Je
suis infirmière en psychiatrie. J'exerce mon métier depuis 33 ans et je dois
dire que je constate chaque jour une dégradation des soins. Nous avons de moins
en moins de temps a consacrer au soin, nous sommes submergés sous des
multitudes de papiers à remplir, de documents à faire sur ordinateur.
Pour moi le soin c'est avant tout de l'écoute, du lien, du temps, de la
confiance, de l'empathie, c'est aider à mettre des mots sur les maux de la
personne souffrante. C'est aider à sortir de l'enfermement, la répétition,
l'incompréhension ou se trouve le malade. Aider le patient à mettre des
solutions en place pour un mieux être. C'est accepter que le patient retrouve
ces propres envies, besoins. Etre passeur de soins, rassembleur de prise en
charge, chercheur de force vive chez celui-ci.
A l'heure actuelle avec les différents projets de
loi. Le « rapport Couty » il va falloir fermer encore un peu plus les lieus de
soin. Un soin à deux vitesses va être instauré. Cela va être la fin de la
continuité des soins avec l'extra hospitalier. Hors nous, professionnels, nous
savons que concernant la maladie mentale, l'hôpital et les services d'urgences
sont des passeurs de soins. Ils ne peuvent travailler seul, sans l'extra
hospitalier impérativement nécessaire à la prise en charge. La maladie mentale
va être gouvernée par un tas de protocoles qui ne sont pas applicables. La
chartre des patients hospitalisés est affichée sur les murs, et pourtant les
malades mentaux petit à petit perdent beaucoup de liberté. On se leurre, on
pond des protocoles, on affiche des documents, on se dédouane, on se
déculpabilise en affichant, on gomme le fait que de plus en plus on ait recourt
au bracelet de contention, à la chambre d'isolement, ou le patient reste là
pendant des heures, des jours mais il y a un protocol. Nous sommes rassurés, la
société est rassurée, comme cela ne suffit pas 200 chambres vont être crées,
des U MD vont être ouvert. Par contre une quantité de lit ont été supprimés ces
années, ce qui à pour effet de devoir jouer à la chaise musicale avec les lits.
La parole, le sens, la confiance, le lien sont remplacé par la
répression, ce qui au lieu de sécuriser au contraire mais tous le monde en danger, patients, soignants,
société. La réflexion est remplacée par l'action. C'est à dire qu'à toute
parole ou geste inadéquat il faut absolument trouver une solution sans prendre
le temps d'en interpréter le sens. Hors nous, les soignants, nous savons depuis
longtemps, qu'il faut écouter, faire et refaire le même geste pour que la
personne se risque dans une relation, livre ses souffrances, que parfois 10
fois, 20 fois il faut remettre sur le métier à tisser la trame afin de défaire,
et de reconstruire ensuite. Et que c'est à travers cet ouvrage fin, que le
travail fait par le patient, peut avancer.
Je suis
une infirmière révoltée par moment lorsque faute de place je dois accepter que
des patients soient mis dehors hors que leurs
soins nécessiteraient plus de temps,
Je suis une infirmière révoltée lorsque j'entends que puisque qu'un
patient ne veut pas correspondre à ce que l'on veut, nous devons renoncer à le
soigner,
Je suis une infirmière révoltée lorsque chaque jour
il faut se battre pour qu'un minimum de soins soi possible, que la liberté de
chacun soit respecté,
Je suis une infirmière révoltée lorsque je
m'aperçois que de plus en plus il y a une catégorie de malade, qui à de moins
en moins le droit de recevoir des soins,
Je suis une infirmière révoltée lorsqu'on veut me faire croire que
l'hôpital se gère comme une entreprise,
Je suis une infirmière révoltée, lorsque j'entends que pour résoudre les
problèmes de violence, des chambres d'isolement vont être construites en grande
quantité,
Je suis une infirmière révoltée lorsque, j'entends qu'un centre de
cancérologie, va soigner des malades payant. Soins à deux vitesses. Soyons
vigilant, n'acceptons pas tout.
NON AU TOUT SECURITAIRE, NON A L'INTRODUCTION DU PRIVEE
DANS LE PUBLIC, NON AU RAPPORT COUTY ET AU PROJET DE LOI BACHELOT SUR LA
PSYCHIATRIE