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Travail infirmier en centre d'accueil et de crise
Travail infirmier au CAC(Centre d'Accueil et de Crise) de Champigny, 3eme secteur de psychiatrie adulte du Val-de- Marne(94), service du Dr Chedru-Poyet.
Mmes A.Rivini et G.Cardinal, infirmières de secteur psychiatrique, au CAC.
Cet article sera publié dans la revue "Soins psychiatrie"
Sommaire
Cet article fait suite à la journée du jeudi 7 mai consacrée à "Urgences et Crise en Psychiatrie, l'Accueil, une pratique dans la communauté ". Cette journée, organisée par les associations "Accueils ? ", " Vivre en Ville " et le 2eme secteur du Val-de-Marne s'est déroulée au Palais des Arts à Nogent-sur-Marne.
Nous sommes intervenues dans la 1er table ronde qui avait pour thème : " les infirmiers dans travail d'accueil. Urgences et crises : liens avec la communauté ". Nous avons choisi de vous présenter sommairement le Centre d'Accueil et de Crise et l'équipe du CAC. Puis nous vous présenterons un cas clinique particulièrement significatif de notre travail d'infirmier au CAC.
Présentation du centre d'accueil et de crise.
Le centre d'Accueil a été ouvert par le Dr AMADO en 1978.
L'équipe du CAC est composée de 10 postes d'infirmiers de jour ( soit 9,60 infirmiers), un surveillant, un Praticien Hospitalier, un médecin vacataire, une psychologue à temps partiel., une assistante sociale à temps partiel. Dans notre secteur les infirmiers sont mobiles, nous changeons de service tous les cinq ans maximum.
Notre CAC, comprenant 4 lits d'hospitalisation, est implanté dans la commune de CHAMPIGNY-sur-Marne et fonctionne 24h/24. Nous accueillons les urgences 24/24, 7 jours/7. Nous avons 4 places de soins de jours intensifs.
L'équipe du CAC reçoit, écoute, apaise, oriente et organise des soins en urgences.
L'équipe peut se déplacer au domicile des patients, dans les hôpitaux avoisinants (CHU Henri Mondor, Hôpital Saint Camille), entre autres (urgences ). S'il y a une urgence somatique de type T.S. , nous faisons appel selon la gravité aux pompiers.
Nous assurons une permanence téléphonique 24/24 = appel des patients, de leur famille, ou police, circonscription, généralistes, hôpitaux généraux.
Accueillir la crise : le travail infirmier.
Lorsqu'un patient se présente qu'elle qu'en soit l'origine de sa présence au CAC, nous l'accueillons dès son arrivée. Nous présentons l'équipe et les lieux sommairement. Puis nous évaluons la souffrance de la personne et nous proposons une orientation de soins = plusieurs choix sont possibles : entretiens infirmiers, rencontre avec le psychiatre, avec la psychologue. Lorsque nous accueillons un patient, nous nommons toujours le médecin qui est le référent thérapeutique du CAC.
L'hospitalisation au CAC.
Les quatre lits d'hospitalisation de crise sont une alternative à l'hôpital psychiatrique. Les patients sont volontaires pour se soigner. La Présence au CAC en temps plein permet un temps de pause, de rupture avec la souffrance de leur quotidien. C'est un temps d'interrogation et de réflexion sur soi-même, qui peut être une amorce d'un travail thérapeutique à moyen ou long terme.
L'hospitalisation "temps plein et "accueil jour " permettent de médicaliser les soins, ce qui peut être rassurant pour certains patients. C'est aussi un moyen de contact pour les patients très défendus.
La durée moyenne de séjour s'étale de quelques jours à deux semaines.
Présentation sommaire de cas cliniques suivis au CAC.
Mlle W.
Jeune femme de 29 ans, d'origine italienne, célibataire, vivant chez ses parents.
C'est la famille (père, mère, frère, oncle et tante) qui a présenté Mlle W. au CAC, et ce à plusieurs reprises.
Ils se plaignaient de son attitude, la décrivant comme "méchante " vis-à-vis de sa mère, ne mangeant plus, ne voulant plus aller travailler, se dévalorisant.
Elle se plaignait à ses parents à propos de sa valeur au travail, voulait démissionner.
Son petit ami en Italie : présenté par une tante avec projet de mariage arrangé.
Elle ne sait pas ou elle en est vis-à-vis de ses sentiments pour lui.
En quelques années, c'est la deuxième fois qu'on lui présente un homme dans ce contexte.
Ce qui l'a amené au CAC :
Mlle W. a fait une "crise de tétanie " avant de rencontrer le fiancé, et c'est le soir en urgence qu 'elle est amenée par sa famille au CAC.
La demande des parents est : " qu'elle soit bien pour l'arrivée de son fiancé ".
Nous avons posé la question du désir, ce à quoi la mère est totalement hermétique.
La crise s'est vite passée, et mis à part un RDV infirmier le lendemain, Mme W. n'avait pas donné suite aux soins.
La deuxième fois, elle est arrivée dans le même contexte, un soir à 20 H.
Il nous a semblé important de séparer Mlle W de sa famille dans ce moment de crise. Mlle W. a été reçue par mon collègue infirmier. Dans le même temps, j'ai reçu la famille( père, mère, frère, l'oncle et la tante maternelle)pour comprendre ce qui se passait. La mère a raconté la rencontre avec ce 2eme fiancé présenté par la tante(sœur de la mère) d'Italie, lors du séjour de Mlle W. en janvier. Pour Me W.(mère), il n'est pas envisageable que sa fille se marie avec un homme qui ne lui conviendrait pas(à la mère). Mlle W. a déjà eu des petits amis, " mais qui ne me convenaient pas, et dans ce cas , je ne veux pas en entendre parler ", dit Me W.(mère). De même, Me W. dit être mécontente que sa fille parte en vacances avec des amies de son travail. Je pose la question à la famille : que dit Mlle W. sur ses envies, ses projets ? Le père prend la parole et est aussitôt coupé par la mère. Je clos la discussion.
Mlle W. a accepté l'hospitalisation au CAC, ayant intégré le fait qu'elle doive se soigner.
Le travail pour elle est actuellement en cours, autour de ses désirs, sa situation professionnelle, ses projets de vie.
Une première rencontre avec la psychologue a déjà eu lieu.
Mlle W. a pu exprimer son ressenti, ses inquiétudes sur son avenir, a pu dire que son travail lui plaisait beaucoup, qu'elle n'est pas prête à tout quitter(travail, France, amies, famille) et s'installer en Italie. Elle exprime toujours des difficultés à travailler, doutant de ses compétences.
L'hospitalisation lui a permis de prendre du recul, un peu de distance critique vis à vis de ses parents. Elle peut le dire et élaborer un début de séparation possible avec ses parents se mettant ainsi à l'abris du danger psychique entraîné par un rejet des parents à son égard si elle évoque un projet de vie qui ne leur convient pas.
Actuellement, Mlle W. vient en accueil jour au CAC. Elle peut ainsi bénéficier d'entretiens infirmier et d'en suivi avec son psychiatre.