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Penser le soin

@Marie Leyreloup

"Ubuntu" est un ancien mot africain employé par Nelson Mandela dans son Autobiography.

 Il  signifie "humanité aux autres".

et également "Je suis ce que je suis grâce à ce que nous sommes tous".




Penser le soin en psychiatrie, cela revient à nous pencher sur l’articulation de plusieurs notions comme le singulier, le collectif et la communauté.

 

Penser le soin dans le travail singulier nous oblige à le penser quasiment en parallèle dans le travail collectif. En effet, dans le cadre de la psychiatrie de secteur, notre travail a ceci de singulier, d’unique,  c’est que même seul, nous ne travaillons jamais seuls…

Cela pourrait être un paradoxe, et pourtant c’est cela  notre quotidien ce va et vient incessant que nous faisons de l’individuel au collectif. Enfin en tout cas, c’est comme cela que je travaille depuis plus de 20 ans.

Pour avancer dans cette réflexion, je vous propose une balade qui commencera par un essai de définition des soins infirmiers en psychiatrie, puis des soins relationnels qui suivra sa route dans les méandres de la distance, celle qu’on décrit comme thérapeutique, et pour terminer la rencontre entre individu soignant, équipe, collectif, et communauté.


Les soins infirmiers en psychiatrie

Les soins infirmiers en psychiatrie s’articulent sur un certain nombre de concepts fondamentaux : une conception de l’homme, de la santé, de la santé mentale, de la maladie et du soin.

Ils s’appuient sur la dynamique des échanges entre l’infirmier et la personne soignée. Cette relation entre deux «autres » est inscrite socialement (il n’y a pas de soins sans institution de soins minimale). Elle s’articule autour d’une demande, celle du patient, de sa famille ou de la société via parfois l’autorité publique et d’une offre, celle de l’institution soignante.

 

Ces soins nécessitent une approche et des réponses adaptées au fonctionnement mental de la personne soignée. Leurs aspects techniques et relationnels visent à rétablir l’intégrité mentale et physique de la personne soignée en l’aidant à découvrir et comprendre ses difficultés et en lui donnant les moyens de les résoudre. Ce n’est pas toujours “faire quelque chose  ” pour ou sur un patient, mais c’est avant tout et surtout lui donner les moyens de retrouver la capacité à faire, pour accéder à  la liberté de faire.

 

Les soins infirmiers en psychiatrie sont adaptés aux malades mentaux et  comprennent, outre les actes relevant des textes relatifs à l’exercice de la profession, des soins spécifiques[1]. La définition de ces soins spécifiques est malgré tout très floue. Elle donne de l’aspect relationnel une définition bien trop vague. « La relation n’est vue que comme une sauce nécessaire pour accompagner le plat et non comme un plat lui-même qui nécessite art et savoir-faire.[2] »

De là vient cette incompréhension entre pouvoirs publics et professionnels de la santé mentale. Les soins relationnels sont des soins hautement techniques qui nécessitent plus qu’un chapitre au cours d’une formation. Il peut être fait autant de mal à un malade lorsque l’on n’a pas perçu les enjeux lors d’une relation qui s’établit que lors de la pose sans asepsie d’un cathéter.

 

Selon Dorothy HALL, infirmière américaine, les soins infirmiers sont une “ activité fondamentalement humaine et procèdent à la fois d’un art et d’une science. Ils font appel aux connaissances et aux techniques tant des sciences physiques, médicales et biologiques que des sciences humaines »[3]

Rappelons nous également que le premier outil du soin dont dispose le soignant en psychiatrie, c’est lui-même, c’est sa propre personne[4].

 

En dehors de ce que nous en disent les textes, les soins infirmiers[5] sont aussi composés d'une multitude d'actions qui sont surtout, malgré la place prise par les gestes techniques indispensables, une multitude de "petites choses" qui offrent la possibilité de témoigner "d'une grande attention" à la personne soignée et à ses proches, tout au long des vingt-quatre heures d'une journée. Ces petites choses, lorsque l’on analyse la relation soignant soigné sont en fait primordiales dans cette relation et dans le “ prendre soin ”. Evidemment elles ne sont pas spectaculaires et en général peu décrites ou peu notées par les infirmiers eux-mêmes, parfois même peu reconnues comme soin, et pourtant elles contribuent de façon essentielle à la santé des individus.

 

Effectivement, il y a des soins qui peuvent paraître plus prestigieux, plus intéressants que d’autres pour lesquels les infirmiers aiment s’impliquer. Nous pouvons évoquer le psychodrame, les entretiens, les packs, les approches groupales, etc… Ces lieux qui ont un cadre, une technique et une intention clairement psychothérapeutique. D’ailleurs souvent ce sont ces actes qui nous permettent de bénéficier d’une reprise, voir d’une supervision. Pourtant, d’autres moments sont précieux dans les soins, ceux de la rencontre au quotidien. Ces instants moins valorisés ont pourtant leurs potentialités psychothérapiques tel une promenade, un jeu, un repas préparé… Il ne s’agit pas de surcharger de sens chacune de nos interactions avec les patients, mais d’y trouver une cohérence qui guide le travail et la pensée d’une équipe[6].

 

Pour penser le soin, il est important de prendre du temps pour la… lecture. Comme nous le rappelle les philosophes : il faut lire les textes pour développer une pensée autonome. Nos formations ne sont pas suffisantes pour nous aider à soigner. Il faut continuer a régulièrement alimenter nos savoirs par des lectures de textes, de revues et de livres. Cela peut se faire en individuel mais aussi en collectif dans le cadre institutionnel.

 

Et puis pour exister, les soins ont également de l’écriture.

 

Nous postulons que toute clinique se constitue à partir de l’observation et de l’écoute mais également à partir de la description de ce qui est observé, entendu, partagé par le soignant et le soigné. Dans ce premier temps du soin, le soignant découvre le patient. C’est à partir de l’écrit qu’il produit de cette rencontre que naît un soin qui permettra au patient comme au soignant de se réapproprier cette part de lui-même qu’il offre à l’autre, de se désengager d’une relation très prégnante pour mieux s’y engager. La subjectivité des écrits, le récit du quotidien que l’infirmier va faire, devraient permettre une véritable pratique de réflexion et de formation.

Ecrire n’est pas facile, la pensée qui peut être fugitive, floue doit être stabilisée. « Ecrire, c’est passer de l’image au concept, de l’impression à la réflexion, de la motivation à l’action durable. Pire, c’est s’exposer, se dévoiler, se dénuder, car la plus sèche des démonstrations implique qu’on y mette du sien, de soi »[7]

Francis Jeanson au Forum « d’Ecrits-Psy » en 1988, disait aux infirmiers « emparez-vous de l’outil de pouvoir, de savoir, de transmission que représente l’écriture… Il vous faut devenir capables de soutenir médiatiquement tout ce qui se vit dans le soin, dans cette relation de sujet à sujet… Le soin ça se parle, ça se défend, ça se formule pour soi et pour les autres… »

Soins relationnels

Il n'existe de soin qu'inscrit dans un espace relationnel, notre pratique infirmière nous le montre à chaque instant. “ C’est cette relation qui devient le pivot des soins en ce sens qu’elle est à la fois le moyen de connaître le malade et de comprendre ce qu’il a, en même temps qu’elle détient elle-même un pouvoir thérapeutique. Elle devient source d’informations pour évaluer l’aide à apporter et elle amène à réfléchir sur ses propres émotions et attitudes qui accompagnent les soins apportés »[8]

 

Un vieux guide du service infirmier (86/21 bis) définissait ainsi les soins relationnels :

"Ce sont des interventions verbales ou non verbales visant à établir une communication en vue d'apporter une aide à une personne ou à un groupe."

 

Je ne sais pas si vous avez lu les différents textes sur la profession. Nos soins doivent souvent «viser » à quelque chose, parfois ce quelque chose serait du thérapeutique…

Nous devons donc viser à établir une communication, qui rappelons le, n’est pas qu’un simple système de question/réponse. Le guide parle d’intervention verbale mais aussi d’intervention non verbale. Cette communication qui s’établit dans nos positionnements, dans nos gestes, nos postures, donc nos façons de dire bonjour, d’accueillir, d’entendre, d’écouter. Entendre le bruissement de l’autre, le mouvement de celui qui est là à côté, tout à côté et qui justement souffre dans et par  sa communication.

Se mettre dans cette posture d’écoute, de communication cela se travaille, cela s’enseigne, cela n’est pas forcément inné. Le simple établissement d’une communication, quelles que soient les techniques mise en œuvre ne suffisent pas pour parler de soin. La communication n’est pas le soin.

 

Pour qu’il y ait du soin encore faut-il que l’intention de soin soit au premier plan et qu’un résultat puisse être apprécié, atteint ou non.

Résultat, bien sûr, dans le monde économique dans lequel nous évoluons, il est devenu nécessaire de pouvoir quantifier, de pouvoir mesurer son travail. Pourtant notre travail psychiatrique relationnel constitue une technique qui s’accommode mal des protocoles et des bilans chiffrés.[9]

 

Soins et Distance

 

Le soin, qu’il soit d’ordre technique et/ou relationnel, doit permettre d’accepter la souffrance du sujet malade, de l’entendre, de ne pas en être submergé.

Une des questions qui nous est régulièrement posées par les futurs infirmiers est celle de la distance… Celle qui serait thérapeutique… ou qui protégerait…

Y a t'il une distance qu'on puisse appeler thérapeutique.

La distance nous renvoie à une dimension spatiale, cela recouvre une notion d'écart, d'intervalle dans l'espace, au propre mais aussi au figuré, à propos du degré de séparation entre deux personnes.


Un anthropologue américain Edward T Hall a fait une recherche sur la façon dont l'homme utilise l'espace : l'espace qu'il maintient entre lui et les autres, et celui qu'il construit autour de soi, à la maison ou au travail. Il a repéré un certain nombre de distance chez tout être vivant : distance publique, sociale, personnelle et intime avec des oscillations et des variations.

 
Le terme distance peut évoquer éloignement, protection, défense. Celui de thérapeutique qui signifie "qui prend soin de" nous enjoint d'aller vers le patient. Et c'est bien de cela qu'il s'agit, de cet incessant va et vient entre éloignement et rapprochement.


La distance ne peut être fixe, elle est en perpétuelle évolution. Elle doit être auto évaluée et réajustée sans cesse en fonction de la dynamique de la relation tant au niveau des messages conceptuels qu'au niveau des messages affectifs.
Les sentiments réciproques des interlocuteurs à l'égard l'un de l'autre, au moment analysé, constituent un facteur décisif dans la détermination de leur distance.

Avoir la bonne distance n'est décidément pas chose aisée, il nous sera toujours impossible de la protocoliser. Le protocole peut pourtant, dans son aspect rituel organiser et régler la distance, par exemple le protocole en vigueur lors de réception d'un chef d'Etat, C'est vrai qu'il s'agit un peu de ça, régler la bonne distance pour qu'il n'y ait pas d'incident diplomatique.


Je pourrai continuer aussi en évoquant la peur, la crainte d'être envahi, d'être dépassé par une relation ou au contraire de la routine de la fossilisation pour éviter qu'il ne se passe rien…

Si l'on cherche constamment à maintenir la distance, si le soin ne s'envisage que sous la forme de la distance, c'est le lien à l'autre que l'on afflige, que l'on attaque.
La distance, les distances tout comme les relations ne sont pas figées mais elles évoluent en parallèle. Entrer en relation avec une personne qui souffre dans ses pensées, c'est un travail d'approche progressif, une mise en confiance, un apprivoisement commun.

Il y a parfois dans nos actes ceux dont on sait qu’ils vont apporter un résultat, et puis il y a tous les autres…

J’ai envie de rebondir sur la nécessité d’une supervision… nous savons bien que nos rejets, nos colères, nos attirances doivent être des matériaux qu’il faut pouvoir accompagner, comprendre voir traiter.

 

 

Soins partagés, de l’individuel au collectif

 

Travailler en collectif permet d’éviter l’enfermement des disciplines dans leurs propres traditions, conceptions et langage. Travailler en collectif ce n’est pas une simple juxtaposition de points de vue.


Pour soigner, le savoir doit être pluriel et partagé.[10] Pluriel car  « il inclut à la fois l’indispensable savoir médical, scientifique et technique mais aussi notre culture sociopolitique, notre histoire, nos propres expériences humaines, mais encore et toujours le savoir du malade expert de sa maladie. »

Partagé car « le savoir se nourrit de la confrontation entre les soignants et les soignés ».

La démarche soignante ne pourra donc pas s’attacher seulement à une pathologie ou un symptôme, elle tiendra compte nécessairement du patient à ce moment de son histoire. Les soins s’inscrivent dans la durée tant il est vrai que nous nous occupons de patients ayant des affections chroniques. Mais le soignant intervenant à un moment donné, doit sans cesse faire des allers et retours entre histoire et présent, entre hier et maintenant

 

La force de la psychiatrie de secteur a été et reste encore aujourd’hui le concept d’équipe pluri-disciplinaire. Cette équipe chargée de la continuité des soins, de la prévention au suivi. Continuité des soins qui ne peut s’opérer qu’avec l’environnement humain des personnes.

 

Le concept d’équipe pluridisciplinaire a permis à chacun de prendre place dans l’échiquier du soin. C’est sur la dynamique d’équipe qu’il fondait son terreau, tous et tout participait du et au soin. Il reconnaissait bien avant la promulgation de la loi de 2002 …la place centrale du patient dans sa prise en charge.

Quant est-il aujourd’hui quand chaque corps de métiers se trouve divisés, saucissonnés, ne relevant pas des mêmes hiérarchies. Quant est il des formations initiales et continues qui sont si disjointes, avec si peu de passerelles et si peu de liens ?

A la simple juxtaposition de plusieurs disciplines, il faut substituer leur dépassement simultané au service d’un objectif commun. Travailler en équipe de secteur suppose qu’on puisse se référer à ce projet commun. Le projet de secteur[11] se définit comme l'ensemble des objectifs globaux que l'équipe pluridisciplinaire se propose d'atteindre avec les moyens dont elle dispose, sous la responsabilité du praticien, chef de secteur, en référence au projet d'établissement. Le cadre infirmier supérieur, en liaison avec les cadres de proximité et le personnel du service infirmier du secteur adapte et oriente le projet du service infirmier. Il en est le garant.

Ce projet se décline également pour chaque lieu de soins : il prend en compte l'analyse des besoins des personnes soignées et permet l'adaptation de la structure concernée. À partir de ces données, il est élaboré par l'équipe pluridisciplinaire et constitue un des maillons du projet de secteur. Dans la mise en œuvre et l'accomplissement de ce projet le cadre soignant, garant de cette démarche, doit prendre en compte les espaces et les plannings pour gérer les soins et les activités, évaluer et procéder aux réajustements nécessaires.

 

Et bien évidemment au final sera élaboré le projet thérapeutique individualisé en concertation avec la personne soignée. Ce dernier permettra de planifier, d’agir et d’évaluer les actions au vu des résultats. Le principe du projet thérapeutique individuel repose sur sa cohérence et implique la nécessité de soignants référents.

 

Il est aussi nécessaire de prévoir la mise en place de tout un arsenal à disposition du soignant pour contrôler sa pratique, discuter ses actions, évaluer son travail. Dispositifs auxquels les textes ne font pour ainsi dire pas référence. Du coup il est laissé à l’appréciation de chaque service la mise en place de  réunions cliniques, supervision, contrôles qui pourtant sont tout aussi importants et aussi indispensables que le fait de se laver les mains avant un soin.

 

Il est vrai que depuis plusieurs années nous avons été amené à emprunter à nos amis de Dax une conception du travail en psychiatrie.. Les trois niveaux sont indissociables nécessaires pour que le travail thérapeutique puisse être satisfaisant

 

1)     le travail de l’équipe sur elle-même

2)     le travail de l’équipe dans la communauté

3)     le travail thérapeutique

Les deux 1er niveaux de travail nécessitent une volonté institutionnelle claire, afin de dégager le temps nécessaire à leur exercice.

 

 

Soins dans la communauté



Le soin en psychiatrie s’exerce à l’hôpital, mais aussi dans de nombreuses structures à l’extérieur de l’hôpital, au cœur de la cité et au domicile du patient. Ce sont les liens entre ces lieux, entre ceux qui y travaillent qui créent une unité dans le soin mais c’est aussi le lien qui va faire soin.

La circulaire de 1987 relative à la planification en santé mentale utilise pour la première fois le mot « communauté » : « il est impératif aujourd’hui d’envisager les problèmes de santé publique sous un angle élargi et selon une conception positive et dynamique de la santé : en cherchant à promouvoir des facteurs de santé, en s’intéressant davantage aux aptitudes des individus et des groupes vis-à-vis de leur santé. Pour ce faire, trois niveaux sont à considérer : l’individu, la famille et le groupe social ou communauté ».

 

Le soin n’a de sens qu’inscrit dans une dynamique pluridisciplinaire, c’est à dire en collaboration étroite avec tous les acteurs du soin. Cette pluriprofessionnalité est d’une grande richesse entre les mains d’une équipe qui sait mettre en valeur leurs différences sans les hiérarchiser. L’égalité des soignants ne saurait se situer dans l’annulation de ces différences.[12]

La pluridisciplinarité s’étend d’ailleurs à des membres n’appartenant pas toujours à l’institution, l’équipe intègre de façon temporaire autour d’une prise en charge particulière d’autres professionnels (médecins généralistes, infirmières scolaires, personnels de maison de retraite, association d’hébergement etc.) Elle travaille également de plus en plus avec les associations de patients, de famille de patients, mais aussi avec les personnes de la cité (hommes politiques locaux, associations etc.). Cette évolution des pratiques se retrouvent dans la notion de réseaux de soins et va permettre à l’infirmier de se décentrer encore plus de ses lieux de fonctionnement habituel.

 

Les liens ainsi créés vont transformer cette pluralité d’intervenants en un nouveau groupe, un collectif. Rien n’est encore parfait dans ces nouvelles rencontres entre les acteurs des différents champs (sanitaire, social, médico-social).

Il faut se donner les conditions pour pouvoir se découvrir réciproquement. Il faut aussi nous « dévoiler », sans avoir peur de perdre nos identités respectives.

 

Il est alors question de « Mobilité, souplesse et dynamisme du fonctionnement et de l’organisation de chacune des équipes, diminuant ainsi les risques de rigidification, voire de pétrification d’un service qui se doit, plus que tout autre, de restituer au sujet sa capacité de changement de vie. En somme, « rendre possible l’existence de lieux et d’organisation où la fécondité innovatrice et l’invention soient reconnues comme un principe essentiel »[13]

 

C’est la circulaire de 1990 qui affirmera de manière plus décisive cette nécessité de travail dans et avec la communauté, particulièrement avec les professionnels du champ sanitaire et social susceptibles de s’occuper, à un moment ou à un autre de leur parcours, des patients de la psychiatrie. Elle prévoit, entre autres choses, la création de conseil de secteur – pratiquement jamais mis en œuvre sur le terrain – regroupant divers acteurs de la communauté du secteur.

 

Sur le secteur où je travaille nous avons mis en place un conseil local de santé mental ouvert à tous et qui regroupe outres les professionnels de la santé, les politiques, les associations s'occupant de précarité, d’hébergements, ainsi que celles de familles et de patients, les pompiers, les gardiens de la paix, les PMI, les tuteurs, l'école, la justice… Ce conseil permet d’ajuster au mieux demande et offre de soins mais permet aussi une meilleure connaissance des partenaires et des politiques du terrain. Il permet d’agir en amont et en aval d’une hospitalisation et de faire connaître aux populations du secteur le travail de la psychiatrie et de ses membres.

Et puis tout simplement que la psychiatrie soit au plus près, au contact avec la cité, avec sa population. Cela demande à chaque membre de l’équipe qu’il puisse définir de façon compréhensible sa fonction et la fonction de la structure où il travaille.

 

Il nous appartient au quotidien, de tout faire pour que nos travaux soient complémentaires et soient relayés en sachant qu’on ne peut pas s’occuper de tout mais qu’on doit « se préoccuper de tout » comme nous l’a appris Francis Jeanson.

 

Ceci dit, il faut aussi prendre en compte le potentiel thérapeutique de la cité. Celui-ci semble un peu mis à mal et la demande sociale serait plus du côté de l’enfermement, de la protection et du contrôle que du côté du soin. Nous avons peut être là aussi un rôle à jouer en ré-affirmant notre rôle soignant.

 

 

Conclusion

 


La question du soin et du thérapeutique c'est avant tout une histoire d'engagement humain.

L'engagement est pour nous, la base de tout travail soignant.

Nos outils de travail[14], ce sont nos attitudes, nos pensées et nos émotions, tout ce qui nous constitue en tant qu’être humain.

Alors évidemment, quand nous nous engageons nous prenons obligatoirement des risques. Le premier risque c’est d’exister face à l’autre.

Si en tant que soignant, l’institution nous soutient dans le risque que nous prenons dans la rencontre avec l’autre, le soin sera alors possible.

Prendre soin, c’est donc assumer notre métier pour en faire peut être le dernier rempart face à l’indifférence de notre monde, le dernier refuge de l’humanité de notre société.

 



[1] Guide du service de infirmier “ L’évolution des orientations en santé mentale et la fonction infirmière 

[2] DIGONNET (E) LEYRELOUP (AM)  Pratique de l’entretien infirmier, collection souffrance psychique et soins, Editions Masson,  Août 2001.

[3]  HALL (D), Le point des soins infirmiers in revue de l’infirmière n°7, juillet 1990

[4] BERNARD (J.C), Le soin infirmier en psychiatrie, in Soins Psychiatrie, n°130/131, Août-Septembre 1991.

[5] HESBEEN (W), Prendre soin à l'hôpital, inscrire le soin infirmier dans une perspective soignante,

InterEditions, Masson,  1997, p.45

[6] MIAZZA (M) PANCHAUD (R), Il y a de l’or dans le soin ! in Santé Mentale n°85 février 2004. p 36

[7] WALLER (S), Lire, écrire dans la vie professionnelle, in Soins Formation, Pédagogie , Encadrement, n°24, 4ème trimestre 1997, p.7.

[8]  COLLIERE (MF) Promouvoir la vie, de la pratique des femmes soignantes aux soins infirmiers, Inter-éditions, Paris.

[9] SASSOLAS (M) L’éloge du risque dans le soin psychiatrique, Erès, 2006

[10] PABOIS (AM) Quels savoirs pour soigner ? Dossier n°18, Pratiques les cahiers de la médecine utopique, juillet 2002, p.5.

[11] RÉFÉRENTIEL DES SOINS INFIRMIERS EN SANTÉ MENTALE http://www.serpsy.org/formation_debat/REFERENTIEL.html

[12] BAILLON (G), Les urgences de la folie, l'accueil en santé mentale, Gaétan Morin Editeur, Collection des pensées et des actes en santé mentale, novembre 1998, p.157

[13] Rapport Demay, 1982, « Une voie française pour une psychiatrie différente »

[14] SASSOLAS (M) op.cit



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