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Des nouvelles de la Bulgarie



Loin du regard de la société
Des discriminations systématiques
à l'encontre de personnes souffrant d'un handicap mental


Entre octobre 2002 et mai 2003, Amnesty International a lancé une action de grande envergure. Plusieurs réseaux dont les relais médicaux ainsi que les sous-groupes enfants, les relais femmes, le réseau syndicaliste et quelques groupes locaux ont participé à une action Bulgarie* au cours de laquelle Amnesty International a dénoncé le sort de nombreux handicapés mentaux détenus dans des foyers sociaux ou hôpitaux psychiatriques dans des conditions révoltantes : mise à l'isolement arbitraire, absence de personnel soignant qualifié, maltraitances. Il a été constaté aussi l'insalubrité des locaux, l'absence de thérapie, les pratiques de contention, une rupture avec la famille, la malnutrition, de nombreux décès surtout en hiver.

Cette action a connu des succès temporaires. Le gouvernement bulgare a procédé à certaines mesures positives : fermeture de 6 institutions, amélioration des conditions de vie et des soins, ce qui a contribué à une baisse du taux de mortalité.

Une délégation du Secrétariat International s'est rendue en Bulgarie du 20 au 27 juin 2004, voici le compte-rendu de leur visite :

Mission de Ivan Fiser (chercheur du SI sur l'Europe) du 20 au 27 juin 2004


Ivan Fiser a visité une douzaine d'institutions pour enfants et adultes souffrant de handicap mental en Bulgarie. Six d'entre elles ont été fermées suite à l'action menée par AI. Environ 30 enfants présentant des troubles complexes ont été transférés à Mezdra en novembre 2003. Leurs conditions de vie et les soins se sont considérablement améliorés dans les nouvelles installations. Un autre progrès enregistré dans les foyers pour adultes est la baisse du taux de mortalité et apparemment l'absence de mise à l'isolement et des pratiques de contention considérées comme inhumaines et dégradantes.
Néanmoins le personnel dans pratiquement toutes les institutions visitées reste encore inadéquat, aussi bien en nombre qu'en qualifications, il en résulte un manque d'activités thérapeutiques et de mesures de rééducation pour les résidents. Les chercheurs lors de leurs visites ont aussi constaté une surveillance insuffisante qui a entraîné récemment deux décès.
Le personnel inapproprié, le nombre important de résidents dans des institutions situées dans des lieux très reculés constituent des facteurs majeurs empêchant des améliorations substantielles. L'institution de Plovdiv, deuxième grande ville de Bulgarie, accueillant environ une cinquantaine d'hommes, apporte des soins acceptables et des activités à leurs résidents bien qu'elle possède des installations plus modestes que d'autres institutions plus grandes, pauvrement gérées et ayant des difficultés à recruter un personnel approprié. Cette exception montre que des services adaptés aux personnes souffrant de handicap mental peuvent être organisés dans des centres urbains avec les ressources budgétaires disponibles.

Toutefois le gouvernement n'a pas clairement défini un plan visant à la réintégration de ces personnes dans les communautés ; un objectif stratégique adopté en 2003 visait à offrir des possibilités égales aux personnes handicapées mentales. Au contraire, il est prévu de transformer une vaste institution située dans la montagne ayant servi comme camp de vacances pour enfants. En fait, elle accueillerait les femmes de Sanadinovo, institution qui a été fermée en 2002 après une action lancée par AI. Leur situation s'est améliorée bien que la plupart d'entre elles se sont plaintes de ne pas habiter plus près d'une agglomération urbaine. Il est prévu également de transférer 180 résidents de Rusokarsto et de Pastra (foyers ayant fait l'objet d'actions de la part d'AI) dans cette immense infrastructure.

Une autre préoccupation qui mérite d'être relevée, c'est le sort de 70 enfants et de jeunes adultes de Djurkovo vivant dans un village de montagne très éloigné. Bien qu'ils présentent des troubles complexes du développement (51 souffrent d'une infirmité motrice cérébrale et 18 sont atteints de trisomie), ils ne reçoivent aucune thérapie. Trois " éducateurs " qui ont été recrutés dans le cadre de projets de réhabilitation individuelle (ce qui est une complète parodie) possèdent des diplômes de chimie, agriculture et sociologie.

Jeanne Vovan
Coordinatrice au service
des commissions