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LA NUIT TOUS LES VIEUX SONT GRIS

La société contre la vieillesse


Jérome Pellissier

Bibliophane - Daniel Radford



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La nuit tous les vieux sont gris


La société serait elle contre la vieillesse, la brûlante actualité de cet été caniculaire et meurtrier répond au livre de Jérome Pelissier. Il travaille dans le milieu associatif et a déjà publié en 2002 le roman "les insensés" (éditions Joëlle Losfeld)

La première question que se pose Jérome et qu'il nous pose est "Les vieillards sont-ils des hommes ?" A voir comment la société les traite, il est permis d'en douter. Le regard que nous posons sur nos ainés à de tout temps été ambivalent. Dans certains peuples nomades pauvres, les vieux étaient abandonnés ou tués. Dans des sociétés plus riches, les vieux étaient respectés pour leurs connaissances. Dans la première moitié du XXème siècle, les vieux de milieu défavorisé sont mal traités, ceux de la bourgeoisie ont une image positive (cf Victor Hugo).

Le regard que notre époque porte sur ses ainés est beaucoup moins ambivalent. Les vieux sont physiquement des handicapés. Ceux qui vivent sereinement leur vieillesse sont exclus de la catégorie des vieux.
L'âgisme possède tous les caractères du racisme avec les mêmes potentialités de violence et d'exclusion. En refoulant notre propre peur de la décrépitude et de la mort, l'âgisme condamne le vieux à vivre dans un statut qui dépossède l'individu de ses caractéristiques propres ; à la relégation pour pouvoir l'oublier ; à ne pas reconnaitre, en présence même de la personne, cette expérience de la vieillesse qu'il est entrain de vivre.

Un chapitre est consacré à la maladie d'Alzheimer qui toucherait près de 600 000 personnes en France, une personne sur dix après 60 ans, une sur deux au delà de 85 ans. Dans les discours les plus alarmistes seulement 30% des personnes seraient dépistées. Définir les personnes âgées comme Alzheimer ne serait pas dramatique dit l'auteur si ce statut n'induisait pas toute une série de conceptions et de comportements aussi stigmatisants que pathogènes.

La dégradation des conditions de vie est une réalité pour les personnes âgées isolées. Plus de 15 millions de Personnes âgées sont sans famille. Rien n'est prévu en terme d'environnement, aménagement du territoire, transports, services pour rendre possible une mobilité chez les vieux. Pour les personnes âgées qui sont entourées, le risque de maltraitance est très fort. 10%, voir 20% de ces personnes sont maltraités !!!
Les maltraitants sont en premier lieu la famille, les amis et les voisins, puis dans un pourcentage moindre les soignants, banquiers, tuteurs (sévices physiques ou psychologiques). En 2002 est né un comité national de vigilance contre la maltraitance des personnes âgées. Sa mission est d'aider à la définition, à la mise en oeuvre et au suivi de la politique de prévention et de lutte contre la maltraitance des personnes âgées.

Jérome Pellicier nous donne quelques exemples de violence et de négligence en milieu institutionnel, ce sont des témoignages relatant des quotidiens infames. Les formes sont parfois banales mais souvent perverses. Comment en est-on arrivé là ???
"La répétion quotidienne de tâches accomplies par habitude, sans initiative personnelle, sans sentiment d'efficacité, sur des "corps matières" conduit bientôt les soignants à se percevoir eux-mêmes comme "corps outils"."

Quelle évolution du système de santé ? En Angleterre : plus de prothèse de hanche au delà de 70 ans. Au Danemark, certains soins sont refusés au delà d'un certain âge par manque de place. En France on voit déjà apparaitre l'euthanasie économique ! L'intensité et la durée des soins diminuent au fur et à mesure de l'avancée en âge et non pas seulement pour des raisons médicales...

Pourtant les vieux nous parlent, ils nous apprennent qu'il est possible, moyennant certains aménagements, de bien vieillir. Dans son corps et dans son esprit... Mais que cela est réservé à une petite minorité d'entre eux, d'entre nous.

jérome Pellicier nous renvoie au final à la réflexion suivante : Et si nos vieux nous posaient simplement la question : les voulons-nous vraiment vivants ?

Une bibliographie très fournie complète cet ouvrage qui est à lire en urgence pour prendre part au débat de société qui nous agite actuellement !

@Marie Leyreloup