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Un petit rien dit tout

 

 

Il est écrit que cette journée sera particulière,

Le moment est venu de regarder dans le miroir.

Continuer d’avancer sur dix années en arrière,

Une bonne raison après tout, de s’arrêter pour voir.

Le monde de la santé prend un autre visage,

Les contours sont flous, les traits sont fatigués,

Les reflets ne sont pas nets, politiques d’usage,

Pas question de se priver, pour devoir  soigner.

 

Depuis toutes ces années, j’ai donc cherché du sens,

Car comme beaucoup d’autres, j’étais à la recherche,

D’un lieu de liberté où l’on crie où l’on pense,

Que soigner les patients, c’est leur tendre une perche.

Ce sont donc pour les riens qui font le quotidien,

Que je me suis rallié à cette grande aventure,

Des petites mains qui font et  puis refont le soin,

Dans ce monde médicalisé, un vrai choc de cultures.

 

Un petit rien dit tout, je le pense, je le jure,

Un petit soin a tout pour soulager c’est sûr.

 

Ecrire pour ne rien dire, me fait peur tout d’un coup,

Ai-je tous les moyens pour aborder les riens.

Un sentiment humain, c’est logique après tout.

Faisons comme si de rien, alors parlons du  soin.

Ce soin qui aujourd’hui, s’échappe  comme un rien,

On veut qu’il rapporte, des sous, à point c’est fou.

Economies à tout prix, on ne recule devant rien,

On nous dit rien, mais on nous ferme tout.

 

En psy, il ne faut pas oublier, le diplôme  vaut plus rien,

Sa spécificité, aujourd’hui c’est sa polyvalence.

Soigner ce qui rapporte,  orientation du soin,

Compétence, c’est compter, nouvelle gouvernance.

Un patient n’est donc rien s’il n’est pas bénéfice,

La souffrance aussi, peut être au bas de l’échelle.

Un soignant çà fait rien doit faire des sacrifices,

Même si l’état sait bien,  restera des séquelles.

 

Un petit rien dit tout sur le malaise  ambiant,

Un petit soin, c’est tout,  faudra rester patient !

 

On ne vient pas en psy pour rien, très grande incertitude,

Pour régler quoi on n’en sait rien, c’est l’inconscient qui nous mène.

On n’y reste pas pour rien, recherche des aptitudes,

Pour affronter la souffrance, répondre à un peu de peine.

Mais comment aborder le  soin sans parler de l’humain,

La maladie et la personne ne peuvent être dissociées

Sans l’humain le soin n’est rien, cela nous le savons bien,

Et c’est fondamental pour relation soignant-soigné.

 

Les petits riens du soin, sont donc en relation,

Ils mettent en lien l’humain, acteurs de la santé.

Un passage obligé vers une acceptation,

Pour pouvoir se comprendre, c’est d’abord s’écouter.

Tout notre quotidien est fait de petits riens,

Sans importance sans doute vu de notre extérieur,

Ils sont pourtant la base, de débuts de chemins,

Partant de l’intérieur pour l’envie de meilleur.

 

Un petit rien dit tout pour la personne en souffrance,

Un petit soin, c’est fou, peut stopper une errance.

 

C’est un tout petit rien qui devient salutaire,

Celui qui mine de rien doit former une équipe.

Lorsqu’il prend une  forme pluridisciplinaire.

Notion qui  trop souvent peut nous laisser sceptique.

C’est un rien rassurant, pour une prise en charge,

Une même direction pour redonner la vie,

Pour écouter, soigner toutes ces vies en gage

Essayer de construire un présent, une envie.

 

Quand le tout parle donc toujours le même langage,

Plus facile de soigner et puis  se projeter.

Le soin bénéficie,  alors bien davantage,

Au patient qui du coup se sent bien entouré.

Ce petit rien trop souvent ne va pas toujours loin,

Car pluridisciplinaire rime avec éphémère,

Habitués à soigner trop souvent dans nos coins,

Nous oublions aussi de rester terre à terre.  

 

Un petit rien dit tout s’il est accompagné,

Un petit soin, c’est tout, s’il est bien expliqué.

 

Comment  aborder  l’accueil, instant pour mieux s’entendre,

Un moment important, aux lourdes conséquences.

Ecouter, c’est gagner du temps pour mieux comprendre

Ce que veut dire souffrance, perte ou encore  violence.

En matière de recueil, je veux dire  attention,

Un bonjour vaut bien,  plus qu’un livret d’accueil.

Le soignant ne peut-être qu’un livre d’observation,

Il doit être présent pour prévenir les écueils.

 

Un petit rien c’est comme une porte ouverte,

Sur une possibilité d’un instant partagé,

L’avantage parfois d’une minute offerte,

Et de sortir un peu du monde des soignés.

De pouvoir parler de tout et puis de rien,

Etrange liberté, d’un univers fermé.

Pouvoir rire ou pleurer, cela peut faire du bien,

L’essentiel parfois, pouvoir laisser parler.

 

Un petit rien dit tout, quand il devient repère,

Un petit soin, c’est tout, au moins ce que j’espère.

 

Mais un petit rien peut porter à grosses conséquences,

Si le soin ne s’autorise  aucunes concessions.

La rechute d’un patient peut devenir expérience,

D’avoir soigné pour rien laisse cette impression.

Il faut donc se doter aussi de points de rechute,

Ne pas voir le retour comme un échec cuisant,

Le petit rien parfois, c’est reconstruire un but,

Même si au quotidien, c’est souvent épuisant.

 

Les petits riens sont comme une course folle,

Ils essayent chaque instant de rattraper le temps.

Pour tous ces patients pour qui la vie affole,

Chaque petit bien peut apaiser l’instant.

Un coup de téléphone, une adresse retrouvée,

Sont autant de prétextes pour pouvoir prétendre,

Un paquet de cigarettes, une info recherchée,

Sont  autant de traitements qui aident pour entreprendre

 

Un petit rien dit tout pourvu qu’il soit sincère,

Un petit soin est grand s’il n’est pas arbitraire

 

 

 

Un petit rien humain, c’est faire de la prévention,

De la violence ou encore de l’agressivité.

Refuser de glisser vers  de la contention,

Une remise en question de notre savoir soigner.

C’est mettre  la patience, face à l’énervement,

Là où c’est trop souvent qu’on clos la discussion,

Se termine finalement dans un grand isolement,

D’un lieu ou réflexion rime avec oppression.

 

C’est donc notre devoir, rester aux petits soins,

Pour toutes ces existences, qui souvent sans défenses,

Nécessitent pour nous, soignants d’aller plus loin,

Pour toutes ces histoires privées de complaisance.

Nous sommes, revendiquons d’être professionnels,

Quand nous croisons ces vies avec des plaies béantes,

Elles nous obligent à rester, très opérationnels,

Afin de mieux comprendre, ces grandes déferlantes.

 

Un petit rien dit tout, parfois même sans rien dire,

Un petit soin peut  tout, faire oublier le pire.

 

Coup de balai sur les soins, comme une grande menace,

La rumeur se gonfle comme un bruit de couloir.

Mais ce grand nettoyage d’une psychiatrie qu’on chasse.

Qu’on veut laisser sans soins, doit sortir du parloir.

Plus possible d’accepter et de passer l’éponge,

Sur ces grandes réformes qui mènent vers nulle part,

Pas question de sacrifier, tous ces budgets nous rongent,

Il est temps de lutter pour un nouveau départ.

 

Finalement, que c’est bon de se voir dans  le miroir,

Permet de se poser, se remettre en question.

Celles qui toutes ces années me donnent envie de croire,

A un monde plus humain sans discrimination.

Je défendrais toujours l’image d’une éthique,

Pour dire que le patient n’est pas une marchandise.

Contre tous ces pouvoirs qui sont en politique,

Soins pour tous, un soin c’est tout, telle sera ma devise.

 

Un petit rien dit tout, l’envie de se défendre,

Un petit soin pour tous, le soin n’est pas à vendre.

 

 

Yves-Marie FROT

Toulouse 14 novembre 2008

5ème journée Serpsy