Impossible déclaration d’impôts

Février, le mois de la déclaration d’impôts… et de la Saint-Valentin ! Moi, je n’aime pas les chiffres, je préfère les mots, et sur la déclaration d’impôts, il n’y a pas beaucoup de place pour dire tout ce que j’ai sur le cœur, ras le bol de payer un quart de mon petit salaire de fonctionnaire, je sais bien que ça va dans la caisse commune, celle qui aide toutes les personnes dans le besoin, et je suis bonne… citoyenne, mais des gens dans le besoin, il se trouve que j’en connais personnellement, et je préfèrerais nettement leur verser ce quart de salaire directement…mon fils, par exemple, payé au SMIC ou à peu près, qui rame tous les fins de mois qui commencent le 10 et même parfois avant, mais bon, je ne vais pas vous bassiner avec ces considérations et ces préoccupations qui sont probablement les vôtres aussi…

Et donc, comme je préfère les mots aux chiffres, je choisis aujourd’hui, date pas encore limite mais bientôt quand même pour faire ces fichues déclarations, de faire… attention, ce n’est pas mon genre, je ne referai pas ça tous les jours, ni même tous les ans, d’ailleurs, je ne sais même pas si je vais y arriver, tant cet exercice m’est peu familier, mais il faut bien essayer un peu tout avant de vieillir trop et de mourir ensuite… je vais donc tenter de faire une déclaration… d’amour, c’est mieux, non, plus sympa, moins chiant, on s’en fout de ce que j’ai gagné toute l’année, de toute façon il n’en reste rien, et j’ai passé l’âge de travailler plus pour gagner plus, pour quoi faire si c’est pour payer encore plus d’impôts, ça va faire bientôt trente-deux ans que je suis salariée, et je n’aspire plus qu’à gagner plus en travaillant moins, mais on peut toujours rêver, je ne suis pas Carla et je n’ai pas les moyens de Nicolas, ni son énergie, d’ailleurs, ni ses tics de bougeotte busto-têtesque, ben oui, encore un petit néologisme, j’aime bien, pas vous ?

Oui, c’est vrai, je raconte n’importe quoi pour ne pas commencer ma déclaration… c’est intime, ça me gêne, d’étaler tous mes sentiments, mes émotions, mon … amour ! pour cet homme qui me fait tant vibrer depuis près d’un an déjà, même si on passe notre temps à jouer à « Cours après moi que je t’attrape » et « Je t’aime moi non plus »…allez, aidez-moi, on fait comment pour déclarer sa flamme quand on s’est construit pour cacher ce qu’on ressent de peur que l’autre s’en serve comme d’une arme qui se retournerait contre soi ? On peut dire qu’il me fait tellement vibrer que sans lui je me sens paumée, abandonnée, esseulée, fatiguée, vieille et moche ? Comme c’est banal, ça ne le fait pas, hein ? Bon, j’essaye autre chose…quand on se regarde dans les yeux, tous les deux, je crois voir la mer dans laquelle je voudrais me baigner, m’engloutir, me noyer, me fondre, me régénérer ? Pff, dégoulinant de romantisme à l’eau de rose ! Quoi, alors ? Qu’en sa présence, je me sens happée, aimantée, attirée, douce volupté jamais rassasiée ? Ridicule, Bretzel, laisse tomber, tu ne sais pas faire !

Quoi, je ne sais pas faire ? Mais je l’aime !

Quoi, tu l’aimes, alors dis-le, pas besoin d’en rajouter ! Tout ça pour ça !

Non, mais c’était juste une blague, pour voir ce que ça fait, de faire une déclaration d’amour…mais c’est vrai que je ne sais pas faire…

Et ce n’est pas grave… puisque de toute façon, je n’ai pas de mec, alors… !

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