurs… attributs vaillants qui trouvent là une place de choix,
comme un gant sur mesure pour des doigts exceptionnels de pianiste
virtuose !
Que
vont-elles nous apprendre sur nos conduits intérieurs, ces actrices de tous
âges porte-paroles de la spécialiste en plomberie féminine qui a eu l’idée de
se pencher sur cette partie de notre anatomie dont nous ignorons le physique
mais pas le chimique, quel œil acéré au bout de quel phallus aura fouillé nos
intimités pour mettre ainsi sur papier… puis dans la bouche de toutes ces
célébrités qui se sont succédées depuis des années sur des scènes
internationales ce qui se cache dans nos mines d’or, cavernes à sonder par des
explorateurs partis en longs voyages desquels ils ne reviennent pas tout à fait
pareils, riches de tout cet or accessible juste pour un temps, jamais
longtemps, ils en sortent harassés et ramollis, vaincus toujours, sans la
réponse qu’ils cherchent désespérément : qu’y a-t-il donc au fond du fond
de la mine d’or, même le Priapisme, émissaire de Satan, qui l’a créé pour
l’aider dans sa tâche exploratrice n’a pas trouvé la clef qui ouvre la porte du
bout du paradis du fond du tunnel de nos entrailles !
Le théâtre se remplit de femmes haletantes, dépêchons,
parlez-nous, pressons, pas de nos cons, mais de nos fourreaux chauds qui
attendent, impatients, comme le four du boulanger, qu’on y enfourne des
baguettes pour les rendre craquantes, croustillantes, gonflées de chaleur,
odeurs de douceur, de bonheur, de chaleur ! Quelques hommes sont là, eux
aussi attendent des révélations impudiques, ludiques, lubriques sur les
mystères de nos vagins, Va ! Geins ! Va et viens ! Piaille,
gémis, crie, couine, encore, où est l’or, dis-le moi, dépêche-toi, je viens, où
est la clef, qui ouvre la porte du fond, réponds, vite, oh c’est trop tard, il
faudra que j’y revienne encore, pour ce coup-là c’est encore mort, c’était trop
chaud, trop fort, château-fort, chatte, oh, fort ! Je me trémousse sur mon
fauteuil, j’ai laissé mon homme devant la télé, pas question que tu apprennes
comment je fonctionne, moi, pauvre conne, qui détient entre ses cuisses, en
plus du clitoris, un mystère gagnant, troublant, émouvant, étonnant, grand,
géant qui lui donne le pouvoir, sans le savoir, de te retenir…peut-être ?
J’écoute religieusement…comme une nonne en prière, Jésus
Marie, mais que disent-elles, de quoi parlent-elles ? Des révélations, bon
Dieu, c’est pour ça que je suis là, pas pour qu’on m’assène ce que je sais
déjà, arrêtez de tourner autour du pot… et venez-en au fait, au faîte, au bout
de l’escalade, en-haut du pic, au fond du trou, la clef de la porte !
Je suis rentrée chez moi dépitée, frustrée, comme après un
acte sexuel raté…je n’ai pas trouvé la clé…
-
Ah chérie, tu es rentrée ?
Pourquoi tu as sonné ?
-
J’ai pas trouvé la clé !
-
Raconte, qu’est-ce que j’ai
loupé ?
-
Oh, pas grand-chose… j’ai pas pris
mon pied !
-
Tu viens te coucher… ?
Bretzelde7@orange.fr