Retour à l'accueil


Retour à Journée Serpsy


Approchez la distance !
De la distance à la proximité thérapeutique




De Vous à Moi

 

De vous à moi,

Vous êtes bien loin

Deux fauteuils dans notre pièce habituelle,

Mais deux mètres cinquante d’années lumières, entre vous et moi

Deux galaxies différentes

Vous entre 9h30 et 10h30

Moi entre un trajet de bus pénible et le vide pour le restant de la journée

Vous fermé mais souriant de naturel professionnel

Moi parlant mais hurlant dans le silence

Ni vous, ni moi, n’entendons ce que dit l’autre

 

De vous à moi,

Pourquoi cette blouse blanche ?

Ma détresse est-elle si contagieuse ?

Ou bien avez-vous besoin de cette armure pour vous protéger ?

De qui? De quoi? Sans même questionner,

Habitude, tradition et distance, avec du coton épais,

Du qui bout à 95 degrés, au caz’ou

Où êtes vous, qui êtes-vous derrière cette blouse?

C’est ça que je voudrais savoir

A la poubelle la blouse!

Distance, proximité… c’est une affaire de personnes, pas de chiffons

 

De vous à moi,

Vous me tutoyez sans même me demander

Tu croies bien faire parce que j’ai quinze ans et toi quarante

Ou tu t’en fous

Tu me vouvoies sans même me demander

Vous croyez bien faire, vous suivez les protocoles sans questionner

Car le patient, ça se maintient a distance

 

De vous à moi,

Vous dîtes aux étudiants mal réveillés “dépression clinique sévère avec T.O.C.”

Sans me regarder, sans considérer ma personne ou ma dignité

Car il faut montrer que vous savez “exercer la distance”

Je ne suis que diagnostique et inventaire de contention chimique

Sur lesquels on ne me demande surtout pas mon avis

Je suis tant de mois ou d’années, tant d’interventions, tant de HTDs

Je suis un problème, pour lequel on met de la distance

Parce que c’est plus facile à gérer

 

De vous à moi

Tiens, je vous sens proche, il y a connexion aujourd’hui

Quelque chose dans l’air peut-être

Un terrain où nous pouvons nous rencontrer

Et aborder la parole et tant pis si elle nous rend tous les deux sourds

Car ça hurle à l’intérieur,

Faut que ça sorte, en douceur ou en douleur, c’est égal,

Ou je me noie

 

De vous à moi,

Aujourd’hui je casse mes limites

D’habitude hautes comme des forteresses,

Ligne de démarcation servant à protéger

Protéger de moi-même bien sûr,

Moi qui ne sais que marcher sur la corde raide

Et j’ai peur que vous, que tous

Voient la profondeur de mon délabrement intérieur

Cependant, aujourd’hui, je fais quelques pas

Et j’ose penser à voix haute,

Tentant de vous rejoindre dans le dialogue

 

De vous à moi,

Attention, faut surtout pas me faire le coup du transfert

Je vous parle, ne théorisez pas tout

Ne cherchez pas midi à quatorze heures,

Sinon je décroche, je rentre dans ma boîte

Derrière mes remparts,

Loin de vous

 

De vous moi,

Me voilà pris au piège,

Je ne sais pas quoi dire ou comment réagir

Vous me racontez des détails de votre vie personnelle

Votre femme ça ne va pas bien et puis le petit dernier fait des siennes

Mais je ne veux pas de cette intimité, imposée ou pas,

Je m’enfonce de plus en plus dans mon fauteuil,

Je ne sais plus où me mettre, moi qui fait tant d’efforts

A ne pas dépasser cette ligne invisible,

Entre vous et moi

Et voila que vous l’écrabouillez allègrement

Et que vous m’écrabouillez en même temps

Merde alors!

 

De vous à moi,

Vous me tendez un mouchoir papier,

Dégagé bien vite de sa boîte, cette boîte

Sur laquelle mon regard vient toujours se fixer,

Là, au milieu de la table basse qui nous sépare

Avant, un bras venait trouver mon épaule quand les larmes

Débordaient de leurs limites et des miennes

Et puis un jour, finitto, plus rien, que des mots,

Que de la distance, supervision oblige, un vrai gouffre

Mais pas d’explications

Jl’ai très mal pris, j’ai rien compris

Vous m’auriez expliqué, j’aurais compris

 

De vous à moi,

Il n’y a qu’un geste,

Une main qui vient se poser sur mon épaule,

En guise de reconnaissance

Je sursaute, personne ne m’a ainsi touché depuis des mois

Je ne le supporte pas, je ne m’y attendais pas

Je ne le mérite pas

Ca me fait hurler de douleur, brûlure invisible

Ca me fait hurler de douleur, souvenir intolérable de douceur

 

De vous à moi,

Il y a un gouffre immense,

Lorsque mon âme est en crise, vous pensez état psychotique

Alors que ce dont j’ai vraiment besoin

C’est d’une connexion humaine très forte

Et que tout ce que vous m’offrez,

C’est une interprétation à mille bornes de ce que je ressens

Psyché, c’est l’âme et vous avez oublié cela

 

De vous à moi,

Peut-être qu’en vous rapprochant de moi,

Vous trouveriez un autre monde

Là où les âmes communiquent sans parler,

Où les êtres et les objets ont une aura fragile et forte à la fois

Et des rubans de lumière dorée émanent des corps

Votre perception du monde diffère trop de la mienne

Et je préfèrerais que vous n’insistiez pas à me l’imposer

Au nom de la normalité ou d’une certaine idée

De ce qui est acceptable ou pas

 

De vous à moi,

Les mots dits et les non-dits

Le silence, collection de particules flottantes entre nous,

Ce qui est permis et ce qui ne l’est pas

Faut se protéger, toujours

Les regards, les gestes

L’humain et le professionnel,

Avec un peu de bol du professionnel humain

La théorie, la rhétorique

Les cultures, les traditions, les pratiques,

Et la réalité, la vôtre, la mienne

Tout ça, de vous à moi, je vous le dis

Tout se qui compte c’est vous et moi,

Ensemble, pour la durée,

A l’esprit ouvert et à l’écoute de mon cheminement intérieur

 

 

 

 

De vous à moi, c’est d’abord une collection de vignettes vécues par moi-même ou par d’autres.

 

De vous à moi, c’est aussi, dans cette seconde moitié, une perspective usagère sur le terrain du vécu. La théorie, je la laisse à d’autres, mieux formés et informés que moi.

 

J’en suis à quelques quatorze années de pratique de la santé mentale, je ne sais pas ce que ça vaut au grand compteur de l’expérience, mais j’ai vu et subi ou accepté des styles de rapports différents avec les professionnels.

Il y en a eu qui mettaient de la distance dans la distance, surtout au départ, comme si j’étais un animal dangereux, de la proximité dans la proximité aussi parfois, mais peu qui ont su mettre de la proximité dans la distance, et surtout la bonne dose pour que chacun soit à l’aise avec l’autre. Car pour moi c’est d’abord une affaire de personnes, d’humain à humain, de respect de l’autre et d’ouverture d’esprit, avant les formations et les protocoles.

 

Mon parcours de militante a changé mon rapport avec les psychiatres. Je fais rarement du « eux et moi », mais eux et moi, nous nous entendons assez peu. Pas la même conception de ce que devrait être un système de santé mentale, de traiter les patients ou de vivre sa vie. Cependant, depuis que l’on connaît mon engagement, les psychiatres me respectent et  me traitent en adulte. De fait, même si la distance entre eux et moi n’a pas terriblement  raccourci, ce qui ne me gêne pas, nous avons néanmoins trouvé un compromis d’entente.

 

Avec la psychothérapie, c’est différent, il y a proximité. Je me sens plus en sécurité avec cette forme de travail sur soi car je sens que cette approche me respecte même si l’expérience est souvent, dirons-nous, remuante. Je me sens aussi plus proche dans ma relation avec le thérapeute, sans que la qualité de ce travail soit compromise. Je peux questionner sans que cela pose problème, sans m’entendre dire que j’ai un problème avec le thérapeute ou que je fais un transfert (comme si faire un transfert était alors un symptôme de quoique ce soit), ou que je suis une personne difficile. Au contraire, il y a partenariat même si la balance des pouvoirs, j’en suis bien consciente, demeure en sa faveur. 

 

Mon petit moi n’ayant qu’un intérêt relatif, je suis donc allée voir ce que mes petits camarades pensaient du sujet. Ce qui suit est donc un recueil de réflexions sur le vécu, regroupées plus ou moins par thèmes ou ad lib. Cela n’a pas pour but de faire des généralités sur le sujet ou sur les compétences professionnelles des uns et des autres.  Ont contribué au texte qui suit: Rose, Susan, Jonathan, Rosie, Cindy, Jeff, Patsy, Emma, Helen et moi-même.  Voici donc ce que nous avions à dire….

 

D’abord et avant tout, l’atterrissage dans les services psy est une expérience traumatisante en elle-même et un bon accueil, un accueil de qualité bien sûr, est vital. Tout, distance, proximité, empathie et son contraire, partent de là.

Ecouter, vraiment écouter ainsi que le choix fait en général et à ce stade là  par les professionnels de santé, de la bonne thérapie, de la bonne approche, sont aussi vitaux. Dès qu’on prend le parti de ne pas répondre aux questions, de ne pas informer ou de ne pas le faire en termes clairs et non condescendants, on traite les usagers comme des idiots, au sens propre du terme, on crée un fossé qui peut être extrêmement néfaste pour la suite du traitement et tout à fait inutile.

 

Pour certains donc, le rapprochement, la proximité avec un thérapeute est quelque chose qu’ils souhaitent ardemment, mais aussi qu’ils redoutent. Entamer une relation avec un thérapeute est une affaire de confiance, autant en ce qui concerne la personne que du contexte.

 

Au départ, le thérapeute étant un étranger, la confiance est un sentiment relatif au processus qui va me-nous conduire à lui-elle, puis à négocier ou se mettre d’accord sur les conditions dans lesquelles la thérapie va se passer. Cette question de confiance est primordiale, mais souvent négligée par les professionnels, lesquels sous-estiment trop les conséquences destructrices du manque de confiance et de fiabilité. La personne en demande de thérapie doit pouvoir faire entièrement confiance avant de s’exposer. Cet effet destructeur potentiel est renforcé par la tendance contradictoire, de la part des professionnels de santé, surtout des médecins, à exiger un engagement, un degré de motivation très haut et une coopération sans faille, comme conditions même d’offre de l’aide.

D’où une ambiguïté permanente pour certains dans le contact avec les sources de soins, de traitements etc. D’où une réticence parfois extrême, voire un refus,  pour d’autres, à accepter tout contact avec les professionnels de tous poils.

 

Pour commencer un travail de thérapie, nous sommes tous d’accord, il faut des limites, des règles claires et bien établies. Ceci non seulement au sens pratique, durée, lieu et heure de la session, mais aussi en ce qui concerne la position éthique du thérapeute. Il est en effet important de savoir si le thérapeute appartient à un organisme ou une association accréditée, reconnue, et que l’on peut donc vérifier qu’il y a possibilité de recours au cas où il y ait problème.

Au fil du temps, le thérapeute doit pouvoir aussi démontrer qu’il peut raisonnablement estimer la durée potentielle de la thérapie, ce afin d’être clair sur cette notion de « contrat » et aussi d’éviter les abus, surtout de ceux qui font durer le plaisir financier dans le privé, forme de racket de la vulnérabilité et de la détresse. Au risque de donner dans le truisme, le thérapeute est tout de même dans une position de pouvoir extraordinaire. D’où l’importance de ces limites bien définies, lesquelles protègent les uns et les autres ...

 

Cependant, en santé mentale, les buts sont repoussés, les frontières plus floues et plus rigides à la fois et les règles réécrites. Cette frontière entre ce qui est humain et ce qui est inapproprié est donc plus marquée en santé mentale, qu’il s’agisse du langage du corps ou des mots.

 

Nous nous sommes donc demandés à quoi est due cette spécificité en santé mentale ? Pourquoi là plus qu’ailleurs, en médecine dite générale ? A quoi tiennent ces règles la plus part du temps non dites ? Nous n’avons pas de réponses mais des constats.

 

Une amie proche, médecin anesthésiste mais aussi usagère dans le passé, a offert son point de vue fondé sur son expérience professionnelle. Elle dit que prendre la main d’un patient dans la sienne au cours d’une conversation au chevet de celui-ci, en général pour faire part de nouvelles douloureuses ou difficiles - mais pas toujours-, ne présente aucune difficulté. Pour elle, il s’agit d’un geste éphémère sans conséquences, une marque d’humanité simple qui transcende tous les protocoles. Pour être franche, elle dit que ce sont surtout les infirmiers-mières qui sont le plus démonstratifs, plus que ses collègues médecins.

 

Ces patients, ces personnes, peuvent être en grande détresse émotionnelle ou psychique et sont souvent vulnérables dans leur corps et dans leur âme, autant qu’une personne en service psy, comme si, d’ailleurs, il y avait une hiérarchie de la misère personnelle ou psychique selon les services. Pourtant rien ni personne ne vient décourager le contact de cette main alors que nous sommes tous vulnérables, à tous points de vue, dans un lit d’hôpital…

 

Ce contact physique n’est ni acceptable ni voulu par tous, bien sûr. En fait il est rarement recherché par les usagers en santé mentale. Nos seuils individuels de tolérance divergent. Nous sommes tous plus ou moins sensibles à ce qui fait distance ou proximité pour les uns ou pour les autres. En parallèle des thérapies parlées, ou conventionnelles, on encourage pourtant le toucher par la pratique des médecines complémentaires comme les massages et autres méthodes de relaxation corporelle. Du point de vue des usagers, cela paraît presque contradictoire.

 

Cette amie a aussi mis le doigt sur quellque chose qui revient beaucoup. En santé mentale, on peut en arriver à ne plus savoir communiquer.  On n’est pas là pour faire causette et ça se sent.

Nous usagers parlons avec notre cœur, notre âme, nos pensées les plus intimes et on nous donne souvent la réplique avec un discours ou un jargon sans âme. Les professionnels font naturellement attention aux mots qu'ils emploient et certains usagers finissent par décrocher ou d’autres par les imiter et se tenir sur leur garde, réfléchissant à deux fois avant de s’exposer. Dans les pires cas, comme celui du dialogue de sourds qui peut se tenir dans les entretiens, les mots deviennent chargés, codés, compliqués et amplifient la distance dans le discours et dans la relation soignant-usager.

 

Pour cette amie, ce manque de communication vraie, sincère en psy n’aide pas au processus de recouvrement et elle aurait aimé plus de chaleur humaine, une main peut-être… Le fossé semble creusé par les années et le degré d’institutionnalisation. Les professionnels ont ainsi souvent, pas toujours bien sûr, perdu cette fraîcheur, cette capacité d’intuition qu’ils avaient lorsqu’ils étaient étudiants.

 

Mais il y a d’autres façons de concevoir et de vivre la distance.

Exemple : Que penser d’un thérapeute qui vous tient à distance et vous isole volontairement en s’asseyant derrière un bureau, dans un fauteuil confortable, et vous fait asseoir sur une chaise ? En dehors du meuble barrière, il y a déséquilibre instantané. Puis accroissant encore la distance en rejetant clairement les pensées de la personne comme quelque chose de sans importance, de négligeable.

Ou encore cet exemple d’un médecin chef qui, lors d’une première rencontre dans son bureau avec un usager le fit asseoir sur une chaise, face à un mur, sans rien dire pendant la durée de …comment appeler cela ?... ni session ni entretien en tous cas. Inutile de dire que cet usager déclina un autre rendez-vous…

Ou encore le syndrome du piédestal, lorsque le thérapeute insiste pour avoir toujours raison car le professionnel, c’est bien connu, sait toujours mieux que le patient ! 

 

Beaucoup ont aussi parlé de cet air de désintérêt souvent arboré par les thérapeutes, considéré comme une marque de professionnalisme, mais souvent vécu par le patient comme un manque très net d’empathie.

Certains usagers vivent en effet assez mal le déséquilibre entre d’une part, eux révélant souvent avec difficultés et beaucoup d’efforts des aspects très intimes de leur vie et d’autre part, ce qui leur paraît être un mur froid, le thérapeute, qui ne laisse rien paraître de sa vie personnelle, pas même des petites choses du style  « désolé de l’état de mes godasses ce matin…. j’ai sorti le chien sous la pluie…. oublié d’en changer ». Pour ces usagers, il doit être possible de montrer un peu d’humanité et de redresser quelque peu la balance sans pour autant  trahir son professionnalisme. C’est ce qui se fait très bien en recherche qualitative, sans pour autant compromettre l’intégrité du travail.

 

Par contre d’autres vous diront que d’avoir quelqu’un qui ne dit rien et ne fait qu’écouter est exactement ce dont ils ont besoin. Mais il est aussi facile d’abuser du silence et certains thérapeutes ont tendance à en faire une utilisation excessive, tant et si bien que le patient devient nerveux et se met à débiter tout ce qui lui passe par la tête uniquement pour remplir ce silence devenu intolérable.

 

Le sentiment d’empathie, de proximité ou de distance, est nourri par celui d’être ou non entendu et surtout compris. Mais non seulement.

Il est aussi sous-tendu par l’appréciation que nous sommes considérés comme des personnes entières avec nos talents propres, avec un avenir surtout, et traitées avec respect et non comme des objets.

Il est à noter que les usagers font aussi nettement la différence entre certaines formations, celle en particulier des médecins psychiatres, certains modèles, tel que le modèle médical, qui sont clairement vécus comme accroissant la distance soignant–usager et d’autres formations, celles des infirmiers en général ou d’autres approches thérapeutiques moins rigides, plus ouvertes et plus proches du modèle social, qui tendent à la proximité.

Que nous soyons en demande active d’aide ou que le traitement nous soit imposé, nous laissons ou devons laisser entrer des étrangers dans notre intimité profonde, celle des émotions, des pensées et de nos expériences de vie, dépositaire de ce qui fait que nous sommes qui nous sommes. Nous n’avons guère le choix, il nous faut faire confiance et c’est ce qui ressort le plus de ce que les usagers disent, faire confiance, en espérant que l’on traitera cette confiance comme un objet précieux.

 

Un dernier témoignage, celui d’une personne au rôle triple, qui dit ceci :

 

J’ai été et je suis thérapeute, usager et accompagnant.

Je suis thérapeute. Je fais de mon mieux pour m’investir pleinement. Lorsque je suis avec vous, je veux comprendre ce que vous vivez et ressentez, mais à la fin de nos 50 minutes, je vous laisse partir…

Je suis un usager. Quelle confiance puis-je avoir en vous ? J’ai besoin de vous montrer combien je suis vulnérable mais puis-je le faire en toute sécurité lorsque vous avez le pouvoir d’arrêter cette relation ou encore de limiter ma liberté en m’enfermant.

Je suis un accompagnant : A l’usager : Où puis-je me réfugier lorsque tes exigences sont trop grandes ? Comment puis-je te protéger de toi-même ? Jusqu’à quel point devons nous faire intervenir les professionnels dont nous avons besoin ? Je connais ta peur d’eux et de leur pouvoir. Je connais ton désarroi lorsque tu te sens très peu entendu.

 

De vous à moi est un tableau de réflexions et de vécus peut-être assez négatif. Il est vrai que nous sommes tous, usagers, professionnels, le sieur Dupont,  toujours plus enclins et prompts à critiquer qu’à souligner et faire la promotion de ce qui est positif ou du travail de qualité accompli par beaucoup. Mais il est aussi vrai que ce qui motive le plus souvent les usagers à prendre part à ce genre d’exercice, et je n’ai pas eu de mal à recruter, ce sont les expériences négatives, une certaine colère et une belle dose de frustration. Frustration d’autant plus que souvent il suffirait de peu pour arriver à un équilibre plus intéressant, plus équitable dans la relation soignant-usager, là où le respect et la confiance entre les personnes concernées voudraient vraiment dire quelque chose.

 

Je voudrais pouvoir terminer De vous à moi avec cette anecdote  qui concerne le thérapeute que je vois normalement le vendredi, chez moi en Angleterre.

Il y a une vingtaine d’années, mon psychothérapeute était donc un jeune homme voyageur. En France dans la région de Triffouillis-les-oies, l’envie lui prend d’acquérir le summum de l’art automobile français : une Deudeuche. Ce qu’il fit promptement…. ce à deux pas de l’endroit où j’habitais alors. Comme quoi nous vivons peut-être vraiment, sans le savoir, dans des univers parallèles, proches et éloignés à la fois.

 

 

 

 

 

 

 

Anna Donskoï
Journée Serpsy, 19 mars 2004.





nous contacter:serpsy@serpsy.org