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Le Cri

Je me permets de raconter mon histoire car je pense qu'elle concerne beaucoup d'entre nous.
Le 20 Février, j'arrivais au pavillon Royer-Collard de l'hôpital Esquirol, je fus très bien accueillie.
Mon transfert en car de police fut horrible, j'en passerais les détails.
J'ai appris que c'était ma famille qui avait demandé pour moi un " placement volontaire "; je leur en ai beaucoup voulu, au début, mais je me rend compte maintenant que j'étais très fatiguée. J'avais besoin d'un temps d'arrêt.
Je me suis donc retrouvée comme parquée entre quatre murs, interdiction de sortir même dans le jardin, de porter une lettre, d'aller à la cafétéria ou de me rendre à la bibliothèque. Je me sentais en prison, abandonnée de tous et de plus affolée par l'inactivité forcée. Rien d'autre à faire que manger et dormir. Heureusement, la nourriture est bonne. Nous surveillons l'heure des repas et un retard de cinq minutes nous désoriente totalement. J'étais au bord du désespoir, n'ayant pas de visite et me sentant murée à vie, personne ne parlant de ma sortie. J'étais en prison. Cette période dura plus d'un mois.
Ma mère a demandé un changement de placement. Son obtention fut très rapide après sa demande. Ouf ! Je n'aurais pas pu tenir encore longtemps.
Maintenant, je peux sortir dans le jardin, aller à la cafétéria et même plus, j'ai eu l'autorisation de sortir seule pour aller voter et déjeuner chez ma mère ... Hourra ! J'ai un pied vers la vie, vers l'extérieur.
C'est fantastique car les médecins ne cherchent pas du tout à nous garder plus que nécessaire. Ils voient vraiment notre intérêt, je le comprends maintenant. J'ai eu beaucoup de chance de tomber sur Esquirol.
Je peux aller aux ateliers où j'apprends beaucoup de choses. La peinture soufflée, la céramique, la mosaïque. J'en profite bien car peut-être que cela me servira après ma sortie. J'aime aussi beaucoup " Sons et Expressions " où nous apprenons par les instruments de musique à écouter les autres et à s'écouter. Cela me sera d'un grand secours après ma sortie.
Le moral remonte, on parle de plus en plus de sortie maintenant, et c'est à moi de plaindre ceux qui n'en sont pas encore là ou qui ne peuvent sortir faute d'endroit où aller ensuite. Çà c'est dramatique.

Que peut-on faire ?


Brigitte.

Vivre aux Eclats n° 0, Mai 1981.


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