Chronique de la vie quotidienne dans un centre de jour pour adolescents De la théorie à la pratique
C. AZOULAY,J-M. BENMUSSA, C. CHABERT, M. GUMY, M. VIBERT |
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En ouvrant les premières pages, je croyais y rencontrer des adolescents à chaque coin de couloir, des moments brutes de conflit ou de silence, des paroles se croisant, s'interpellant ou se posant, d'ados ou de soignants témoignant d'instants vécus qui se succèdent sans se ressembler et nous interrogent sur la particularité de chacun d'entre eux.
Mon illusion à moi était sans doute de croire que de ce quotidien, j'en ouvrais la porte.
Alors, je suis restée derrière les lignes du récit de leurs illusions à eux, car ce livre se veut avant tout une histoire de soignants s'inscrivant dans une démarche institutionnelle.
Je les ai donc rencontré derrière leurs mots. Tantôt parole commune, d'équipe, où je ne peux éviter de chercher qui se cache derrière, tantôt parole restituée; à l'individu où je rencontre enfin chacun dans sa différence, son originalité de penser, où les contradictions ont le droit de citée, de vivre sans disparaître sous l'illusion groupale, et en face desquelles je peux me sentir d'accord où non et me reconnaître dans mon vécu de soignante.
Cela reflète d'ailleurs bien l'histoire de l'ouverture du centre de jour et de son cheminement que l'équipe décrit comme un passage d'une confusion idéalisante au besoin de différenciation.
De ce livre qui soulève les aléas du travail en équipe et ses espérances, je reste encore surprise de l'ampleur des problèmes thérapeutiques et institutionnels abordés, et me demande s'il reste encore un recoin caché qui aurait échappé à ce travail de penser.
Une pointe d'admiration, d'étonnement, mais de frayeur de ma part peut-être, lorsqu'en suivant le chemin de leur histoire je croise des lieux, un cadre et des repères, des soignants, des réunions, des prises en charge de patients, des groupes de travail, une organisation, beaucoup de réflexion,... mais le long duquel j'en oublie parfois les adolescents, appelés ici le plus souvent patients.
J'en oublie leur âge, leur particularité.
Sans doute le travail d'analyse et de mise à distance nécessaire à l'écriture de leur histoire, me laisse t-il le vague sentiment de me trouver devant une poupée gigogne de laquelle il faudrait sortir de multiples poupées avant de trouver enfin la plus petite : l'adolescent.
C'est pourquoi, à présenter ce livre je n'en dévoilerai cependant pas le contenu accessible à chacun en quête de réflexion, de recherche et d'histoire sur le travail institutionnel.
- Dans quelle mesure en effet, peut-on appliquer les modèles théoriques psychanalytiques au fonctionnement institutionnel dans un but thérapeutique ?
L'application de concepts psychanalytiques au cadre ou à l'organisation institutionnelle, n' est-elle pas en contradiction avec la démarche psychanalytique qui place le savoir du côté de l'analysant, du patient, de cet adolescent qui reçoit telle réalité avec sa propre subjectivité et singularité, aussi différente de celle de son voisin peut-être, et qui fait que quelque soit le concept que l'on voudrait poser sur cette réalité, la sienne sera toujours différente ?
La question serait peut-être alors : quelle place donne t-on à la réalité psychique de l'adolescent dans un travail institutionnel, adolescent dont la rencontre m'a parfois manqué dans ce livre.
- Histoire d'une pluralité de soignants dont le besoin de s'inscrire dans une écriture commune révèle à la fois les conflits et les espoirs d'une équipe, et témoigne d'un vécu qui ne demande qu'a être lu.