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La maladie mentale

Recherches et théories



Christian SPADONE



Dominos- Flammarion



Le commander avec

Dirigée par Michel Serre et Nayla Farouki, la collection "Dominos" vise à "mettre à la portée de tous la complexité du monde". Chaque ouvrage est divisé en deux parties : "un exposé pour comprendre, un essai pour réfléchir."

De "L'espace pour l'homme" (n°1) à "La gestion des déchets" (n°65) en passant par "Les sectes" (n°41) et par "La ménopause" (n°47), cette collection est une véritable fenêtre ouverte sur le monde.

Le lecteur "paresseux" sera rassuré par le faible nombre de pages (autour de 120). Avec un investissement de 50 F., le lecteur "économe" évitera de se ruiner et s'enrichira de connaissances qui pour être vulgarisées n'en sont pas pour cela simplistes.

Le n°64 s'intitule donc : "La maladie mentale Recherches et théories".

Lorsque j'ai lu que l'auteur, Christian Spadone était psychiatre à l'Hôpital Sainte-Anne, j'ai craint le pire. Je m'attendais à découvrir une apologie de la psychiatrie biologique. J'avais tort.

"La panorama présenté ici est donc volontairement rapide, éclectique, et ainsi nécessairement incomplet sinon partial. Ce livre souhaite offrir à chacun une meilleure compréhension des idées actuelles en psychiatrie, et donc des théories qui sous-tendent les choix thérapeutiques dont on entend de plus en plus parler : la psychanalyse, la médication, les thérapies comportementales ou familiales."

"Aucune théorie ne peut prétendre à la supériorité, encore moins à l'exclusivité, ni être présentée comme l'avenir de la psychiatrie."

Les auteurs de fascicules prétendument informatifs feraient bien de s'inspirer de ces phrases.

Il est peu probable que le thérapeute (médecin, psychologue, infirmier, ...) averti apprenne quoi que ce soit à la lecture de ce livre. Ce n'est pas à lui qu'il s'adresse.

Il n'en va pas de même pour l'infirmier "modèle 92". La partie psychiatrique de la formation infirmière est devenue une telle catastrophe qu'il est aujourd'hui possible de travailler en psychiatrie sans jamais avoir entendu parler de la thérapie systémique ou du modèle "stress/vulnérabilité".

Cette absence de culture théorique, cette ignorance ont un prix.

L'infirmier ne travaille plus avec des familles qu'il perçoit spontanément comme suspectes. Sans outil théorique, il ne peut penser la complexité des interactions familiales. Au lieu de rechercher la collaboration des familles, il la considère comme une intruse.

L'infirmier ignore le développement des thérapies cognitives. Il ne sait ainsi pas que le patient atteint de schizophrénie a une difficulté majeure à prendre en compte le contexte des informations qu'il reçoit. Plutôt que d'aider ce patient à repérer les différents contextes, l'infirmier persiste à tenter de ritualiser le patient, à créer une dépendance vis-à-vis des structures de soins et des soignants, à diminuer en fait ses capacités d'adaptation.

Les références cliniques (d'où qu'elles viennent) sont remplacées par des jugements à l'emporte-pièce, et aux passages à l'acte des patients succèdent les passages à l'acte des soignants.

L'infirmier "nouvelle génération", l'aide-soignant qui travaille en psychiatrie, pourront découvrir ou redécouvrir dans ce livre un panorama des différentes théories utilisées.

Ils pourront ensuite aller plus loin.

Il est dommage que la bibliographie publiée en annexe soit si rudimentaire. Elle aurait gagné à être plus riche.

Evidemment, les informations données par C. Spadone pourront être critiquées par tel ou tel tenant de telle ou telle théorie.

Je regrette certaines absences ou approximations. J'aurais aimé par exemple que l'auteur évoque davantage le contre-transfert, l'entraînement aux habiletés sociales ou les prescriptions paradoxales.

Et alors ?

Avec ce livre, vous ne saurez pas tout sur la psychanalyse, les thérapies comportementales ou la génétique. Son ambition n'est pas là.

Pour en savoir plus lisez les ouvrages de référence.

Ce livre est un outil de travail.

Mon exemplaire n'est jamais loin de moi. Il est froissé, corné, jauni d'avoir été trop utilisé. Je le connais presque par cœur bien que je ne sache plus ce qu'a écrit Spadone et ce que j'y ai rajouté.

"Le patient doit participer aux choix des modalités thérapeutiques les plus adaptées à son cas personnel; le psychiatre doit entendre les préférences du malade. Que celles-ci correspondent aux siennes propres ou qu'elles en divergent, il doit l'éclairer sur les avantages et les inconvénients de tel ou tel traitement appliqué à son cas particulier. Excepté le cas inhabituel où la maladie interdit au malade une claire conscience de ses troubles et des soins qu'ils nécessitent, celui-ci doit être partie prenante dans les choix thérapeutiques."

Qu'il s'agisse de répondre aux questions d'une mère inquiète, d'informer un patient sur sa maladie, de s'interroger en groupe sur le sens des troubles, ce petit livre qui tient dans la poche d'une blouse est un remarquable outil d'information aussi utile dans son domaine qu'un appareil à tension ou qu'un thermomètre.

Il ne repère pas les symptômes, il contribue à libérer le patient en lui permettant de faire des choix. Il sert de support à une information partagée. Il atteint donc ainsi ses objectifs.

Dominique Friard.


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