L'exil et l'accueil en médecine
L'exil et l'accueil, un sujet qui nous touche tous et qui nous invite à penser le monde, à l'heure où tant de gens arrivent chez nous, poussés par l'ouverture des frontières, ou chassés par les guerres économiques ou le bruit des armes.
Autour de ce numéro, portés par les visages de ceux qu'ils soignent, dans cette situation d'être aux avant-postes de la rencontre avec les exilés, des médecins se sont rassemblés pour proposer un renversement de perspectives et, avec eux, des historiens, des philosophes, des psychanalystes, des sociologues, des citoyens, tous concernés par l'expérience de l'exil.
Nous osons affirmer que l'accueil des exilés est une richesse, une chance pour la société. Nous croyons que l'expérience de l'exil, faite d 'arrachement et d'espoir est une expérience humaine fondamentale que nous pouvons tous comprendre et partager, que nous soyons nés ici ou venus d'ailleurs. Nous témoignons aussi de ce que beaucoup d'exilés ont su, d'une manière ou d'une autre, faire auprès de nous œuvre de " soignants " .
Poser la richesse de l'exil, ce n'est pas gommer les difficultés, c'est débusquer les mensonges et envisager tous les paradoxes et les enjeux vitaux pour notre société.
Certes, face aux différences, il existe la tentation de l'extériorité et d'un culturalisme qui exclut, mais nous plaidons pour les soignants entendent les résonances qui les font proches des exilés, qu'ils se dotent d'outils pour devenir plus accueillants, outils conceptuels ou pratiques comme le recours aux interprètes .
La vision sécuritaire fait aujourd'hui des exilés les responsables des tensions sociales, une autre analyse plus politique est possible : en minimisant la part importante subie par les immigrés dans les inégalités sociales de santé ; notamment au travail, la société relègue la question dans sa périphérie et évite de s'y atteler.
Face à la remise en cause du droit d'asile, ou de l'aide médicale Etat, face au discours faussement économiste qui ferait des exilés soit des " abuseurs " de notre hospitalité, soit la cause de l'inflation des dépenses de santé, nous proposons de dépasser une vision purement " humanitaire " : la bataille pour l'accès aux droits et aux soins des étrangers s'inscrit dans la mobilisation actuelle plus large pour une protection sociale solidaire pour tous.
Le déni des injustices de l'Histoire, l'occultation des conséquences des colonisations anciennes ou de la mondialisation actuelle entraînent des catastrophes que nous constatons au quotidien, nous pensons utile de nommer les tragédies cachées et faire ainsi œuvre de prévention des violences à venir.
Aujourd'hui, les exilés nous attendent. A nous de saisir cette chance. Ils nous offrent l'occasion de penser la différence et la proximité, d'intégrer l'Histoire avec nos histoires singulières, d'entrer dans la fraternité des frontières. Peut-être alors, ensemble, avec eux, saurons-nous construire un monde qui n'oublie pas la nécessité vitale de la solidarité et de l'ouverture.
Elisabeth Maurel-Arrighi
Autour de ce numéro, portés par les visages de ceux qu'ils soignent, dans cette situation d'être aux avant-postes de la rencontre avec les exilés, des médecins se sont rassemblés pour proposer un renversement de perspectives et, avec eux, des historiens, des philosophes, des psychanalystes, des sociologues, des citoyens, tous concernés par l'expérience de l'exil.
Nous osons affirmer que l'accueil des exilés est une richesse, une chance pour la société. Nous croyons que l'expérience de l'exil, faite d 'arrachement et d'espoir est une expérience humaine fondamentale que nous pouvons tous comprendre et partager, que nous soyons nés ici ou venus d'ailleurs. Nous témoignons aussi de ce que beaucoup d'exilés ont su, d'une manière ou d'une autre, faire auprès de nous œuvre de " soignants " .
Poser la richesse de l'exil, ce n'est pas gommer les difficultés, c'est débusquer les mensonges et envisager tous les paradoxes et les enjeux vitaux pour notre société.
Certes, face aux différences, il existe la tentation de l'extériorité et d'un culturalisme qui exclut, mais nous plaidons pour les soignants entendent les résonances qui les font proches des exilés, qu'ils se dotent d'outils pour devenir plus accueillants, outils conceptuels ou pratiques comme le recours aux interprètes .
La vision sécuritaire fait aujourd'hui des exilés les responsables des tensions sociales, une autre analyse plus politique est possible : en minimisant la part importante subie par les immigrés dans les inégalités sociales de santé ; notamment au travail, la société relègue la question dans sa périphérie et évite de s'y atteler.
Face à la remise en cause du droit d'asile, ou de l'aide médicale Etat, face au discours faussement économiste qui ferait des exilés soit des " abuseurs " de notre hospitalité, soit la cause de l'inflation des dépenses de santé, nous proposons de dépasser une vision purement " humanitaire " : la bataille pour l'accès aux droits et aux soins des étrangers s'inscrit dans la mobilisation actuelle plus large pour une protection sociale solidaire pour tous.
Le déni des injustices de l'Histoire, l'occultation des conséquences des colonisations anciennes ou de la mondialisation actuelle entraînent des catastrophes que nous constatons au quotidien, nous pensons utile de nommer les tragédies cachées et faire ainsi œuvre de prévention des violences à venir.
Aujourd'hui, les exilés nous attendent. A nous de saisir cette chance. Ils nous offrent l'occasion de penser la différence et la proximité, d'intégrer l'Histoire avec nos histoires singulières, d'entrer dans la fraternité des frontières. Peut-être alors, ensemble, avec eux, saurons-nous construire un monde qui n'oublie pas la nécessité vitale de la solidarité et de l'ouverture.
Elisabeth Maurel-Arrighi