
Ils vont tuer la Sécu !
La canicule, entre hypocrisie et aveuglement
Non, la tragédie de l'été n'est pas qu'une histoire d'urgences et de manque de réactivité face à un événement inhabituel. C'est toute l'organisation du système de soins qui a été remise en cause. En effet, des choix faits depuis longtemps, aggravés par l'actuelle politique ultralibérale, privilégient la rentabilité et la technologie.
On a enlevé des subventions aux réseaux de proximité, on a étranglé les services de soins infirmiers à domicile, on a fermé des lits d'hospitalisations dans le public, on a gelé les crédits des maisons de retraite, on a dévalorisé le travail des soignants auprès des patients âgés ; et après, on s'étonne que les personnes les plus vulnérables, âgées, isolées et pauvres fassent les frais de la canicule.
Cette catastrophe, c'est la rançon d'un système français tourné vers la réponse individuelle à la demande de soin, ce sont des soignants, rémunérés uniquement à l'acte en médecine ambulatoire qui ne sont ni formés, ni payés par l'Assurance maladie pour faire de la prévention.
La prévention n'est pas dans ce que préconisent les " experts " officiels. Ce n'est ni un institut de veille météorologique, ni la nécessaire augmentation du nombre de lits d'hôpitaux et des budgets qui permettraient d'éviter de telles catastrophes. La prévention, ce serait une autre organisation du système de soins, où généraliste, infirmière, assistante sociale, service de maintien à domicile, hôpital de proximité auraient l'habitude de travailler en réseau et d'être en lien avec les services de veille sanitaire. Ce serait une modification radicale des représentations, où s'occuper d'une personne dépendante serait aussi prestigieux que réaliser un acte technique. Ce serait la réhabilitation du lien social.
A l'hypocrisie de nos gouvernements de nos gouvernements s'ajoute l'aveuglement de la population. Pourtant, nous sommes devant des choix de société : un certain nombre de professionnels de santé sont prêts à travailler non pas dans une course à la rentabilité, mais dans une conception de service public. Surtout les citoyens peuvent exiger que soit mis en place une Assurance maladie qui développe la solidarité, la prévention et la coordination des soins, et que l'organisation sociale ne sacrifie pas la santé de la population à la recherche de profits.
Elisabeth Maurel Arrighi