Cafard et bourdon
Ce matin il fait beau,
magnifiquement beau, c’est le printemps, j’ouvre la fenêtre, je hume les
senteurs printanières, les oiseaux chantent, tout est bleu et jaune, les
mimosas sont en fleurs, je me saoule, je me grise, méprise, le gris c’est la
couleur de l’hiver, pas au goût du jour, ça sent la vie et l’amour, mais les
larmes me viennent aux yeux, comme aux petits vieux, quand ils sont sûrs qu’il
n’y a rien dans les cieux, pas de Dieu, pour les faire vivre encore, avant la
mort…
Je change mes draps, il ne
fait pas froid, douce chaleur, coton tendresse, brise, caresse, pas de stress,
je suis en congés, en vacances, vacance, je suis vacante, plus amante, plus
aimante, mon amoureux m’a quittée, cet hiver, amour d’été, amourette d’opérette,
on n’aime pas les veilles nénettes, juste un été, petit coup de cœur, une
erreur, je t’ai fait peur, âme sœur, tu m’as touchée, coulée, c’est le
printemps, mais j’ai cent ans, le temps passe, je suis lasse…
Le spleen me guète,
secoue-toi, nénette, il va faire beau, dehors c’est pas la mort, mais la vie
qui reprend, reprends-toi, reprends toi aussi de ce plat délicieux qu’offre la
vie, il y en a encore, pléthore, va
dehors, sors, mords la vie à pleines dents, c’est le printemps, tu n’as pas
cent ans, allez, vis, vis encore, l’amour n’est pas mort !
C’est quoi ce bruit à ma
fenêtre ? Alors que je me conditionne pour renaître ?… Horreur,
grosse peur, il y a une bestiole, pendant que je m’étiole, qui rigole, t’es pas
drôle, j’me sens toute molle, presque folle, moi qui suis insectophobe, sous
moi le sol se dérobe, me voilà en alerte, au secours, c’est quoi ce machin noir
qui grimpe aux rideaux de ma chambre à coucher ? Grimper aux rideaux, sans
mon autorisation, dans MA chambre, quel culot ! Je me carapace, c’est quoi
cette race, je dois l’affronter, cet effronté, qui vient me narguer, dans mon
domaine privé !
Je m’approche, il tente de
s’enfuir, il est tout noir, il galope, j’ai pas mes lunettes, c’est quoi, cette
bête ? Berk, je te reconnais, envoyé de Satan qui broie du noir, c’est un
cafard !! Haut-le-cœur, je meurs, désarmée, au bord des larmes, je m’arme,
d’un chiffon tueur, meurs, mais pas ici, sors, va dehors, je te chasse,
trépasse, ici pas de place pour des cafards noirs, dégage, j’enrage, rejoints tes
frères, sous terre, pas chez moi, je ne veux pas de ça, casse-toi !
Il résiste, je le piste, je
suis tout près, chiffon et chaussure, je vais t’écraser, pourriture, ordure…
hey, mais quoi, c’est pas un cafard, j’étais dans le brouillard, sans mes lunettes
de star, c’est quoi alors, ce truc qui court et qui fait bzzz ? Oh,
un bourdon… quel con ! Tu t’es perdu, il est où ton cocon ? Hey, mais
c’est pas encore la saison, recouche-toi et dors, dehors, on dirait le
printemps, mais il n’est pas encore temps pour toi de revivre, allez, ouste,
avant que je ne te file une rouste, va-t-en, sors, ou t’es mort !
Ce matin, il fait beau,
magnifiquement beau, ça sent le printemps, pas de cafard, noir, pas de
brouillard… juste un petit coup de bourdon… pardon !
Bretzelde7@orange.fr