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Le 1er Mai plus qu’une date

Entre brin de muguet et fête du travail

 

De la fête du travail à l’impératif de l'action collective internationale. Une lecture d’histoire propre à mieux comprendre notre présent et a se réapprioprier notre avenir.

L'histoire.

C’est en 1793 que Fabre d'Églantine dans un rapport sur le calendrier lu à la Convention institue pour la première fois en France une fête du Travail, le 19 septembre.

Saint-Just, dans les Institutions républicaines, établit des fêtes publiques le 1er de chaque mois. La fête du Travail aura lieu le 1er pluviôse soit les 20 ou 31 janvier.

En 1848 la Constitution institue une fête du Travail dans les colonies pour effacer les dégradations dues à l'esclavage, elle est fixée au 4 mars, date représentant l’abolition de l'esclavage en France et dans les colonies. Parallèlement et tellement loin de nous sur un autre continent, les travailleurs Australiens décident d’organiser, en 1856,  une journée d’arrêt total du travail, avec des réunions et des distractions, afin de manifester pour la journée de travail de 8 heures. La date de cette manifestation est fixée au 21 avril. Au départ, les travailleurs australiens avaient prévu cette manifestation seulement pour l’année 1856. Mais elle eut une réelle répercussion sur les masses prolétariennes, les stimulant et les amenant à de nouvelles campagnes. C’est ainsi qu’il fut décidé de la renouveler tous les ans.
Mais même si cette fête à des origines plus lointaine , une fois n’est pas coutume, l’instauration du 1er Mai comme réelle journée de la fête du travail est d’origine américaine. C’est à Chicago en 1884 que la genèse s’opère. les principaux syndicats ouvriers des États-Unis s'étaient donné deux ans pour imposer aux patrons une limitation de la journée de travail à huit heures. Ils avaient choisi de débuter leur action un 1er mai, beaucoup d'entreprises américaines entamant ce jour-là leur année comptable.

Arrive le 1er mai 1886, date annoncée. Beaucoup de travailleurs obtiennent satisfaction de leur employeur. Mais environ 340.000, entament un mouvement de grève pour forcer leur employeur à céder. Des meetings et des manifestations ont lieux dans de nombreux endroits.

Le 3 mai, une manifestation fait trois morts parmi les grévistes de la société McCormick Harvester, à Chicago. Une marche de protestation a lieu le lendemain et dans la soirée, tandis que la manifestation se disperse à Haymarket Square, il ne reste plus que 200 manifestants face à autant de policiers. C'est alors qu'une bombe explose devant les forces de l'ordre. Elle fait une quinzaine de morts dans les rangs de la police. [1]

Trois syndicalistes « anarchistes » sont jugés et condamnés à la prison à perpétuité. Cinq autres sont pendus le 11 novembre 1886 malgré des preuves incertaines. Le sang de ces martyrs a donné une signification toute spéciale à la journée du Premier Mai.

Sur une stèle du cimetière de Waldheim, à Chicago, sont inscrites les dernières paroles de l'un des condamnés, Augustin Spies : «Le jour viendra où notre silence sera plus puissant que les voix que vous étranglez aujourd'hui»

Entre-temps, une idée analogue prend forme en France. La première fédération syndicale, la Fédération des Syndicats Ouvriers, née en 1886, et dont ses principaux dirigeants, Dormoy et Raymond Lavigne, étaient des militants du Parti Ouvrier « guesdiste » et marxiste propose en 1888, à un congrès à Marseille, que les journées du 10 et du 24 février 1889 soient consacrées à des manifestations dans tout le pays en faveur de la journée des huit heures. Cette proposition est acceptée et des manifestations se produisent en une cinquantaine de villes.

A l'occasion de l'Exposition Universelle de Paris de 1889, un congrès socialiste international est convoqué à Paris. C’est le Congrès dit de la salle de Pétrelle. En fait, ce furent deux congrès qui se réunirent, l'un rassemblant les «possibilistes» (socialistes de droite), l'autre qui allait devenir le congrès de Fondation de la IIe Internationale.

C’est à cette occasion et sur la proposition de Raymond Lavigne que le Congrès décide d’adopter une journée à date fixe pour les ouvriers demandent la journée de 8 heures.

La résolution adoptée eut le texte suivant :

« II sera organisé une grande manifestation internationale à date fixe, de manière que, dans tous les pays et dans toutes les villes à la fois, le même jour convenu, les travailleurs mettent les Pouvoirs publics en demeure de réduire légalement à huit heures la journée de travail et d'appliquer les autres résolutions du congrès international de Paris. »

Dans notre pays, ce fut le 1er mai 1891 qui fut le premier chômé avec éclat. Nous pouvons clairement dégager les caractéristiques que cette journée de combat présenta aux yeux des socialistes et des travailleurs de l'époque. Elle était avant tout une action internationale de la classe ouvrière, la première grande traduction pratique de la devise du Manifeste communiste : « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » La nécessité de cette action internationale n'était pas le produit d'une « doctrine » quelconque. Elle résultait de l'expérience pratique des luttes ouvrières. Les travailleurs n'avaient pas d'autre arme à opposer aux manœuvres du Capital que l'arme de la solidarité internationale.[2]

En est-il autrement aujourd’hui ?

En 1891, les manifestants portent à la boutonnière un petit triangle rouge, symbole de la division de la journée de travail en "trois huit " : travail, sommeil, loisirs.

Plus tard, ils fleuriront leurs boutonnières d'églantines, symbole de la foi en la Révolution et fleur traditionnelle du nord de la France (d'où le surnom donné aux socialistes vers 1900 : les églantinards).

C’est en 1907 lors du 1er mai, que le muguet fleur traditionnelle de l'Ile-de-France (Chaville, Meudon) apparaît. Pour l’année 1936, au 1er mai, on vendra des bouquets de muguet cravatés de rouge.

Depuis 1947 le 1er mai est un jour chômé et payé  en France

Mais il est aussi de part la tradition populaire le jour de fête pour le muguet, son offrande représentant un porte-bonheur.

 

Et aujourd’hui

« La lutte internationale pour la semaine des 40 heures ne doit-elle pas être engagée ? La lutte contre la guerre et les expériences nucléaires n'est-elle pas une lutte internationale d'importance vitale pour les travailleurs de tous les pays ? La question de la conquête du pouvoir par le mouvement ouvrier, de l'abolition du régime capitaliste, ne devient-elle pas une condition nécessaire pour que l'humanité puisse jouir dans la paix et la prospérité des bienfaits d’un progrès technique - domestication de l'énergie nucléaire/automation, etc. - qui, sous le régime de la propriété privée, menaceraient la vie et le pain de millions de travailleurs ? »

Ces écrits sont ceux de Ernest Mandel en 1957 et pourtant ils résonne encore avec un tel accent, un tel tempo dans notre quotidien plus de 50 ans après! L’idée de l’internationale n’a-t-elle été rompue ? S’en souvient-on encore quand les syndicalistes sortent pour ce défilé de leur naphtaline en groupe scindée ! Quand est-il de notre solidarité ?

Ce sont ces pensées qui ne devraient pas nous quitter le 1er Mai, que nous marchions ou non  dans les cortèges. Que nous offrions et recevions ou non du muguet .Le 1er Mai c’est bien plus qu’une date ! Faisons qu’il soit une regroupement Solidaire, Unitaire et Démocratique.

 

La rencontre de tous ceux qui résistent à la transformation de l'humain en matière première, la rencontre de tout les " impossibilistes " qui osent encore rêver en marchant, une société plus humaine par, et, pour tous.

Isabelle Aubard



[1] Site internet www.herodote.net

[2] Ernest Mandel, « les origines du 1er Mai », La Gauche N°15, 27 avril 1957


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