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LA FONCTION CADRE DE SANTE

 

En guise d’introduction

 

Nous sommes dans une époque où l’hôpital public est en passe, si ce n’est déjà le cas, d’être « géré » comme une entreprise. Nous sommes dans une époque où les dimensions comptable, gestionnaire et économique prennent de plus en plus le pas sur la dimension humaine et inter subjective. Nous sommes dans une époque où les soignants sont de plus en plus en souffrance face à l’augmentation de la charge de travail et des responsabilités, sans qu’il y ait augmentation de la reconnaissance sociale. Nous sommes dans une époque où il est de plus en plus demandé au cadre de santé de n’être qu’un « manager », à l’instar des cadres d’entreprise.

En ces temps de profonde mutation, à laquelle les cadres n’échappent pas, revenons quelque peu sur cette « fonction cadre de santé », auprès d’une équipe de soins, en théorisant un tant soit peu sur ce qu’elle peut recouvrir.

La fonction cadre est directement liée à la notion de responsabilité. Non pas que cette notion soit spécifique à l’encadrement, mais, dans ce cas précis, elle est beaucoup plus étendue que par rapport à d’autres fonctions et d’autres statuts. Cette responsabilité s’exerce dans un environnement soumis à de nombreuses contraintes, qu’elles soient économiques, institutionnelles, réglementaires, relationnelles, cliniques, environnementales et spécifiquement liées à la notion de service public.

Sans prétendre à l’exhaustivité, intéressons nous donc à ce qui nous semble constituer quelques composantes de cette « fonction cadre ». Pour effectuer ce travail, nous allons utiliser, en grande partie, la notion de métaphore.

Notion entendue au sens commun qui est un procédé linguistique et rhétorique par lequel on utilise un mot dans un contexte qui ne convient pas à son sens propre, en lui donnant un sens qui repose sur une comparaison sous entendue. Effectivement, lorsque nous parlerons de la métaphore du tableau, cela ne voudra pas dire qu’une équipe de soins est un tableau, mais que nous pourrions dire qu’elle pourrait être comparée, par certains aspects, à un tableau. De la même manière, quand nous parlerons de métaphore paternelle ou de fonction maternante, il ne s’agira bien sûr pas de situer le cadre de santé comme un père et une mère réels pour l’équipe qu’il encadre.

Mais aussi, notion entendue dans son acception psychanalytique et lacanienne. Ici, il s’agit d’un mécanisme actif dans les formations de l’inconscient, c’est un « mot qui vient à la place d’un autre ». Elle est équivalente au mécanisme de condensation décrit par Sigmund Freud et qui a pour fonction de symboliser le désir inconscient en évitant la censure. Ici, la métaphore est directement liée à la symbolisation, à quelque chose qui vient symboliser, représenter, autre chose. Il est bien question de la substitution d’un signifiant à un autre, nous pourrions aussi bien parler de transfert de dénomination.

 

Le cadre maternant.

 

Ici, nous nous aiderons de la pensée du psychanalyste britannique Donald Woods Winnicot. Selon sa terminologie, le « handling » est la façon adéquate de manipuler et de soigner corporellement un bébé, qui favorise plus particulièrement, dans son développement spontané, le processus de personnalisation. Cette fonction naît de l’identification de la mère à son nouveau-né, qui la rend capable de s’adapter à ses tous premiers besoins de manière presque parfaite. Toujours à la suite de Winnicot, le « holding » vient désigner la façon dont la mère, par sa présence, ses gestes, apporte à son enfant une sécurité psychique et physique suffisante. C’est ce qui va l’aider dans son développement à construire un « moi fort ». La mère assure ainsi une cohésion aux différents états sensori-moteurs de son enfant et une protection suffisante contre les angoisses d’annihilation du « self ». Elle lui assure ainsi un sentiment de sécurité fondamental, base de la force du moi. Ce « holding » soutien bien l’établissement d’un « self unitaire » vécu comme continuité d’existence.

 

Utiliser la métaphore, c’est dire à nouveau que le cadre n’est absolument pas à assimiler à une « mère réelle ». Cependant, nous voyons bien les analogies : favoriser le processus de personnalisation, s’adapter aux besoins, apporter de la sécurité psychique et physique, aider à se structurer, protéger contre les angoisses d’annihilation, assurer un sentiment de sécurité dans une continuité d’existence.

Dans son quotidien, le cadre de santé  a l’occasion, à maintes reprises, d’assurer toutes ces fonctions et de remplir tous ces objectifs.

En effet, une équipe de soins nécessite une « personnalité » cohérente. Les effets, sur les prises en charge, sont désastreux quand chaque membre d’une même équipe « tire à hue et à dia » et dont ces mêmes membres fonctionnent comme des agrégats sans liant. Une équipe a besoin de se développer, d’évoluer et cela nécessite de la structuration.

En effet, les équipes ont des besoins et, après les avoir évalués, il convient d’en satisfaire un certain nombre dans le but de créer des conditions de travail les plus optimales possible afin que le contexte professionnel soit plutôt épanouissant.

En effet, pour bien travailler, une équipe a besoin de sécurité et d’être protégée contre les angoisses. Dire que le travail soignant nécessite de la sérénité est une tautologie et pas grand chose de pertinent est possible quand un groupe humain vit en permanence dans la peur du lendemain, dans l’insécurité, en se demandant ce qu’il va devenir et si sa continuité sera bien assurée. D’autre part, il convient, bien sûr, d’assurer une sécurité physique car la peur est l’ennemie de l’efficience.

 

Le cadre paternant

 

Ici, nous faisons référence au « Nom-du-père » lacanien. Il a une fonction symbolique, celle de conférer à l’enfant, lors du passage de l’Œdipe, un repère psychique structurant. Il s’agit d’une métaphore qui est une substitution du signifiant « désir de la mère » à un autre signifiant, le « Nom-du-père ». C’est la loi qui sépare l’enfant de la relation fusionnelle et mortifère qu’il entretien avec sa mère (être tout pour elle, le phallus), cette même loi renvoyant à la castration symbolique. Cette métaphore sera donc réussie s’il y a élision du désir de la mère. Ce désir supprimé (mis en suspension) fera apparaître, pour l’enfant, ce qui est désirable. Il pourra acquérir sa place singulière dans la triade familiale ainsi que dans l’ordre de la société. Cela consiste principalement en la mise en règle du sujet avec son désir, au regard du jeu des signifiants qui l’animent et constitue sa loi.

Ce « Nom-du-père », cette métaphore paternelle vient inscrire le sujet dans l’ordre de la loi, de la loi du signifiant et de la parole. Il s’agit, en proclamant l’interdit de l’inceste, de poser les limites entre ce qui est permis et ce qui ne l’est pas. C’est bien la fonction de l’interdit, de « l’inter-dit », au sens de quelque chose qui est dit entre deux personnes, qui vient marquer des limites et des bordures qui évitent au sujet de se situer dans la psychose et, ainsi,  d’être sur une position de « tout est possible ». Ainsi, sera instituée la parole sous les effets du refoulement et de la castration symbolique, condition sans laquelle un sujet ne saurait valablement assumer son désir dans l’ordre de son sexe. Se trouveront rassemblés, sous ce « Nom-du-père », l’instance du désir et de la loi qui l’ordonne sur le mode d’un devoir à accomplir. Ceci étant, les lois du langage sont alors accessibles, permettant des rapports sociaux adaptés.

Le « Nom-du-père », c’est le père au titre de sa fonction symbolique de castration. Autrement dit, dans l’ordre du langage, il instaure la limite, la coupure. Quand cette fonction est défaillante, nous parlons alors de « forclusion du Nom-du-père ». Dans ce cas là, la loi du père est rejetée par l’enfant, le sujet est privé de toute base symbolique. Il devra affronter un Autre tout-puissant qui l’utilise comme objet de sa jouissance, c’est la psychose car cela signe bien l’absence de l’appui du symbole dans la chaîne signifiante. A cette place, il y a un trou ouvert dans le symbolique par l’effet de cette forclusion. Dans cette conjoncture, puisque le père n’est pas un signifiant, il ne peut être qu’une figure imaginaire à laquelle le symbole ne peut faire limite. C’est pourquoi le rapport sans mesure du sujet avec lui se trouve situé « dans l’ordre de la puissance et non pas dans l’ordre du pacte ». La forclusion est bien une carence de l’effet métaphorique du « Nom-du-père », provoquant un trou béant dans la chaîne signifiante.

En effet, c’est bien au cadre de fixer ces limites inhérentes à la loi. C’est bien au cadre à interdire et à «inter-dire », afin que l’équipe ne se situe pas dans cette jouissance liée à la toute puissance qui est si mortifère. C’est ce que fait le cadre, par exemple, quand il véhicule un discours centré sur l’éthique dans le soin, dans la relation soignante et dans les relations entre collègues de travail. C’est aussi ce que fait le cadre quand il fait référence aux contraintes liées à l’institution d’appartenance, aux obligations de service public et aux impératifs législatifs qui sont les nôtres.

 

Rapport à la loi – le cadre castrateur

 

Pour la psychanalyse, la loi est une prescription symbolique réglant, par ses effets sur la jouissance et le désir, l’existence même d’un ordre humain et d’une subjectivité.

Pour Sigmund Freud, la loi est liée à l’interdit de l’inceste, dont il souligne le caractère universel. Indissociable du complexe d’Œdipe, la loi, au sens freudien, fonde l’ordre de la culture et la possibilité de la filiation.

Comme nous l’avons déjà vu, Jacques Lacan a insisté sur la dimension du père symbolique, tout autre que le père imaginaire (le rival) ou le père de la réalité, et fait de la loi une logique de déplacement du phallus et du réglage de la jouissance. La loi du père, dont le père réel est l’agent et la mère réelle le vecteur, consiste à signifier à l’enfant l’interdiction de prendre sa mère pour objet de jouissance, le confrontant ainsi à la castration symbolique qui lui fait abandonner le désir d’être le phallus de la mère et passer du registre de la jouissance à celui du désir. Cette loi n’a d’efficacité que si la mère, elle-même,  reconnaît au père dans sa parole la place de celui qui fait la loi.

La notion de castration symbolique a été introduite par Freud et Lacan. Pour l’un comme pour l’autre, la castration symbolique permet le passage d’une relation duelle à une relation triangulaire, la reconnaissance de la différence sexuelle et de la différence des générations. Lacan ajoute que l’acceptation de la castration se fait par la reconnaissance de la loi paternelle tant du coté de l’enfant que de celui de la mère. La castration est donc bien une opération symbolique, une « amputation symbolique » dira Lacan, qui détermine une structure subjective normée. Comme nous l’avons vu, elle est directement liée à l’interdit de l’inceste qui correspond à la métaphore paternelle qui vient bien, elle même, positionner un « inter-dit » et un interdit entre la mère et son enfant. C’est cet interdit qui est constitutif du sujet « normé ». Cette interdiction est bien le fait du père symbolique, c’est-à-dire d’une loi dont la médiation doit être assurée par le discours de la mère. La castration porte sur le phallus en tant qu’il est un objet non pas réel, mais imaginaire. A partir du moment où l’enfant renonce à être le phallus, il pense que c’est le père réel qui l’a, plus exactement qui est supposé l’avoir. Alors, à la suite de la castration, l’enfant va pouvoir s’identifier au père. La castration implique donc le renoncement à être le phallus, mais aussi à l’avoir, c’est-à-dire à s’en prétendre la maître. Cette castration est bien normalisante puisqu’elle interdit l’inceste et qu’elle fait entrer le sujet dans l’ordre du langage, de la chaîne signifiante. Mais, cette même castration est celle du « manque qui crée le désir ». En effet, il ne peut y avoir de désir sans manque car, là aussi c’est une tautologie, comment désirer quelque chose qui ne nous manque pas ; de la même manière que pour chercher quelque chose, encore faut-il ne pas l’avoir ou ne pas savoir qu’on l’a. La castration, de ce fait, règle les modalités de la jouissance en instaurant un manque symbolique. C’est bien ce manque qui doit être symbolisé et nous savons maintenant qu’aucune symbolisation n’est possible sans l’efficacité de la métaphore paternelle et du « Nom-du-père ».

En clair, la castration symbolique équivaut à : tout n’est pas possible, je ne suis ni tout puissant, ni omniscient et je ne détiens pas, à moi tout seul, La Vérité absolue.

Quelle belle fonction que celle là qui doit être, bien entendu, assurée par le cadre.

 

La fonction cadre comme métaphore du tableau

 

La fonction cadre peut, allégoriquement, correspondre à la métaphore du tableau.

D’aucuns soutiennent que le cadre de santé ne fait pas partie de l’équipe de soins dont il a la responsabilité, nous nous inscrivons radicalement en faux par rapport à cette affirmation. Effectivement, comment soutenir qu’il ne fait pas partie du tableau ?

Alors, nous affirmons que le cadre fait partie intégrante du tableau, il en est même un constituant essentiel. Même quand ce cadre n’est pas explicitement matérialisé, il existe bel et bien et il est quand même largement présent, au travers de la notion de bord, de bordure. Cette bordure est bien ce qui vient marquer une frontière, c’est le point de butée de la toile.

Avec ce bord, le cadre vient donc marquer une limite, il positionne, de ce fait, un intérieur et un extérieur. Le cadre et tout ce qui est dedans est le tableau, tout ce qui est à l’extérieur de ce cadre n’est plus le tableau. Un tableau sans cadre serait soit rien, soit l’infini, ce qui, dans les deux cas, n’en font certainement pas un tableau.

D’autre part, l’absence de cette bordure pointerait une indifférenciation entre intérieur et extérieur venant signifier une sorte de « melting pot » où la notion même d’identité serait en grand péril. Pour qu’une identité vienne faire trace, cette différenciation est non seulement nécessaire, mais essentielle et primordiale. Donc, sans cadre, sans bordure, point de tableau, donc pas d’inscription dans une identité et, disons le, pas de sens.

Le cadre est donc intimement lié à la notion de limite, il pose la limite, il la dit et il l’« inter-dit ». Il est donc en étroite relation avec la fonction symbolique telle que nous l’avons quelque peu approchée et telle que nous la propose l’enseignement de Jacques Lacan. Ici, rappelons simplement que c’est lorsque cette fonction symbolique est défaillante, dysfonctionnelle, que peut apparaître la psychose.

Alors, n’hésitons pas à dire que la fonction cadre est éminemment nécessaire, au sens philosophique c’est-à-dire contrairement à ce qui est contingent, à une équipe de soins.

Une des fonctions majeures du cadre peut être de rassembler ce qui est épars, en animant l’équipe et, donc, en y mettant du lien, de l’échange, voire de la respectueuse polémique. N’oublions pas que, majoritairement, c’est ce qui constitue nos différences, les uns par rapport aux autres,  qui nous enrichit. Encore faut-il avoir la possibilité de transmuer la polémique en décision participative et collective, en énergie constructive.

De la même manière que pour le tableau, le cadre de santé fait partie de l’équipe soignante et il ne doit pas se situer uniquement dans des fonctions administrative et gestionnaire. Avant tout, le cadre de santé est un soignant et même s’il se situe plus dans la notion de « soins indirects », il est véritablement le responsable, globalement, de cette fameuse « qualité des soins » dont on parle tant, à juste titre.

Mais, plus que tout, le cadre de santé est responsable de la réflexion éthique qui doit nécessairement être liée aux soins et aux relations soignantes, mais aussi aux relations entre les différents professionnels constituant l’équipe. Ceci au quotidien, afin que cette réflexion éthique ne se situe pas uniquement dans le monde des idées, mais soit accompagnée d’une traduction et d’une application concrète, donc d’une praxis, jour après jour.

 

Le cadre de santé comme garant de l’éthique

 

Quand nous parlons d’éthique, de quoi parlons nous ? Ce qui va suivre va tenter d’aborder quelques pistes de définition, sachant qu’il s’agit d’un questionnement qui doit être toujours en mouvement. Nous allons prendre le temps de nous arrêter quelque peu sur ce concept car nous considérons qu’il constitue la pierre angulaire, la clé de voûte du travail soignant, ainsi que de la fonction cadre de santé, quel que soit le lieu d’exercice. A la suite de ce point de départ, nous affirmons que la promotion et la mise en oeuvre, par le cadre de santé, d’une réflexion éthique quotidienne, avec l’équipe pluridisciplinaire, est un impératif et un devoir.

Dans ce cadre là, le questionnement éthique se doit d’allier au moins quatre impératifs :

La prise en compte du sujet au travers d’une offre de soins efficiente et de qualité. La législation relative aux droits des malades, de leurs familles et de leurs entourages. Le principe de réalité socio-économique que représente la politique nationale de santé liée à la psychiatrie. Le nécessaire questionnement de l’institution sur ses propres pratiques, aussi bien en interne qu’en externe.

Si depuis bien des années, l’évolution de la psychiatrie était avant tout due à la volonté, aux savoirs et aux connaissances des soignants ; actuellement, et pour un temps certain, elle est intimée par la primauté de l’économique sur l’Humain et par les règles du fonctionnement d’entreprise. Dans cette nouvelle conception de « production de soins », il est possible de craindre que s’évanouissent bien de nos repères et positions éthiques et théoriques. Mais aussi, apparaît la crainte que le sujet s’efface ; que l’être du malade ne soit plus que réifié, ou pire, « tarifié » ; que l’écoute, au sens de faire advenir la parole du patient, se dérobe pour laisser place à un trop plein de protocoles et d’actes codifiables.

L’éthique a pour objet le domaine de la pratique humaine en tant qu’action reposant sur une décision, impliquant, le plus souvent, une praxis. Les questions fondamentales de l’éthique concernent le bien qui doit déterminer la conduite et l’action de l’être humain. Son but est d’établir les fondements d’un agir et d’une vie en commun justes, raisonnables et remplis de sens. Les principes et fondements de l’éthique doivent être perceptibles de façon universellement valable et raisonnable, sans référence à des autorités ou conventions extérieures. C’est pourquoi elle adopte, vis-à-vis de la morale en vigueur, un point de vue distancié et critique.

L’aspiration à la totalité (au sens d’une ingérence complète dans la vie du sujet) contient, en soi, la potentialité du totalitarisme et conduit à une véritable réduction de l’autre au même, c’est-à-dire à un égocentrisme totalitaire, où le singulier n’est plus respecté dans son altérité, ni dans son originalité irréductible. Ainsi se révèlent les causes de l’abandon de l’espace intersubjectif, de la relation à l’autre et, donc, de l’éthique.

Alors, le point de départ de la relation éthique est le face-à-face, c’est-à-dire la rencontre du je avec autrui. L’apparition d’autrui me confère une responsabilité. Dès lors que l’autre me regarde, est en relation avec moi, je l’assume. J’assume sa faiblesse, sa fragilité, sa vulnérabilité, sa faillibilité qui font, entre autres, sa spécificité d’Humain. Une relation se noue, constituant le fait originel de la fraternité et engage ma liberté. « Je suis responsable d’autrui ». Cette responsabilité est initialement un « pour autrui ». Ici, l’éthique se hausse au niveau d’un absolu qui règle l’existence et désigne la relation à l’autre comme l’une des modalités de l’être.

De manière plus globale, la sectorisation demeure le meilleur dispositif pour accompagner tous les patients, sans aucune discrimination. Ceci dans un temps qui est moins « sous contrainte de rapidité », notamment pour le secteur extra hospitalier, mais aussi dans leurs environnements propres, avec des équipes soignantes de qualité. Effectivement, si l’inconscient est intemporel, patients et soignants ont besoin de temps. Besoin qui devient de plus en plus difficile à satisfaire par faute de places à l’hôpital, et par dilution des missions en extra hospitalier.

De plus en plus, les établissements psychiatriques et les soignants qui les occupent sont poussés à une obligation de résultat chiffré, codé et quantifiable, déjà appliquée dans bon nombre de disciplines médicales et soignantes. La psychiatrie publique doit, en partie, s’affranchir de ce dictat. Ceci pour au moins deux raisons : premièrement, la fonction publique hospitalière dont nous faisons partie doit, prioritairement, au service du public, quel qu’il soit, au-delà de ces notions de chiffrage de codification et de quantification ; deuxièmement, du fait même de la spécificité de la psychiatrie avec son rapport privilégié à l’inconscient qui, généralement, s’accommode bien mal de ces logiques du tout codifiable. L’inconscient n’est ni chiffrable ni quantifiable, le sujet ne peut ni ne doit être réifié, au risque d’être nié, ainsi, notre éthique soignante, c’est la relation.

De plus en plus de demandes sont adressées à la psychiatrie, tant par des institutions, des administrations que des particuliers. Les limites de notre champ d’action sont sans cesse repoussées. Mais toutes ces nouvelles demandes sont-elles toujours de notre ressort ? La psychiatrie est une spécialité médicale dont l’objet est : « les maladies mentales ». Pour maintenir la pertinence d’une approche globale, il est essentiel de continuer à amplifier une approche pluridisciplinaire (sciences humaines, philosophie, sciences sociales …), pour une meilleure lecture des problématiques psychiatriques. Cependant, force est de constater que la notion de « santé mentale » devient de plus en plus envahissante, diluant notre mission fondamentale. Toute souffrance psychique n’est pas à psychiatriser, la majorité des deuils sont normaux et la vie n’est pas toujours un long fleuve tranquille. Mais, ce n’est pas pour autant que la réponse, si tant est qu’il soit nécessaire d’y en avoir une, à ces éventuelles difficultés doive être psychiatrique.

Peut-être devrions nous être parfois plus vigilants quant au fait de pouvoir dire non à certaines demandes, tout simplement parce qu’elles ne relèvent pas de notre spécificité ; mais aussi parce que le non peut être constitutif d’une nouvelle adresse, plus adaptée, pour ces mêmes demandes.

De plus en plus, nous sommes confrontés au risque de la « normalisation », de la « remise aux normes sociales » du patient au détriment du soin réel et du respect du sujet. Ici, la dimension éthique apparaît on ne peut plus clairement. La psychiatrie ne doit pas viser à une norme sociale, elle ne doit pas être moralisatrice et elle ne doit pas entrer dans le discours du maître, prescrivant à ses sujets/patients la meilleure manière de jouir de la vie.

Alors, la dimension éthique est liée à notre capacité à nous interroger sur nos propres projections, en tant que soignants, mais aussi en tant qu’institution. Vouloir à tout prix le bien d’autrui, être persuadé de détenir ce bien et vouloir l’imposer à l’autre est une démarche qui se situe aux antipodes d’une vraie démarche éthique ; cela se nomme le contrôle, la maîtrise, pouvant rapidement dériver au totalitarisme, à la dictature, à la tyrannie.

De plus en plus, nous devons nous interroger sur la demande de soins du patient psychotique, du désir du schizophrène ou du dépressif. En effet, contrairement aux pathologies somatiques, c’est souvent un autre que le patient qui demande. Et même si c’est le patient qui demande, sait-il ce qu’il désire ? Parfois le sujet ne demande rien alors que nous sommes persuadés, ou du moins nous croyons être persuadés, qu’il a besoin de soins ; parfois c’est vrai, mais parfois … …

Alors, intervenir, ne pas intervenir, se substituer, ne pas se substituer, décider pour autrui ? Pourquoi ? Comment ? Pour qui ? Depuis peu, tous ces questionnements soignants sont à prendre en compte en intégrant les nouvelles dispositions légales concernant les malades, leurs familles et leurs entourages. Ainsi, la dimension juridique est de plus en plus importante. Sachant que, parfois, nous sommes amenés à prendre des décisions allant à l’encontre de nos valeurs éthiques personnelles (isolements, contentions, hospitalisations sous contrainte, limitations des heures de sortie …), mais pourtant frappées par le sceau de la nécessité de soins.

Dans un au delà de la dimension individuelle de l’éthique, nous affirmons qu’un centre hospitalier psychiatrique, s’il souhaite prendre en compte de manière la plus globale possible, l’interrogation éthique, se doit de s’interroger sur les relations entre l’institution et les individus qui la constituent, mais aussi avec l’ensemble de ses partenaires extérieurs, notamment sur la place réelle qui est laissée aux familles des patients, leurs entourages, les associations d’usagers. C’est la raison pour laquelle il est judicieux de réinterroger la notion de psychothérapie institutionnelle. Effectivement, par delà certaines modes qui parfois caractérisent certains mouvements de pensée, c’est un moyen pertinent permettant à l’institution de réfléchir sur ses pratiques.

 

L’éthique de la rationalité et du devoir avec Emmanuel Kant

Très rapidement dit, c’est une conception universelle de la morale qui fait de l’Homme un être totalement libre et capable de bien agir par le recours à la seule puissance de sa raison. Enoncée à priori, c’est-à-dire indépendamment de l’expérience, la loi universelle de la raison pratique constitue la norme entre le bien et le mal.

 

Critique de cette morale kantienne par Jacques Lacan

Il y a un aspect de l’acte qui paraît tenir au sujet solitaire. C’est même, croit-on, ainsi que l’on repérerait ce qui serait vraiment un acte. L’acte d’un sujet, c’est qu’il l’accomplirait dans une certaine solitude et à son initiative. Par opposition aux actions qu’il peut faire, motivé par d’autres. L’acte se jugerait à son lieu d’émergence, à savoir au niveau du sujet. Certes, cela compte, mais ça n’est pas l’essentiel. Or, Lacan y implique la suite. Il inscrit l’acte, le statut même de l’acte, dans la suite, la série d’une chaîne signifiante. Peut-être bien que l’acte est un commencement, voire une origine, mais il ne peut se juger comme acte qu’après coup. L’acte vrai ne se juge pas seulement à son origine, à ses conditions de production. Il faut attendre pour savoir si c’en était un. Il y a donc un statut rétroactif de l’acte. Juger l’acte à ses suites c’est l’ouvrir à l’avenir. Premièrement, cela ouvre à la métonymie de la chaîne signifiante, déstabilise le narcissisme du « je pose un acte ». Deuxièmement, cela met l’acte sous la dépendance de l’Autre. Le principe kantien prend son fond sur la bonne volonté, l’intention droite. Ce qui se passe après est hors du domaine de la moralité. On veut bien faire, cela fait des catastrophes, ah c’est dommage ! C’est un des choix essentiels qui sont à faire : ou on est du coté de Kant, ou on est du coté de la critique de la vision morale. C’est une division cardinale de l’éthique de l’intention versus l’éthique de la conséquence. Pourquoi est-il difficile de s’en tenir à l’intention kantienne ? Parce qu’est impliquée une intentionnalité inconsciente. Dès lors qu’il y a l’inconscient, on ne peut précisément que référer l’acte à ses suites, à la métonymie de la chaîne signifiante, à l’Autre. C’est pourquoi, dans l’instant d’y passer, à l’acte, il faut faire entrer en ligne de compte la réaction de l’Autre, ce qu’il en dit et ce qu’il va en faire. C’est là même que se fonde le rapport que Lacan établit  entre l’acte et le « witz » (le mot d’esprit, en allemand, dont nous parle Freud) qui nous fait rire tout seul. Mais, le « witz » ne vaut tout de même que par l’accueil de l’Autre. C’est à partir du moment où l’Autre le reconnaît comme « witz ». Il y a de ça dans l’acte. L’Autre est inclus dans l’acte et il faut voir de quelle façon. Il faut repérer, à propos de l’acte, ce que Lacan a dit d’abord à propos du « witz » : l’acte est trans-individuel. Cela veut dire que c’est impensable au niveau du seul sujet, il faut y inclure, nécessairement, l’Autre. Il s’agit donc bien de critiquer, à l’aide de la « politique » lacanienne, l’éthique de la bonne intention, qui n’est pas freudienne, qui est incompatible avec le champ freudien. Il y a une opposition certaine entre l’éthique de l’intention, de la « bonne intention », de la « bonne foi » et l’éthique des suites, l’éthique conséquentialiste, l’éthique des conséquences qui juge l’acte. L’éthique de la bonne intention est vraiment l’éthique du célibataire. C’est même une éthique narcissique, celle de la « belle âme », qui se mire dans ses bonnes intentions, sans prendre en compte la complexité de ce dont il s’agit. En revanche, l’éthique des conséquences passe aussitôt dans la « politique » parce qu’elle inclut l’Autre. A l’inverse de ce que nous dit l’enseignement platonicien, l’éthique ne peut pas être cantonnée uniquement et seulement dans le monde des idées, de la théorie. L’éthique met en « jeu » une praxis, un agir qui s’exprime au quotidien dans les relations aux autres. Cela pose, pour chaque individu, la question de la concordance ou de la non concordance des idées, de la théorie avec leurs applications dans des actes de relations avec autrui. Le positionnement éthique ou non éthique individuel se mesure aussi dans l’importance de l’écart entre les idées et leurs mises en application concrètes. Car, à la suite d’Aristote, nous savons que l’Homme est un animal éminemment « politique », à ce moment là il ne disait pas encore social, donc relationnel.

 

L’éthique de l’altérité avec Emmanuel Levinas

Etre face à quelqu’un c’est toujours être face à ce qui nous dépasse, à ce que l’on ne peut réduire à n’être qu’un simple objet (ici, bien sur, objet n’est pas à entendre au sens de « la relation objectale » chère à la psychanalyse) ou un simple sujet. Autrui n’est donc pas une totalité fermée sur elle même, mais un infini, un horizon toujours indépassable de découverte et de réflexion. Autrui se manifeste dans l’étranger, celui que l’on ne connaît pas, qui est autre que nous mais à qui il convient cependant de s’ouvrir et d’offrir hospitalité. A partir du moment où je me trouve face à face (cette notion de face à face est centrale et primordiale pour Lévinas) avec l’autre je deviens responsable de cet autre. J’en deviens responsable et je dois donc m’interroger sur les conséquences que ne manqueront pas de provoquer, chez cet autre, mes postures, mes façons d’être et mes discours. Se pose alors la question de s’avoir comment je vais accueillir cet autre qui est en face de moi. Il est à noter une dimension très importante, à savoir : cette responsabilité envers l’autre, qui fonde cette éthique de l’altérité, n’attend pas de réciprocité de la part de celui qui est en face de moi. Et même si cela n’est pas réciproque, cela ne diminue en rien ma responsabilité dans ce face à face. Nous voyons bien comment peut être importante cette approche particulière de l’éthique dans ce que nous connaissons bien, à savoir la relation de soin, au quotidien, avec le sujet souffrant. Et c’est là aussi que nous voyons bien toute l’importance d’assortir à toute réflexion éthique une praxis, une traduction concrète au quotidien. En effet, que vaudrait cette éthique de l’altérité si elle se cantonnait au monde des idées, sans application, c’est-à-dire justement sans prise en compte de cette altérité particulière à chaque individu.

 

La « fin » et les « moyens »

Ici, nous affirmons que toute fin (but) si éthique soit elle ne vaut pas grand chose si les moyens utilisés pour y parvenir ne sont pas eux mêmes éthiques. Cela va à l’encontre du proverbe populaire qui dit : « on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs » (cela est à entendre à un niveau symbolique, car, bien évidemment, pour faire concrètement une omelette, il faut bien casser des œufs …), ou de cet autre proverbe : « la fin justifie les moyens ». Par exemple, en tant que soignant, le but peut être de diminuer la souffrance du sujet. But éminemment louable s’il en est (encore faut-il se poser la question de savoir quel sens cela peut prendre de diminuer la souffrance, le symptôme, d’un patient … Mais bon, faisons simple et partons du postulat que diminuer la souffrance d’un patient est une fin louable et éthique). Mais si les moyens pour atteindre ce but (par exemple, vouloir imposer à tous prix ses propres projections et ses propres désirs au sujet qui est face à nous) sont éthiquement intolérables, le but perdra d’autant sa valeur éthique. Jacques Lacan place une grande partie de sa réflexion éthique sur ce que Freud appelait le « contre transfert » (notion dont Lacan ne parlait pas trop en ces termes là, mais dont il parlait quand même) du psychanalyste. Dans cette notion de « contre transfert », un des aspects important est bien d’admettre que ma manière d’être et mon discours vont avoir une grande influence sur le sujet et qu’il convient donc que je m’interroge sur ma propre dimension contre transférentielle, donc sur mon désir et sur ce qui cause mon désir. Devoir, comme un impératif, effectuer soi même une psychanalyse pour devenir psychanalyste est directement lié à l’éthique de la psychanalyse. Rappelons, pour mémoire, ce qui a motivé Freud pour en arriver à proposer à ses patients le dispositif type de la cure analytique tel que nous le connaissons actuellement. Avant d’être psychanalyste, Freud était neurologue et praticien de l’hypnose thérapeutique. A un moment donné, il s’est rendu compte que sa pratique de l’hypnose influençait (peut être même manipulait) fortement ses patients. Pour diminuer ce risque, il a abandonné cette pratique et a mis en place les séances de psychanalyse à peu près telles que nous les connaissons aujourd’hui. Encore une fois, insistons bien sur le fait que la « bonne intention » ne peut pas, ne doit pas suffire et une réflexion sur les fins (les buts) se doit d’être nécessairement et impérativement accompagnée par une réflexion sur les moyens qui vont être utilisés pour arriver à ces fins.

 

Quelques mots sur la philosophie de soin de l’humanitude

Afin d’illustrer ce en quoi consiste cette approche, nous parlerons, plus particulièrement, de la prise en charge des personnes âgées, mais, la philosophie générale de l’humanitude, en tant que relation soignante spécifique, peut être transposée à n’importe quelle relation soignant/soigné.

Pour environ 10% de la population âgée de plus de 65 ans, le vieillissement s’accompagne de situations de handicap et de maladies qui portent atteinte à l’autonomie.

Aujourd’hui, nous savons qu’il est possible d’aider les personnes âgées en situation de handicap en veillant à respecter leur équilibre et leurs désirs, que toutes les difficultés et toutes les pertes auxquelles les personnes atteintes de syndromes démentiels sont confrontées ne les empêchent pas de ressentir du plaisir et du bien être.

Pour rester en relation avec ces personnes et partager avec elles émotions et sentiments, il faut un prendre soin fondé sur toutes les caractéristiques qui permettent aux Hommes de se reconnaître les uns les autres : l’humanitude.

La philosophie de soins de l’humanitude est basée sur les concepts de bientraitance et de règles de l’Art dans le soin, elle regroupe un ensemble de théories et de pratiques pour : rapprocher le soignant et le soigné de leur humanitude, améliorer les soins et le « prendre soin » des personnes en établissement et à domicile, accompagner ainsi les personnes âgées dans la tendresse et le respect de l’autonomie, debout, jusqu’à la fin.

De tout temps, il s’est trouvé des soignants qui se sont occupés des personnes avec humanité. Mais soigner avec humanité n’est pas prendre en soin en humanitude.

Le mot « humanitude » est, semble-t-il, apparu pour la première fois sous la plume d’un écrivain suisse, Freddy Klopfenstein, en 1980. Plus tard, Albert Jacquard, reprend ce terme sur le modèle du mot « négritude » jadis créé par Aimé Césaire, puis popularisé par Léopold Senghor. Ceux-ci avaient ainsi, nous dit Albert Jacquard, utilisé « un mot nouveau pour désigner l’ensemble des apports des civilisations d’Afrique centrale, l’ensemble des cadeaux faits aux autres hommes par les hommes à peau noire : la négritude. » « Les cadeaux que les hommes se sont faits les uns aux autres depuis qu’ils ont conscience d’être et qu’ils peuvent se faire encore en un enrichissement sans limites, désignons les par le mot humanitude. Ces cadeaux constituent l’ensemble des caractéristiques dont, à bon droit, nous sommes si fiers, marcher sur deux jambes ou parler, transformer le monde ou nous interroger sur notre avenir ». « L’humanitude, c’est ce trésor de compréhension, d’émotions et surtout d’exigences qui n’a d’existence que grâce à nous et sera perdu si nous disparaissons. Les Hommes n’ont d’autre tâche que de profiter du trésor d’humanitude déjà accumulé et de continuer à l’enrichir. Ainsi Albert Jacquard définit une approche « écologique » de l’humanitude. Savourons encore ses paroles quand il nous dit de l’humanitude ce qui pourrait bien en constituer une définition : « L’autre, femme ou homme, de la même espèce que moi, et pourtant différent, comment le regarder ? Comment me comporter face à lui ? Si je vois en lui un ennemi qui me menace, qui me fait peur, je ne songe qu’à me défendre contre lui, et pour mieux me défendre, à l’attaquer. C’est cela le racisme. Si je vois en lui un obstacle qui gène ma progression, je ne cherche qu’à le dépasser, à l’éliminer. C’est cela la compétition qui transforme la vie de chacun en une suite de batailles parfois gagnées, en guerre toujours perdues. Pour être réaliste, je dois voir en l’autre une source qui contribuera à ma propre construction. Car je suis les liens que je tisse et me priver d’échanges c’est m’appauvrir. Le comprendre c’est participer à l’humanitude. »

Plus tard, dès 1989, un gériatre français, Lucien Mias, introduit pour la première fois le terme d’humanitude dans les soins.

Enfin, en 1995, Rosette Marescotti et Yves Gineste décident d’aborder ce concept d’humanitude comme une philosophie de soins. Car toutes les actions soignantes se réfèrent toujours à une philosophie de soin. Elle a, entre autres, pour objet l’étude des principes fondamentaux d’une activité, d’une pratique, des réflexions sur leurs sens et leur légitimité. Cela constitue une réflexion sur les caractéristiques que les hommes possèdent et développent en lien les uns avec les autres, sur les éléments qui font que chaque homme peut reconnaître les autres hommes comme des semblables.

L’humanitude dans le soin tente de répondre à la question de savoir qu’est-ce qu’un soignant ? C’est un professionnel qui prend soin d’une personne qui a des problèmes de santé, ou qui se préoccupe de sa santé, dans le but de l’aider à l’améliorer, ou la conserver, ou pour l’accompagner jusqu’à la mort. Mais jamais pour la détruire. Dans cette philosophie, la personne est définie comme une personne qui est un être humain. L’être humain est un animal, celui qui prend soin d’un animal qui a des problèmes de santé est un vétérinaire. Oui, mais l’humain est un animal particulier.

L’humanitude est l’ensemble de ses particularités : le rire, l’humour, la parole, l’intelligence conceptuelle, la verticalité, l’habit, la socialisation etc. On ne devient soignant qu’en s’occupant de l’humanitude. Alors, l’humanitude est l’ensemble des particularités qui permettent à un homme, à une femme de reconnaître un autre homme, une autre femme comme faisant partie de l’humanité.

Un des éléments fondamentaux de l’humanitude est la communication. Lorsqu’un enfant arrive au monde, il n’est pas encore en humanitude et sa mère, son père, les humains qui l’entourent vont l’y faire entrer. Comme une brebis lèche l’agneau afin qu’il se reconnaisse dans l’espèce, qu’il trouve la mamelle, la protection du troupeau et qu’il puisse vivre parmi les siens, l’être humain a besoin d’un « léchage » pour vivre. Ce « léchage » subtil est basé sur les trois piliers de la communication que sont le regard, la parole et le toucher ; trois piliers sur lesquels va s’appuyer la philosophie de soin de l’humanitude.

Quelques mots sur le concept de « validation »

Les principes de la validation sont en rapport direct avec la pratique, ils décrivent les modalités concrètes de l’exercice de la validation.

Il convient d’accepter chaque personne telle qu’elle est. Il ne s’agit pas de corriger le comportement, mais d’aider le sujet à satisfaire les besoins qu’il exprime.

Toute personne a de la valeur, y compris celle qui est psychotique. Il s’agit de traiter le patient avec respect et déférence.

Il y a un sens sous jacent au comportement de tout individu. Même si nous ne comprenons pas toujours les raisons de ce comportement, nous créons un contexte favorable afin que l’expression des émotions soit possible. Nous devons accepter que les patients se situent dans une réalité subjective qui leu est propre. Par exemple, nous considérons le symptôme comme un mécanisme de défense qu’il convient d’entendre avant d’avoir comme idée fixe et toute puissante de l’éradiquer à tout prix. Nous l’acceptons comme une réalité subjective au service du patient, en tant qu’il constitue une béquille existentielle, certes dysfonctionnelle, qui a une fonction bien particulière dont il est nécessaire d’interroger le sens dans ce qu’il est convenu d’appeler « l’économie psychique du patient ».

Les sentiments douloureux qui sont exprimés, reconnus et validés par un interlocuteur de confiance s’apaisent ; ignorés ou réprimés, ils gagnent en intensité. Nous accueillons toutes les émotions exprimées par la personne. Avec empathie, nous partageons ces émotions et nous encourageons leur expression.

L’écoute empathique crée la confiance, réduit l’anxiété et restaure le sentiment de dignité. Nous partageons les sentiments du patient sans nous préoccuper de la réalité factuelle. Précisons ici que l’empathie ne peut pas correspondre au fait de « se mettre à la place de … ». Il s’agit bien de se situer, en tant que soignant, dans une ouverture d’esprit et une disponibilité telles que cela permet d’accueillir la parole du patient en dehors de tout jugement moral et en dehors de toute projection de la part du soignant. En effet, il n’y a rien de plus sadique que de vouloir se mettre à la place de quelqu’un car, en procédant de la sorte, nous remplacerions une subjectivité particulière, celle du patient, par une autre subjectivité particulière, celle du soignant. Comme dans toute substitution, la seconde éradiquerait la première et ne laisserait plus aucune place au sujet qui est en face de nous.

L’être humain vit avec plusieurs niveaux de conscience, souvent simultanés.

Des évènements du présent chargés émotionnellement peuvent réveiller le souvenir d’évènements du passé associés aux mêmes émotions. Nous comprenons et acceptons que, pour ces patients, des évènements actuels agissent comme des déclencheurs réactivant le souvenir d’évènements du passé.

Il s’agit donc bien d’une écoute empathique des émotions de la personne et de la reconnaissance de ce qu’elle dit comme étant vrai, pour elle, au moment où elle le dit, puisqu’elle le ressent et a la possibilité de l’exprimer. Sachant, à la suite de Lacan, que le réel « n’existe pas » en tant que tel, il n’y a que des interprétations du réel. Cette posture soignante apaise l’anxiété et atténue l’apparition des troubles du comportement. Valider, c’est respecter la personne dans son intégrité, c’est lui faire confiance, c’est reconnaître que cette même personne a  déjà traversé son histoire, qu’elle a un parcours de vie, des ressources. On peut respecter une émotion et la considérer comme pertinente même lorsqu’on est persuadé, parfois à juste titre, qu’elle ne s’appuie pas sur une certaine forme de réalité, lorsque l’on en ignore les raisons, le sens. Dans ce cadre là, le patient a besoin de quelqu’un qui l’accompagne en respectant ses émotions sur les chemins de son passé. Il n’a pas besoin d’être convaincu, contre vents et marées, que ce qu’il dit est faux ou ne correspond à rien. Il a besoin d’être entendu dans ce qui se passe pour lui, dans ce qu’il dit, dans ce qu’il revit, dans ce qu’il est. Même s’il semble que sa subjectivité soit absente, il est toujours sujet dans mon regard, dans mon discours, il est toujours sujet parce que je dis qu’il est toujours sujet et que je le reconnais comme tel.

 

 

Qu’est-ce que l’éthique selon le philosophe français Emmanuel Levinas ?

Si nous revenons et insistons sur la pensée de ce philosophe, c’est parce que nous pensons qu’il propose, avec Jacques Lacan, une des meilleures approches de ce concept de l’éthique, appliqué dans le domaine spécifique qui est le nôtre, à savoir le soin en général.

C’est le récit sans cesse repris, sans cesse recommencé, indéfiniment commencé et creusé toujours plus profond, d’une scène primitive, d’une intrigue originelle, la rencontre d’autrui. L’éthique selon Levinas est la manifestation en chaque homme de son autonomie. Elle est un évènement et même un coup de théâtre. Il faut que quelque chose advienne au moi pour que celui-ci cesse d’être uniquement une « force qui va » et s’éveille au scrupule. Ce quelque chose, c’est quelqu’un et ce quelqu’un là n’est à proprement parler personne puisque c’est toutes les personnes. Il est cette part de l’autre homme que Levinas nomme magnifiquement « le visage ». Le visage est nu, c’est-à-dire à la fois abstrait et sans protection, dépouillé de ses ornements culturels et vulnérables et dénués de toute défense. Et c’est précisément cela, cette fragilité, cette extériorité désarmée qui abrogent en moi malgré moi l’égoïsme tranquille de la persévérance dans l’être. Le visage  existe d’abord à l’impératif. Préalablement à tout ce qu’il me dissimule ou qu’il me dévoile, il y a ce qu’il me révèle, à savoir : « tu ne tueras point ». Face au visage, je me reconnais comme un être enjoint. Le visage, ce n’est pas un spectacle qui s’offre, c’est une voix qui silencieusement commande. Tout d’un coup, l’autre me regarde et m’oblige. Tout d’un coup, il m’incombe et il m’ordonne de toute sa charge d’indigence et de faiblesse. Le « moi je » vire au « me voici », le « pour soi » devient un « pour autrui ». L’autre est celui dont je réponds. Il est aussi le sujet de l’action puisque c’est lui qui prend l’initiative, qui entre sans frapper dans la citadelle de mon intériorité. Mais, il est aussi sujet de mes actes et l’on ne juge la dimension éthique d’un acte qu’à ses conséquences. En un sens, rien n’est plus encombrant que son prochain, ce désiré n’est-il pas l’indésirable même ?

 

La notion de diplomatie dans la fonction cadre

 

Il est maintenant largement convenu de dire que le cadre de santé se trouve à la confluence de plusieurs logiques, à savoir soignante, médicale, administrative, économique. Le cadre de santé a comme fonction celle de faire en sorte que ces logiques puissent fonctionner et s’entendre entre elles de la manière la plus harmonieuse possible, dans l’intérêt du sujet patient ; sachant que, bien souvent, ces logiques s’opposent et s’affrontent. Cette fonction diplomatique du cadre de santé est donc primordiale car elle entraîne des conséquences directes sur le travail soignant et, donc, sur les prises en charge proposées aux patients. Elle doit s’appliquer dans les relations entre médecins et para médicaux, mais aussi entre paras médicaux, administratifs et équipe de direction.

Depuis plusieurs années maintenant, nous savons que la qualité d’une prise en charge, pour un patient, passe par une approche holistique. La prise en compte de cette globalité, est devenue une nécessité, d’autant plus en psychiatrie. En effet, dans une immense majorité des cas, les problématiques des sujets qui s’adressent ou qui sont adressés aux soignants psychiatriques revêtent un aspect pluridimensionnel (médical – social – psychologique – somatique – culturel – familial – historique etc.).

Par voie de conséquence, cela induit le fait que plusieurs types de professionnels interviennent autour et pour le patient, dans la globalité d’une même prise en charge. Ces professionnels, qu’ils soient médical, paramédical, administratif, technique, social, médico-social … mobilisent donc des compétences différentes, mais complémentaires, allant dans le même but : l’amélioration de la condition du sujet souffrant.

C’est bien l’unification et la cohérence de ces différences, nécessaires les unes aux autres, au sein de ce qu’il est convenu de nommer une équipe pluridisciplinaire, qui sont censées constituer les bases, les fondations de cette qualité de prise en charge que nous appelons tous de nos vœux.

Dans toutes organisations humaines non totalitaires, il est bien normal de ne pas toujours penser comme son voisin, de ne pas avoir le même point de vue. C’est justement cette différence de point de vue qui permet un meilleur regard, plus panoramique, vis-à-vis du sujet patient.

C’est de la juste confrontation, au travers du débat,  que naissent les meilleures idées. Confrontation qui doit s’effectuer dans le respect le plus total de l’autre dans sa différence, afin d’ouvrir sur une réelle collaboration. En effet, le débat n’équivaut pas à la remise en cause des individus en tant que personnes singulières, dans leur intégrité propre.

L’alliance de nos différences, dans un respect mutuel, fera les valeurs de nos idées.

En fait, nous n’avons pas le choix, nous sommes obligés de travailler ensemble et nous affirmons que, dans notre contexte, personne ne peut et ne doit travailler seul.

Une institution de soins comme l’hôpital public ne doit pas être une entreprise avec des corporations de dominateurs et de dominés. Il s’agit, entre autres, de femmes et d’hommes au service du patient, l’accompagnant tous les jours, 24 heures sur 24.

Le sens et les valeurs du travail soignant doivent être partagés par le collectif de travail, permettant ainsi de construire la confiance et de tisser la coopération. Une approche strictement individuelle ouvrirait très rapidement sur le constat d’une pluralité de conceptions. En restant en l’état, c’est-à-dire sans liant et de manière complètement désorganisée, cela poserait immanquablement un problème, du fait de l’absence de cohérence dans les prises en charge, mettant directement à mal une bonne qualité des soins.

C’est la raison pour laquelle en rester à une situation dans laquelle chacun agirait à sa guise serait fortement préjudiciable non seulement aux patients, mais aussi aux professionnels de santé (car pouvant entraîner démotivation, usure professionnelle et bien d’autres problèmes plus graves encore).

Les résultats de certaines recherches qui ont étudié les caractéristiques des hôpitaux dits « attractifs » montrent que nous retrouvons une combinaison de plusieurs attributs particuliers dont notamment : « un environnement de collaboration professionnelle entre infirmier(e)s et médecins se traduisant par un respect mutuel des connaissances et des compétences, ainsi que la poursuite d’un objectif commun : dispenser ensemble des soins de qualité ».

D’autre part, nous savons que la violence psychologique entre personnel peut prendre, actuellement, des formes plus inquiétantes liées à la dureté des relations dans des milieux de plus en plus contraignants. Les relations sociales dans les équipes représentent une part importante de la charge psychique à « gérer » pour les soignants et l’ensemble du personnel déjà cité. Il est maintenant clairement admis que la non reconnaissance, par les médecins par exemple, du travail effectué par les soignants est une source de démotivation, de perte d’intérêt et d’incohérences. Nous pouvons généraliser cela et dire que l’absence de reconnaissance, d’où qu’elle vienne et quel que soit le statut de la personne qui en est victime, engendre les mêmes phénomènes. Cette absence de reconnaissance peut être dégradante et destructrice pour les soignants qui peuvent perdre le sens de leur travail et réagir souvent violemment face à la négation de leur engagement. En un mot, ne parlons pas toujours que des « 3 trains qui n’arrivent pas à l’heure », mais parlons aussi, et largement, des 97 autres qui eux arrivent à l’heure (ce qui, bien sur, ne doit pas nous empêcher de nous interroger à propos de ceux qui « n’arrivent pas à l’heure »).

Cependant, dans chaque prise en charge avec tout ce qu’elle représente de particulier et d’unique, il est nécessaire, à certains moments, de prendre des décisions. Nous souhaitons que ces décisions soient prises de la manière la plus collégiale et la plus participative possible. Décisions qui peuvent prendre la forme de prescriptions médicales demandant à être appliquées toujours avec humanité.

En effet, il doit y avoir le temps du débat et de la discussion, mais il doit aussi y avoir, impérativement, le temps de la prise de décision et, surtout, le temps de son application. Nous appliquons tous, quotidiennement, des décisions prises par nous-mêmes et par d’autres. Ceci parce que nous avons tous un « rôle propre » dont nous sommes responsables dans sa mise en œuvre, et un « rôle par délégation » qui nous demande d’effectuer certaines mises en œuvre.

C’est précisément à l’aide de la coopération que tout cela peut exister ensemble dans un même ensemble : le service aux patients qui ne doivent jamais quitter le centre de nos pensées. Coopération dans laquelle chacun doit occuper la place qui est la sienne, que cela soit dans une dimension hiérarchique ou fonctionnelle, car même si ce sont des fonctions différentes, elles mettent en jeu, à leurs manières, la notion de coopération.

Mais, tout cela doit aussi passer par une incontournable remise en question de certains de nos choix. C’est un passage obligé pour une juste évaluation, toujours vers le sens d’une volonté de progression. Mais ce retour sur les pratiques, si essentiel qu’il soit, ne doit pas être « à sens unique », nous devons tous nous y engager, quelle que soit notre place dans l’hôpital ; et nous devons nous y engager selon le précepte du vieil adage qui nous encourage à la prudence en nous parlant de la paille dans l’œil du voisin que nous verrions mieux que la poutre qui se trouve dans le nôtre …

N’en doutons pas, il s’agit, là encore, d’un gage d’amélioration de la qualité des soins.

Nous devons tous nous retrouver autour du projet thérapeutique pour le patient, mettant nos différences de point de vue au service de l’enrichissement du débat plutôt qu’à son appauvrissement ; pour, in fine, arriver à une synthèse cohérente.

Pour finir, faisons référence au décret de compétences de la profession d’infirmier qui précise dans son article 1° : « … Ils (les infirmiers) exercent leur activité en relation avec les autres professionnels du secteur de la santé … ».

D’autre part, ce même décret de compétences distingue les trois cas de l’intervention de l’infirmier : le rôle propre, l’intervention sur prescription médicale et l’intervention en collaboration avec le médecin. Trois cas où la notion de coopération est très forte, même dans le rôle propre, ne serait-ce qu’au travers des « transmissions d’informations ».

Mais, faisons aussi référence au code de déontologie médicale qui stipule dans son article 68, intitulé : « Rapport avec les auxiliaires médicaux » : « Dans l’intérêt des malades, les médecins doivent entretenir de bons rapports avec les membres des professions de santé … ».

Si besoin était, cette brève allusion aux textes qui régissent nos professions, confirme le fait que nous sommes obligés de travailler ensemble. Alors, oeuvrons pour transformer cette obligation en une réelle volonté partagée, et que cette volonté se transforme en puissance.

Laissons le dernier mot à Jean de la Fontaine qui nous disait dans sa fable « Le vieillard et ses enfants » : « Toute puissance est faible à moins que d’être unie ».

 

En guise de conclusion provisoire

 

Que nous le prenions dans son sens ordinaire qui a pour objet l’épanouissement de l’Homme, ou dans son sens de l’histoire des idées comme un mouvement littéraire et philosophique affirmant la valeur de l’Homme en tant qu’Homme, ou encore dans son sens de philosophie morale comme une conception de l’existence selon laquelle l’Homme doit s’affirmer et se construire indépendamment de toute référence ou de tout modèle religieux, l’humanisme doit faire partie de nos fondations constituant nos références théoriques. En effet, l’humanisme développe l’esprit critique, défend la valeur et la dignité de l’Homme et sa place éminente au sein de l’univers. Ici, la culture et l’éducation sont importantes en tant qu’elles permettent à l’Homme de développer librement ses facultés et d’accéder à une sagesse pleinement humaine. Plus généralement, l’humanisme pose que l’Homme est la valeur suprême, c’est-à-dire un être dont la dignité doit être affirmée et protégée contre toutes les formes d’assujettissement.

Voila dans quelle logique générale de pensée et d’action doit se situer le cadre de santé, qu’il se tourne vers l’équipe de soins ou vers les patients.

 

Esquissons maintenant un autre aspect qui doit être inhérent à la fonction cadre. Il s’agit de la question de la loyauté. Cette loyauté qu’il convient d’entendre, ici, comme une fidélité. Certes, tous les fonctionnaires se doivent d’être loyaux, au sens du « legalis » latin renvoyant au « légal », en tant qu’ils ont obligation statutaire « d’obéir aux lois de l’honneur et de la probité » inhérentes à l’institution qui les emploie. Dans son acception générale, cela renvoie au loyalisme qui, sauf exception car parfois et dans certaines circonstances une véritable démarche éthique consiste à appliquer le droit constitutionnel de désobéissance et de n’être donc plus loyal, renvoie bien à une « fidélité au régime établi ou à une autorité considérée comme légitime ». Le cadre doit préserver et protéger l’équipe, même si cela ne doit pas l’empêcher de « recadrer » cette même équipe, ou certaines personnes qui la composent, quand cela est nécessaire. Nous insistions, plus haut, sur la fonction sécurisante du cadre, eh bien c’est dans la loyauté qu’elle doit s’exprimer. Mais, entendons nous bien, protéger et sécuriser ne veut pas dire cautionner des dysfonctionnements quand ils voient le jour. Donc, dans une acception plus particulière, et dans ce sens là, le cadre de santé se doit d’être loyal envers l’équipe de soins dont il assume la responsabilité. Même si cela ne fait pas plaisir, le cadre de santé a aussi pour fonction de « prendre certains coups » à la place de l’équipe, revêtant bien ainsi une fonction d’écran et de protection.

Mais alors, terminons par une question : qui prend soin et qui protège le cadre de santé ?...

 

 

Hervé BOYER

Cadre de santé en psychiatrie

Au CH Ravenel à Mirecourt (88)

 

2009
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